Presque un mois de négociations sans aucune lueur d’espoir. Après deux rounds de négociations à Genève entre l’opposition et le gouvernement syrien, le médiateur de l’Onu, Lakhdar Brahimi, n’a pu que s’excuser «
auprès du peuple syrien dont les espoirs étaient si grands ».
Il a mis fin samedi dernier aux discussions, dans l’impasse depuis trois semaines, et n’a fixé aucune date pour une reprise. « Je pense qu’il est préférable que chaque partie rentre et réfléchisse à ses responsabilités, et dise si elle veut que ce processus continue ou non », a déclaré M. Brahimi.
Il était prévu que ce deuxième cycle de discussions, tenu du 10 au 15 février, aboutirait à une date pour une nouvelle réunion. « Quand les deux camps ont accepté de rester à la table de négociations pour la deuxième fois, tout le monde a pensé qu’il y aurait une solution pour régler certains points d’achoppement dans ce conflit, par exemple un établissement d’un cessez-de-feu, la libération de certains détenus … Mais rester un mois en négociations sans aucune avancée n’est qu’une perte de temps. Mais cela donne un répit au régime jusqu’à l’élection présidentielle qui aura lieu dans quelques mois », explique Moetaz Salama, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram.
Depuis le début des négociations en janvier à Genève entre régime et opposition sous l’égide de l’Onu, pas moins de 6 000 personnes ont été tuées, a annoncé l’Observatoire Syrien des Droits de l’Homme (OSDH). Le conflit en Syrie a fait plus de 140 000 morts depuis près de trois ans, selon cette même ONG qui estime que le bilan pourrait être en réalité bien supérieur en raison du black-out imposé par les deux bords.
Terrorisme vs transition
La dernière réunion à Genève entre l’opposition et le régime avait également échoué avec toutefois une avancée notable : pour la première fois les deux parties s’étaient parlé. Rendant compte de la rencontre, le médiateur a expliqué que les deux parties avaient campé sur leur position. « Le gouvernement considère que la question la plus importante est le terrorisme, l’opposition considère que la question la plus importante est l’autorité gouvernementale de transition », a-t-il résumé, ajoutant qu’il avait proposé d’évoquer d’abord la violence et le terrorisme pour passer ensuite au problème de l’autorité gouvernementale.
« J’espère que ce temps de réflexion conduira en particulier le gouvernement à rassurer l’autre partie (sur le fait) que, quand ils parlent d’appliquer le communiqué de Genève, ils entendent que l’autorité gouvernementale transitoire doit exercer les pleins pouvoirs exécutifs », affirme Brahimi.
L’exercice des pleins pouvoirs exécutifs reviendrait à priver le président Bachar Al-Assad de ses prérogatives même si cela n’est pas écrit explicitement dans le communiqué, d’où le blocage de Damas sur ce point.
Selon le porte-parole de la délégation de l’opposition, Louai Safi, « le régime n’est pas sérieux. Nous ne sommes pas ici pour négocier le communiqué de Genève mais pour l’appliquer. Nous devons être sûrs que le régime veut une solution politique ».
Côté gouvernemental, le chef des négociateurs, l’ambassadeur syrien auprès de l’Onu, Bachar Al-Jafari, accuse l’opposition de ne pas respecter l’agenda, affirmant qu’il fallait d’abord établir une vision commune sur le premier point, la lutte contre la violence et le terrorisme avant de passer à l’autre.
Le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, a, lui, estimé que les négociations de Genève entre représentants du gouvernement et de l’opposition n’avaient pas échoué et que des « progrès importants » avaient été faits. « Le deuxième round n’a pas échoué, contrairement aux analyses des médias et aux réactions des ministres des Affaires étrangères de France et de Grande-Bretagne. Le deuxième round a réalisé un point très important : la Syrie a approuvé l’ordre du jour proposé par le médiateur Lakhdar Brahimi : à commencer par le premier point, qui est la question de la violence et de la lutte contre le terrorisme ».
Brahimi a indiqué qu’il allait rendre compte à New York au secrétaire général, Ban Ki-moon, de ces négociations et qu’il espérait pouvoir tenir une réunion avec lui et les chefs de la diplomatie russe et américaine.
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