Un moine passe devant la cathédrale d’Uspenskyi à Kyiv Pechersk Lavra à Kyiv le 20 août 2024. Parlement de l’Ukraine le 20 août 2024. Photo : AFP
Le patriarcat de Moscou a condamné mardi l'interdiction "illégale" en Ukraine de la branche de l'Eglise orthodoxe qui est accusée de lui être liée, votée le même jour par le Parlement ukrainien.
"Il s'agit d'un acte illégal qui constitue une violation flagrante des notions fondamentales de liberté de conscience et de droits de l'homme", a commenté un porte-parole du patriarcat russe, Vladimir Legoïda, sur Telegram.
Le Parlement ukrainien a adopté mardi un projet de loi prévoyant l'interdiction de l'Eglise orthodoxe liée au Patriarcat de Moscou et souvent considérée comme un relais d'influence du Kremlin, après deux ans et demi d'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé plusieurs députés.
Sans surprise, la Russie a aussitôt dénoncé une tentative de Kiev de "détruire l'orthodoxie canonique".
"Décision historique! Le Parlement a voté un projet de loi qui interdit une filière du pays agresseur en Ukraine", a écrit sur Telegram une députée, Iryna Guerachtchenko. Selon un autre parlementaire, Iaroslav Jelezniak, 265 députés ont voté en faveur de ce document, le minimum requis étant de 226.
"Il n'y aura pas d'Eglise moscovite en Ukraine", a renchéri sur Telegram le chef de l'administration présidentielle ukrainienne, Andriï Iermak.
L'Eglise visée par cette décision était jadis la plus populaire en Ukraine, un pays à forte majorité orthodoxe. Mais elle a perdu ces dernières années de nombreux fidèles à mesure que le sentiment national ukrainien gagnait en popularité face à l'ex-puissance russe.
Ce processus s'est accéléré avec la création en 2018 d'une Eglise orthodoxe ukrainienne indépendante de Moscou, puis plus encore avec le début en février 2022 de l'invasion russe de l'Ukraine ouvertement soutenue par le Patriarcat de Moscou.
Selon le député Iaroslav Jelezniak, la nouvelle loi, qui doit encore être promulguée par le président Volodymyr Zelensky avant d'entrer en vigueur, donnera neuf mois aux paroisses de l'Eglise concernée pour "couper ses liens avec l'Eglise orthodoxe russe", qui soutient l'invasion russe de l'Ukraine.
"Nous espérons que la décision d'aujourd'hui accélérera le passage de ces paroisses vers l'Eglise orthodoxe" indépendante de la tutelle de Moscou, a ajouté pour sa part la députée Iryna Guerachtchenko.
Selon des médias, l'Eglise liée à la Russie compte toujours quelque 9.000 paroisses en Ukraine contre 8.000 à 9.000 paroisses pour sa rivale indépendante.
Concrètement, selon des experts ukrainiens, la suppression des paroisses liées à Moscou risque donc de prendre des mois, voire des années, car l'interdiction de chacune d'entre elles devra être approuvée par un tribunal.
L'Eglise orthodoxe visée par cette interdiction avait annoncé en mai 2022 rompre tout lien avec le Patriarcat de Moscou et accusé les autorités ukrainiennes de persécutions.
Mais le gouvernement ukrainien estime qu'elle reste de facto dépendante de la Russie et plusieurs de ses dignitaires sont visés par des enquêtes criminelles.
La décision du Parlement ukrainien vise à "détruire l'orthodoxie canonique et véritable et d'apporter à sa place un substitut, une fausse Eglise", a fulminé mardi la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, citée par une télévision d'Etat.
Selon un sondage réalisé en 2023 par l'Institut international de la sociologie de Kiev, 66% des Ukrainiens étaient favorables à l'interdiction de l'Eglise liée à Moscou.
Par ailleurs, 54% des Ukrainiens s'identifiaient avec l'Eglise indépendante et seulement 4% avec celle soumise au Patriarcat russe, selon une étude d'opinion réalisée par la même organisation en 2022 contre respectivement 42% et 18% l'année précédente.
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