L’ex-premier ministre libanais, Najib Mikati, a été chargé lundi de former un nouveau gouvernement après l’échec de ses deux prédécesseurs à mettre en place un cabinet censé mener des réformes indispensables pour sortir le Liban de la pire crise socioéconomique de son histoire.
La France, qui chapeaute les efforts internationaux pour une sortie de crise, a affirmé que « l’urgence est désormais de former un gouvernement compétent et capable de mettre en oeuvre les réformes indispensables au relèvement du Liban ». L’Union Européenne a jugé « d’une importance cruciale qu’un gouvernement responsable soit formé », appelant à des réformes pour éviter « un effondrement financier ». Lors de consultations parlementaires contraignantes menées par le président Aoun, M. Mikati, 65 ans, a reçu l’appui de 72 parlementaires. Quarante-deux députés se sont abstenus.
Saad Hariri avait jeté l’éponge le 15 juillet, après 9 mois d’un bras de fer avec M. Aoun sur la formation du gouvernement. Avant lui, Moustapha Adib avait aussi échoué à former une équipe ministérielle.
Après sa désignation, Najib Mikati a dit avoir conscience de la tâche difficile qui lui incombe. « Mais si je n’avais pas eu les garanties externes nécessaires (...), je n’aurais pas assumé cette responsabilité », a-t-il déclaré en allusion aux puissances étrangères impliquées dans le dossier libanais. « J’ai besoin de la confiance du peuple. (...) Seul, je ne pourrai pas faire de miracles », a-t-il poursuivi, appelant à la collaboration de tous les partis, loin des tiraillements et des marchandages habituels.
En attendant le prochain cabinet, celui de Hassan Diab continuera de gérer les affaires courantes, comme il le fait depuis sa démission en août 2020 après la gigantesque explosion au port de Beyrouth qui a fait plus de 200 morts, des milliers de blessés et dévasté des quartiers.
Déclenchée par un incendie dans un entrepôt qui abritait des tonnes de nitrate d’ammonium stockées sans mesures de précaution, la déflagration a été imputée à la négligence des autorités et l’enquête n’a enregistré aucun résultat concret.
M. Mikati a promis un cabinet avec pour principale tâche de « mettre en oeuvre l’initiative française » du président Emmanuel Macron, qui a proposé en septembre 2020 une feuille de route comportant des réformes économiques en contrepartie d’une aide internationale. Mais le gouvernement qu’il proposera devra avant tout contenter les grands ténors d’une classe dirigeante libanaise, quasiment inchangée depuis des décennies et accusée de corruption, d’incompétence et d’inertie par une grande partie de la population.
M. Mikati a promis d’accomplir sa mission dans un délai d’un mois, selon les médias locaux. Un délai supplémentaire alors que le pays sombre dans une crise classée par la Banque mondiale parmi les pires au monde depuis 1850. Outre la dépréciation historique de la monnaie et l’hyper-inflation, le pays souffre de pénuries en tous genres, rendant particulièrement les hôpitaux d’autant plus vulnérables face à une éventuelle flambée des cas de Covid-19.
L’aide internationale au Liban est conditionnée par la formation d’un gouvernement capable de lutter contre la corruption et de mener des réformes. Malgré les menaces de sanctions de l’UE, les avertissements et les accusations « d’obstruction organisée » ces derniers mois, les dirigeants libanais n’ont pas bougé d’un iota, poursuivant leurs marchandages. L’effondrement économique a provoqué une paupérisation à grande échelle. La livre libanaise a perdu plus de 90 % de sa valeur face au billet vert depuis fin 2019, s’échangeant lundi à près de 17 000 livres pour un dollar.
Le 4 août marquera le 1er anniversaire de l’explosion au port de Beyrouth. Il coïncidera avec la tenue d’une nouvelle conférence d’aide internationale au Liban organisée par Paris.
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