L’envoyé spécial américain pour le Soudan, Tom Perriello, lors d’une conférence de presse lundi à Genève. Photo : AFP
Les Etats-Unis ont assuré vouloir lancer cette semaine en Suisse un processus pour discuter d'un cessez-le-feu au Soudan malgré l'incertitude quant à la participation du gouvernement soudanais à ces pourparlers.
Le Soudan est plongé depuis avril 2023 dans une guerre opposant l'armée régulière du général menée par Abdel Fattah al-Burhan aux paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR) de son ex-adjoint, le général Mohammed Hamdane Daglo.
De précédents cycles de négociations menés à Jeddah, en Arabie saoudite, ont échoué. Fin juillet, Washington avait invité l'armée et les paramilitaires à des pourparlers en Suisse pour tenter de mettre fin à cette guerre dévastatrice qui a plongé le pays au bord de la famine.
Ces pourparlers en Suisse sont "une extension" de ceux de Jeddah, a déclaré l'envoyé spécial américain pour le Soudan, Tom Perriello, lors d'une conférence de presse à Genève.
Il a également indiqué que ce cycle de négociations, qui doit démarrer le 14 août, pouvait durer jusqu'à 10 jours mais il n'en a pas précisé le lieu pour "des raisons de sécurité".
"La priorité de ce processus est de parvenir à la cessation des hostilités" et de discuter de la "protection des civils, de l'accès humanitaire et de l'application de la loi" mais "ce n'est pas le lieu pour avoir un dialogue politique", a-t-il dit, affirmant que "lorsque vous introduisez des politiciens dans l'équation, vous pouvez perdre des heures et des heures sur des choses qui n'ont rien à voir avec la fin de la violence ou l'augmentation de l'aide humanitaire".
Quels participants ?
L'envoyé spécial américain a affirmé que "les FSR ont donné leur accord inconditionnel sur leur participation", mais "les FAS (forces armées soudanaises) ne nous ont pas encore donné de confirmation".
Mais "nous irons de l'avant avec cet événement (...) et cela a été clairement indiqué aux parties", a-t-il dit, tout en reconnaissant que sans le gouvernement "il ne pourra pas y avoir de médiation formelle" mais de simples discussions techniques.
Le gouvernement soudanais a envoyé vendredi une délégation à Jeddah pour discuter avec les médiateurs américains des conditions de la participation du gouvernement soudanais.
Le chef de la délégation, le ministre soudanais des Mines, Mohammed Abou Namo, a annoncé dimanche sur Facebook "la fin des consultations, sans accord sur la participation de la délégation soudanaise".
Tard dimanche soir, le ministre des Médias, Graham Abdelkader, a affirmé lors d'une allocution télévisée que la délégation soudanaise avait constaté "l'incapacité des Etats-Unis à pousser les milices rebelles (en référence aux FSR) à s'engager à mettre en oeuvre la déclaration de Jeddah", négociée l'année dernière lors d'un cycle de pourparlers en Arabie saoudite.
Les négociations de Jeddah n'ont donné lieu qu'à des cessez-le-feu de courte durée l'an dernier, immédiatement rompus par l'armée et les paramilitaires.
Les pourparlers de Suisse, coparrainés par l'Arabie saoudite et la Suisse, incluront l'Union africaine, l'Egypte, les Emirats arabes unis et l'ONU en tant qu'observateurs, selon Washington.
Le gouvernement soudanais "rejette tout nouvel observateur ou participant", notamment après que les Etats-Unis ont "insisté sur la participation des Emirats arabes unis en tant qu'observateur", alors même que l'armée accuse régulièrement Abou Dhabi de soutenir les FSR, a encore dit le ministre Abdelkader.
Pour Perriello, "la présence de l'Égypte et des Émirats arabes unis à la table des négociations est un outil potentiel incroyablement important pour s'assurer qu'il n'y a pas seulement un accord sur le papier", affirmant que ces pays "peuvent devenir des garants" dans les pourparlers.
La guerre a fait des dizaines de milliers de morts, et provoqué une crise humanitaire majeure, selon l'ONU.
Lundi, la présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a dit espérer que les pourparlers sur le Soudan déboucheront sur des "mesures humanitaires très concrètes", tandis que l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) de l'ONU a averti que le pays se situe à un "point de rupture" catastrophique, avec une conjonction de plusieurs crises qui risque de faire des dizaines de milliers de morts.
"Le Secrétaire général réitère son appel à une cessation immédiate des hostilités et à un cessez-le-feu durable. Il exhorte les parties à reprendre le dialogue politique, seul moyen de parvenir à un règlement négocié", a assuré dimanche Farhan Haq, son porte-parole adjoint.
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