Une mère et son enfant dans le centre nutritionnel thérapeutique ambulatoire de l’hôpital d’Adré. Photo : MSF
"Ce n'est plus une urgence, c'est un cauchemar", a alerté vendredi l'organisation Médecins sans frontières (MSF) à propos de l'insécurité alimentaire au Soudan déchiré par la guerre, appelant les belligérants à permettre l'accès humanitaire.
"Les taux de malnutrition sont terrifiants" dans le pays "confronté à l'une des crises les plus dévastatrices que le monde ait connues depuis des décennies", raconte depuis Nairobi Claire San Filippo, coordinatrice pour MSF, en revenant de camps de réfugiés dans l'est du Tchad.
Le Soudan est le théâtre depuis avril 2023 d'une guerre entre les Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo et l'armée menée par le général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du pays.
Quelque 26 millions de personnes font face à une insécurité alimentaire sévère, soit "près de la moitié de la population", souligne MSF.
Des femmes enceintes, des enfants y arrivent sous-alimentés, parfois contraints de boire de l'eau stagnante. Un bébé, amené par sa grand-mère, a été nourri au lait de vache, ajoute Mme San Filippo.
"Nadia", une mère de trois enfants arrivée depuis El-Facher, grande ville du sud-ouest du pays tombée aux mains des paramilitaires qui l'assiègent, lui a décrit le manque de nourriture, d'eau, de soins de santé.
"Elle m'a dit que des gens meurent partout", relate-t-elle.
Les deux camps ont été accusés de crimes de guerre, pour avoir visé délibérément des civils et bloqué l'aide humanitaire dans ce conflit qui a fait des dizaines de milliers de morts et provoqué le déplacement de plus de 10 millions de personnes, selon les Nations unies.
En raison du blocus d'approvisionnement que les FSR ont imposé au camp de Zamzam, où la famine a été déclarée, MSF a été contrainte de prendre la décision "déchirante" d'y arrêter ses activités.
"Cela signifie que nous laissons 5.000 enfants, dont 2.900 enfants gravement sous-alimentés, sans aide" dans le camp près d'El-Facher, au Darfour.
Mme San Filippo a appelé les belligérants à "mettre un terme à ces obstructions et à accorder immédiatement un accès humanitaire sans entrave".
"La crise alimentaire atteint (...) des proportions épiques. Et la réponse à laquelle nous assistons n'est pas suffisante", ajoute Lisa Searle, médecin revenant d'Omdurman, ville jumelle de Khartoum.
"Dans de nombreux cas, ces familles n'ont pas d'argent pour payer le transport pour se rendre aux hôpitaux (...) Elles doivent traverser les lignes de front pour se rendre à l'hôpital", raconte-t-elle, avant d'ajouter: "Dans bien des cas, elles arrivent trop tard".
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