Al-Ahram Hebdo : Le Haut-Commissaire des Nations-Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, a félicité, lors de sa visite en Egypte, les efforts du gouvernement et du peuple égyptien pour soutenir les réfugiés. Comment voyez-vous la vision égyptienne quant au règlement de la crise mondiale des réfugiés ?
Ahmed Badawy : L’Egypte a signé la Convention de 1951 des Nations-Unies relative au statut des réfugiés, le Protocole facultatif de 1967 relatif au statut et aux affaires des réfugiés, et un protocole de coopération entre le ministère des Affaires étrangères et le Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés. Historiquement et géographiquement, l’Egypte a de nombreuses expériences d’accueil de réfugiés et de soutien à leur intégration dans la société égyptienne de manière humaine, sans aucune ambition politique. Les chiffres enregistrés auprès du Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés sont de 294 000, mais le nombre de migrants et de réfugiés en Egypte dépasse les 9 millions, selon le dernier recensement de 2022 de l’Organisation internationale pour les migrations. Après l’arrivée des déplacés soudanais, je pense que le nombre pourrait atteindre 13 millions. Les réfugiés sont traités comme des Egyptiens. L’Etat fournit divers services aux réfugiés, que ce soit au niveau de la santé, de l’éducation ou de l’accès à l’emploi. Dans la plupart des activités, les réfugiés ne sont pas obligés d’obtenir un visa ou un permis de travail.
— Quelles sont les conséquences du flux migratoire soudanais sur les pays voisins et sur l’Egypte ?
— Avant le déclenchement du conflit au Soudan, il y avait plus de 3 millions de Soudanais vivant en Egypte. Après la crise, ce chiffre n’a cessé d’augmenter. Le vrai problème réside dans la concentration des communautés dans une zone ou des endroits spécifiques. Il s’agit de l’un des problèmes les plus importants. Par conséquent, les prix des logements et des services dans cette communauté augmentent. Cependant, le déplacement de ces réfugiés vers les gouvernorats peut éliminer ce problème, car l’Egypte n’impose pas de restrictions à leur circulation. Ils se déplacent librement à l’intérieur des gouvernorats. En plus, l’acceptation de la société égyptienne est très claire sur le plan pratique. Les Egyptiens n’ont pas de problème avec les réfugiés, ce qui a été prouvé pendant la guerre en Iraq et les guerres en Syrie, au Yémen et en Libye.
— Selon l’Onu, l’Afrique est le continent le plus touché par la crise des réfugiés. Quel rôle joue l’Egypte pour faire face à cette crise ?
— L ’ Egypte s’efforce, tant au niveau politique qu’au niveau de la coopération internationale, de servir les pays du continent africain, de faciliter les échanges commerciaux et industriels, d’offrir des visas et de permettre l’entrée et la sortie des Africains. En Egypte, nous accueillons des réfugiés d’Erythrée, d’Ethiopie, de Somalie et du Soudan. 50 à 60 % des personnes enregistrées auprès de la Commission des Nations-Unies sont africaines. En outre, l’Egypte s’efforce de promouvoir la paix et la stabilité, car c’est le meilleur moyen de faire face aux conflits prolongés qui entraînent les plus grands flux de réfugiés dans la région. C’est pourquoi l’Egypte déploie des efforts inlassables pour trouver des solutions politiques aux crises dans la région. Le Caire abrite également le Centre de l’Union africaine pour la reconstruction et le développement post-conflit.
— Quel est le rôle de la communauté internationale pour répartir plus équitablement la charge de millions de réfugiés à travers le monde ?
— La dernière visite du Haut-Commissaire pour les réfugiés, Filippo Grandi, en Egypte est considérée comme une reconnaissance officielle du rôle majeur joué par l’Egypte dans ce dossier. Toutefois, le gouvernement égyptien et la société civile ne peuvent pas assumer seuls la responsabilité des réfugiés. Il doit ainsi y avoir une coopération et une coordination avec la communauté internationale et les organisations internationales pour couvrir les besoins des migrants et des réfugiés, afin que l’Egypte puisse continuer à les accueillir et à les soutenir par le biais des institutions gouvernementales ou de la société civile. Les organisations internationales oeuvrant en faveur des réfugiés en Egypte estiment leurs besoins à environ 300 millions de dollars par an. Ces organisations ne reçoivent que 15 % de ce montant de la part des donateurs internationaux. C’est pourquoi l’Egypte souligne l’importance de partager le fardeau pour alléger la pression sur les pays accueillant des réfugiés, conformément aux principes approuvés par la Déclaration de New York en 2016. L’objectif est d’améliorer la qualité des services fournis aux réfugiés et à la communauté d’accueil.
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