Les Russes votent depuis vendredi pour trois jours de scrutin présidentiel. Une élection que des assaillants venus d'Ukraine tentent de perturber en attaquant des régions russes frontalières.
Les bureaux de vote ont ouvert à 08H00 locales vendredi (20H00 GMT jeudi) sur la péninsule du Kamtchatka et en Tchoukotka, deux régions reculées de l'Extrême Orient russe. Ils fermeront dimanche à 20H00 (18H00 GMT) à Kaliningrad, enclave russe au sein de l'Union européenne.
A 06H00 GMT, les bureaux de vote étaient ouverts dans l'ensemble de ce pays aux onze fuseaux horaires. Le vote se déroule sur trois jours, y compris dans les territoires occupés par la Russie en Ukraine ou encore en Transdniestrie, territoire séparatiste prorusse de Moldavie.
Peu avant le début du scrutin, le chef de l'Etat Vladimir Poutine, 71 ans dont 24 au pouvoir, a enjoint à ses compatriotes à ne pas se "détourner du chemin" en ces temps "difficiles", référence aux conséquences de l'assaut qu'il a lancé contre l'Ukraine il y a plus de deux ans et qu'il présente comme une guerre de survie face à l'Occident.
Le président sortant fait face à trois candidats, le nationaliste Leonid Sloutski, le communiste Nikolaï Kharitonov et l'homme d'affaires Vladislav Davankov.
Dès sa désignation, en décembre 2023, le fervent nationaliste Leonid Sloutski, 56 ans (Parti libéral-démocrate de Russie) qui préside la commission des Affaires étrangères de la Douma (la chambre basse du parlement russe), avait annoncé la couleur en prédisant auprès de l'AFP « une victoire énorme » pour Vladimir Poutine.
Tout aussi virulent, Nikolaï Kharitonov (Parti communiste) vétéran de la vie politique et déjà prétendant en 2004, a focalisé son programme sur la nationalisation de la production et une politique sociale en faveur d'une hausse des natalités, deux grandes orientations qui rejoignent les aspirations du parti majoritaire, Russie unie.
Enfin, Vladislav Davankov, 39 ans, (Parti du Nouveau peuple) est le benjamin des candidats. Cet homme d'affaires promeut une liberté accrue pour les entreprises et un renforcement du rôle des régions. Vice-président de la Douma, dont le parti détient 15 des 450 sièges, il soutient lui aussi largement la politique de Vladimir Poutine.
Le seul opposant à avoir tenté de se présenter, Boris Nadejdine, a vu sa candidature rejetée et toute critique de l'offensive russe est passible de lourdes peines de prison.
Dans une école de Moscou, des dizaines d'habitants sont venus dès l'ouverture du bureau, sous un grand soleil d'hiver.
Lioudmila, une retraitée âgée de 70 ans, dit vouloir "en premier, la victoire" en Ukraine. Pour elle, cela passe par un vote pour Vladimir Poutine.
Natan, ancien ouvrier de 72 ans, a lui aussi donné sa voix à l'actuel président avec l'espoir de voir davantage d'emplois et "qu'il n'y ait aucune guerre".
Le parquet de Moscou a mis en garde jeudi contre toute forme de protestation.
Les autorités russes ne tolèrent plus aucune critique depuis le début de l'offensive en Ukraine en février 2022, la plupart des opposants d'envergure sont soit en exil soit en prison, comme des milliers d'anonymes. Et nombreux sont ceux qui craignent en voir d'autres mourir derrière les barreaux, comme Navalny.
La victoire de Vladimir Poutine à ce scrutin lui permettra de se maintenir au pouvoir jusqu'en 2030 et de se représenter alors pour rester aux commandes jusqu'en 2036, l'année de ses 84 ans. Il avait fait réformer la Constitution à cette fin en 2020.
Le président du Conseil européen Charles Michel a "félicité" avec ironie vendredi M. Poutine "pour sa victoire écrasante lors des élections qui débutent aujourd'hui", ajoutant sur X: "Pas d'opposition. Pas de liberté. Pas de choix".
Les Etats-Unis ont déjà critiqué ce scrutin, dénonçant en particulier les "simulacres d'élections organisées dans les territoires ukrainiens occupés" par l'armée russe.
La diplomatie ukrainienne a appelé la communauté internationale à rejeter le résultat de ce vote, qu'elle qualifie de "farce".
Incursions armées
Dans la ville de Marioupol, occupée par la Russie dans le Sud de l'Ukraine, les responsables électoraux ont installé des urnes sur de petites tables dans la rue et sur les capots des voitures.
L'Ukraine a dans ce contexte accru la pression militaire sur les régions russes frontalières de Belgorod et Koursk, visées par une multitude d'attaques de drones et des incursions d'unités militaires composées de Russes anti-Kremlin.
L'armée russe a dit vendredi avoir repoussé depuis le 12 mars de multiples incursions de combattants venus d'Ukraine dans les régions de Belgorod et de Koursk, admettant avoir dû recourir à l'artillerie et l'aviation.
En parallèle, les attaques de drones se multiplient dans les régions russes frontalières mais aussi à des centaines de kilomètres du front, Kiev ayant promis des représailles aux bombardements que l'Ukraine subit depuis plus de deux ans.
Le ministère russe de la Défense a indiqué vendredi avoir détruit cinq drones ukrainiens et neuf missiles au-dessus de la région de Belgorod. Deux autres drones ont été neutralisés au-dessus de la région de Lipetsk, située à environ 200 km de la frontière.
Dans la région de Belgorod, particulièrement visée, deux civils sont morts et 19 autres ont été blessés jeudi par des drones ukrainiens, selon les autorités locales.
Vendredi, trois enfants ont également été tués dans une frappe ukrainienne à Donetsk, ville occupée de l'Est ukrainien, selon son maire prorusse Alexeï Koulemzine.
La Russie poursuit, elle, ses bombardements quotidiens de l'Ukraine, tuant notamment lors d'une attaque de drone un couple de quinquagénaires à Vinnytsia, à des centaines de kilomètres des zones de combats.
*Article modifié par Ahraminfo
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