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Ras Al-Hikma : le mégaprojet tant attendu par l’Egypte

Dira Maurice , Samedi, 24 février 2024

Le projet de Ras Al-Hikma est le « plus grand accord d’investissement direct étranger » que l’Egypte ait connu au cours de son histoire. En quoi consiste ce projet prometteur ? Que rapporte-t-il sur le plan économique pour le pays ?

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La ville de Ras Al-Hikma en Egypte. Photo: UN-Habitat

Le premier ministre égyptien, Mostafa Madbouly, a annoncé, vendredi 23 février, la signature du projet de développement de Ras Al-Hikma avec la compagnie émiratie Abu Dhabi Developmental Holding Company.

Le projet consiste en la création d’une ville futuriste au bord de la Côte-Nord sur la Méditerranée avec un énorme financement qui va accroître le potentiel urbain et touristique de l’Egypte et l’aider à sortir de sa crise économique actuelle.

Où se situe Ras Al-Hikma ?

Ras Al-Hikma est une région côtière d'Egypte localisée à environ 350 kilomètres au nord-ouest du Caire.

Elle est située dans le gouvernorat de Marsa Matrouh à l'extrémité de la Côte-Nord, sur la Méditerranée.

Elle renferme des plages qui s'étendent de la région de Dabaa jusqu'à la ville de Matrouh sur 50 kilomètres et qui sont considérées parmi les plus belles du monde grâce au sable jaune doux et aux eaux turquoise d'une beauté époustouflante.

En quoi consiste le projet ?

Le projet de « Ras Al-Hikma » est le « plus grand investissement direct » dans l’histoire du pays, selon Madbouly. Il s’étendra sur une superficie de 170,8 millions de mètres carrés, soit plus de 40 600 acres. Pour le mettre en perspective, soit 2,5 fois la superficie de la ville de Nice et un peu moins du quart de Singapour.

Le premier ministre a insisté sur le fait que le projet vise à « développer des villes urbaines intelligentes et pas des stations touristiques ».

Ras Al-Hikma sera une ville nouvelle génération, comprenant principalement une zone franche en plus d’un quartier financier et commercial afin d'attirer les entreprises internationales, ainsi que des espaces résidentiels, commerciaux et récréatifs, comprenant tous les services, tels que les écoles, les universités, les hôpitaux, les bâtiments administratifs, les centres d'affaires ...

Le projet comprendra également des quartiers résidentiels pour tous les niveaux sociaux, des hôtels de haut niveau, des centres touristiques et des projets de divertissement géants.

Pour desservir cette région, l’Etat avait déjà établi la route vers la Côte-Nord avec 10 voies dans chaque direction, le train express électrique à grande vitesse de Sokhna à Salloum et le projet de « Dabaa » pour générer de l'énergie propre à cette région.

Qui sera en charge de développer le projet ?

Abu Dhabi Developmental Holding Company (ADQ) « va acheter les droits de développement de Ras Al-Hikma pour 24 milliards de dollars afin d'en faire l'une des plus grandes villes nouvelles développées par un consortium privé », a annoncé, de son côté, le fonds souverain d'Abu Dhabi.

ADQ créera une société égyptienne par actions appelée « Ras Al-Hikma » pour gérer le projet.

Les noms des partenaires égyptiens dans ce projet n’ont pas été encore dévoilés par le gouvernement égyptien. Or, selon le site d’ADQ, Modon Properties et Talaat Moustafa Group participeront au projet.

Selon la compagnie, les travaux du projet devront commencer en 2025.

ADQ va ainsi aggrandir son portefeuille immobilier en Egypte d'autant plus qu'elle vient de signer en janvier 2024 des accords pour acquérir une participation dans la gestion de 7 hôtels historiques à travers ICON, branche hôtelière de Talaat Moustafa Holding.

Comment le projet sera-t-il financé ?

Madbouly a souligné que ce projet ne représente pas une vente d'actifs, mais plutôt un partenariat dans le cadre duquel l’Egypte recevra une partie du montant des investissements au début et un pourcentage des bénéfices au cours du projet.

L’Egypte recevra 35 milliards de dollars d'investissements directs étrangers dans deux mois, dont 24 milliards de dollars seront injectés en liquidités directes outre 11 milliards de dollars en dépôts émiratis chez la Banque Centrale d’Egypte (BCE).

Le versement des 35 milliards de dollars sera effectué en deux tranches :

- 15 milliards de dollars dans une semaine, dont 10 milliards transférés de l’étranger et 5 milliards des dépôts émiratis chez la BCE.

- 20 milliards de dollars dans deux mois dont 14 milliards transférés de l’étranger et les 6 milliards restants des dépôts émiratis chez la BCE.

Par ailleurs, l’Egypte aura droit à une part de 35 % des bénéfices du projet.

Selon le communiqué publié par l’ADQ vendredi 23 février, la compagnie compte investir 150 milliards de dollars tout au long de la mise en œuvre du projet.

Quel est l’impact du projet sur l’économie ?

L’Egypte souffre d’une pénurie de devises étrangères depuis déjà deux années et l’injection de 35 milliards de dollars dans l’espace de deux mois apaisera la crise.

Ces grandes liquidités permettront de répondre aux besoins du marché en dollar et, par conséquent, réduiront l’écart entre le taux de change officiel, fixé à presque 31 livres égyptiennes, et celui sur le marché parallèle qui s’échange à plus de 60 livres.

Madbouly prévoit que cet accord, en plus de celui avec le FMI, « fournirait à l'Etat égyptien une quantité suffisante de devises étrangères pour surmonter cette crise ».

Par ailleurs, Farouk Soussa, analyste de Goldman Sachs pour la région MENA, a dit, suite à la signature de l’accord : « Si le financement se réalise comme prévu, nous pensons que cela (avec un programme du FMI élargi) devrait fournir suffisamment de liquidités pour couvrir le déficit de financement de l'Egypte au cours des quatre prochaines années ».

Selon les estimations du FMI en décembre 2022, l’Egypte avait un déficit de financement de 17 milliards de dollars, ce qui pourrait maintenant s'être creusé suite aux récentes tensions géopolitiques qui pèsent lourdement sur l'économie du pays.

La dette extérieure, elle, a atteint 164,52 milliards de dollars, au premier trimestre de 2023-24, selon les chiffres de la BCE.

Quel est l’impact du projet sur le tourisme ?

« Nous visons à attirer au moins 8 millions de touristes supplémentaires avec l'achèvement de cette ville géante », assure Madbouly.

Le premier ministre a souligné que Ras Al-Hikma comprendra une grande marina pour les yachts et les bateaux de croisière en Méditerranée.

Il a été de même convenu qu'un aéroport international sera établi au sud de la ville, hors de la zone du projet. Un contrat sera conclu avec ADQ pour développer et gérer l'aéroport et l'Egypte aura une part des revenus de cet aéroport.

Ce qui sert l’objectif du gouvernement égyptien d’atteindre 30 millions de touristes au cours des cinq prochaines années.

Que représente ce projet pour la vision de l’Egypte 2052 ?

Le développement de Ras Al-Hikma fait partie du plan de développement urbain de l'Egypte pour 2052.

Ce plan a identifié la Côte-Nord comme la première région prometteuse capable de devenir une destination touristique mondiale et d'accueillir la grande croissance démographique en Egypte en raison de son potentiel très prometteur, dont les conditions climatiques et géographiques.

Le plan comprend les villes de la Nouvelle Alamein, Ras Al-Hikma, Al-Néguila, Sidi Barani et Jarjoub qui disposeront d'infrastructures avancées et qui accueilleront des millions d’habitants.

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