Des accrochages meurtriers ont eu lieu cette semaine entre l’armée soudanaise et des forces armées venues d’Ethiopie. C’est du moins ce qu’a affirmé le commandement militaire de Khartoum jeudi 28 mai, précisant que des milices éthiopiennes soutenues par l’armée éthiopienne avaient commencé à attaquer des zones de l’Etat de Gedaref, dans l’est du Soudan, dans la zone frontalière d’Al-Fashqa. Un officier soudanais et un enfant ont été tués au cours des échanges de tirs, et neuf civils auraient été blessés. Ce qui a poussé les autorités soudanaises de présenter une plainte contre l’Ethiopie au Conseil de sécurité de l’Onu.
Le premier accrochage a eu lieu jeudi autour d’un point d’eau, sur la rivière Atbara qui traverse la frontière entre l’Ethiopie et le Soudan. Un détachement d’une milice éthiopienne, soutenue par l’armée, est rentré en contact avec des soldats de l’armée soudanaise sur le territoire soudanais. Des combats ont aussi éclaté dans la région de Gedaref, un secteur frontalier où l’accès aux ressources fait l’objet d’une dispute entre les Soudanais et les Amharas, le peuple éthiopien dont la province est frontalière. « Car c’est une zone stratégique qui a toujours été disputée entre les deux pays en raison des richesses qu’elle détient », explique Dr Mona Soliman, professeure de sciences politiques à l’Université du Caire. Les états-majors des deux pays s’étaient pourtant rencontrés plusieurs fois, ces derniers mois, pour pacifier la situation dans la région et éviter les incursions. Et Khartoum et Addis-Abeba sont engagés dans des pourparlers en cours sur la démarcation des frontières entre les deux pays. Ceux-ci avaient en outre signé un accord en 2017, appliqué en avril dernier, sur le déploiement de forces conjointes le long de leur frontière commune, et ce, pour empêcher le trafic d’armes et l’immigration clandestine dans cette zone.
Mais pourquoi cette recrudescence maintenant ? Y a-t-il un rapport avec le dossier du barrage de la Renaissance ? Peut-être, répondent les analystes. « L’Ethiopie veut faire pression sur le Soudan pour le contrer à se ranger de son côté dans le dossier du barrage de la Renaissance, alors qu’Addis-Abeba entend entamer le remplissage du barrage en juillet prochain, et des négociations tripartites (Egypte, Soudan et Ethiopie) doivent reprendre prochainement. Mais c’est un calcul erroné de la part des Ethiopiens qui peut leur être nuisible, d’autant plus que les Soudanais détiennent des preuves de l’agression éthiopienne », explique Mona Soliman.
Pour faire preuve de bonne volonté, Addis-Abeba a appelé les autorités soudanaises à permettre à la diplomatie de trouver une solution. Dans un communiqué publié dimanche 31 mai, le ministère éthiopien des Affaires étrangères a exprimé « sa profonde sympathie et ses condoléances aux familles des victimes des deux pays ». Une déclaration intervenue 24 heures après que le ministère soudanais des Affaires étrangères eut déclaré avoir convoqué l’ambassadeur éthiopien au Soudan .
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