Un coup de théâtre, aux conséquences encore incertaines: la justice européenne a annulé mercredi les décisions approuvant les aides massives de la France à Air France et Air France-KLM pendant la crise sanitaire, estimant que la Commission européenne avait commis une "erreur dans la définition des bénéficiaires".
Saisi par les compagnies aériennes Ryanair et Malta Air qui considéraient les mesures d'aide "contraires au droit de l'Union", le Tribunal de première instance de l'Union européenne "fait droit à ces recours", a-t-il annoncé dans un communiqué.
Les conséquences concrètes de ces arrêts sont incertaines. Les aides d'Etat, des milliards d'euros qui ont permis à Air France-KLM et ses compagnies de surmonter la crise sanitaire ayant mis à l'arrêt le transport aérien mondial en 2020, ont depuis été remboursées, avec intérêts.
"Air France-KLM et Air France prennent note des deux arrêts", a indiqué le groupe aérien dans une réaction transmise à l'AFP, précisant que les deux entreprises les "examineront attentivement (...) pour en évaluer les implications".
"Air France-KLM et Air France étudieront l'opportunité de former un pourvoi en annulation devant la Cour de justice de l'Union européenne. Parallèlement, Air France-KLM et Air France contribueront à tout échange entre l'Etat français et la Commission européenne en vue de l'adoption d'éventuelles nouvelles décisions d'approbation", selon la même source.
En outre, "Air France-KLM rappelle qu'Air France-KLM et Air France ont respecté et appliqué le 19 avril 2023 toutes les conditions de sortie des aides d'Etat accordées en vertu du cadre temporaire de l'Union Européenne relatif au Covid-19".
Ryanair, pourfendeur des aides d'Etat
La décision de mercredi fait écho à celle du 10 mai 2023, quand le même tribunal avait annulé deux vastes plans de recapitalisation de compagnies aériennes, celui de Lufthansa par l'Allemagne et de SAS par le Danemark et la Suède.
L'instance, dans ces affaires, avait déjà été saisie notamment par Ryanair, compagnie low-cost irlandaise grande pourfendeuse des aides d'Etat faussant selon elle la concurrence dans le transport aérien en Europe.
Mercredi, le tribunal de l'UE a rappelé les faits: "en avril 2020, la France a notifié à la Commission européenne une mesure d'aide individuelle en faveur d'Air France, prévoyant de lui accorder premièrement une garantie d'Etat à hauteur de 90% sur un prêt d'un montant de 4 milliards d'euros consenti par un consortium de banques et deuxièmement un prêt d'actionnaire d'un montant de 3 milliards d'euros au maximum".
"Selon la Commission, seule Air France était bénéficiaire de cette aide, à l'exclusion de toutes les autres sociétés du groupe Air France-KLM", a souligné le tribunal dans son communiqué.
Par la suite, "en mars 2021, la France a (...) notifié à la Commission une aide individuelle sous la forme d'une recapitalisation d'Air France et de la holding Air France-KLM, d'un montant total de 4 milliards d'euros", a encore indiqué la juridiction.
Parmi les mesures de ce plan: "une participation de la France à un projet d'augmentation de capital d'un montant maximal d'un milliard d'euros" et "la conversion du prêt d'actionnaire en un instrument hybride".
Là aussi, "selon la Commission, seules Air France et la holding Air France-KLM étaient bénéficiaires de cette aide, à l'exclusion notamment de (la compagnie néerlandaise) KLM, société faisant partie du groupe Air France-KLM".
Pour Ryanair et Malta Air, "la Commission a erronément défini les bénéficiaires de ces aides, en décidant que ni la holding Air France-KLM", dans l'une des décisions, "ni KLM (dans les deux décisions contestées) n'en étaient bénéficiaires".
"Le Tribunal fait droit à ces recours et annule les décisions de la Commission. Il considère que cette dernière a commis une erreur dans la définition des bénéficiaires des aides d'Etat octroyées" et conclut "que la holding Air France-KLM (dans la première affaire) et KLM (dans la seconde affaire) étaient susceptibles de bénéficier, à tout le moins indirectement, de l'avantage accordé par les aides d'Etat en cause".
Lien court: