« Israël mène plusieurs guerres contre nous sur la géographie, la démographie, l’argent et l’Histoire. Il vise à contrôler tous les aspects de la vie en Palestine, via les assassinats et les arrestations quotidiennes, la saisie de terres pour l’expansion des colonies, le contrôle et l’usurpation de la plupart des ressources d’eau palestiniennes, en plus des restrictions à la libre circulation des personnes et des biens », explique le ministre palestinien des Affaires étrangères, Mohamad Shtayyeh. En effet, depuis 75 ans aujourd’hui, les autorités de l’occupation ont mené un plan déterminé pour s’emparer des terres palestiniennes. Elles ont confisqué de milliers de dounams de terres appartenant aux villages palestiniens sur lesquels des colonies ont été établies et ont encerclé les communautés résidentielles palestiniennes et limité leur expansion horizontale et verticale pour ne pas assimiler la croissance naturelle du peuple palestinien. Les maisons des Palestiniens ont été détruites, en particulier celles qui entravent la mise en oeuvre du plan israélien d’annexer les nombreuses colonies entourant Jérusalem. Les Palestiniens de Jérusalem ont été isolés de leur peuple et de leur patrie en coupant la ville et ses banlieues de son environnement palestinien au nord, au sud et à l’est. Sans oublier les tentatives acharnées d’expulser les Palestiniens de Jérusalem afin de changer la démographie de la ville et d’y imposer une majorité juive. L’Etat hébreu a également séparé le nord et le sud de la Cisjordanie et coupé la contiguïté géographique entre les parties de la Cisjordanie en la divisant en zones dispersées, empêchant ainsi la création d’un Etat palestinien souverain et géographiquement contigu. Cependant, 75 ans après la Nakba, les observateurs s’accordent que la judaïsation des terres palestiniennes a atteint un stade des plus dangereux avec l’arrivée au pouvoir du gouvernement extrémiste actuel. « Le rythme de la colonisation sera accéléré alors que les juifs sont attirés du monde entier afin d’imposer le statu quo. La preuve en est la création de l’administration des colonies qui s’emploiera à légitimer les colonies illégales et à donner un élan au projet colonial durant le mandat du gouvernement actuel. Israël est passé à une étape dangereuse. Il est passé de l’étape de la gestion du conflit à l’étape de sa résolution. Il n’est donc pas surprenant que le ministre extrémiste Smotrich ait présenté un plan complet sous le titre de la résolution au lieu de la gestion du conflit », explique Dr Tarek Fahmy, politologue à l’Université américaine du Caire.
Un rapport publié par des experts onusiens indépendants en février dernier confirme cela. Il révèle qu’Israël adopte une politique systématique et délibérée de démolition et de fermeture des maisons palestiniennes, ainsi que de déplacement forcé des Palestiniens en Cisjordanie tout en construisant parallèlement des colonies illégales, confirmant que les autorités israéliennes auraient démoli 132 constructions palestiniennes en Cisjordanie au cours du premier mois de l’année, dont 34 constructions résidentielles et 15 constructions financées par des donateurs, avec une hausse de 135 % par rapport à la même période en 2022.
Des projets aux objectifs déterminés
Les forces de l’occupation israéliennes vont terminer au cours de ce mois de mai le projet d’un pont suspendu dans le quartier de Wadi Al- Rababa, au sud de la sainte mosquée d’Al-Aqsa à Silwan. Le pont d’une longueur de 200 m à 35 m au-dessus du sol et de 4,5 m de largeur devra permettre aux piétons de passer entre les différents quartiers de Jérusalem et facilitera l’accès des colons à la vieille ville et au mur occidental. Cependant, son principal objectif est de faciliter les incursions des colons d’Al-Aqsa en leur donnant plus de sécurité, de normaliser la présence des colonies dans les parties orientales de la ville mais surtout de fragmenter les quartiers de la ville sainte pour anéantir toute continuité géographique.
Dans ce même contexte, le gouvernement israélien a alloué environ 4 milliards de shekels (environ un milliard de dollars) dans le budget général de cette année pour des projets d’infrastructure et de développement routier pour faciliter le déplacement des Israéliens entre les colonies de Cisjordanie et les centres urbains israéliens loin des routes fréquentées par les Palestiniens. Selon l’Institut palestinien de recherche appliquée (ARIJ), la construction des routes de contournement israéliennes en Cisjordanie (d’environ 938 km de longueur) a provoqué la confiscation et la destruction de vastes étendues de terres, dont la plupart sont agricoles, et nuit sans aucun doute à l’accord sur le statut final, en divisant la Cisjordanie en de nombreuses petites zones géographiquement séparées et non viables. « L’’intensification et l’accélération de la construction de nouvelles routes de contournement sur les terres en Cisjordanie imposent une réalité amère sur les terres palestiniennes », précise le rapport publié par l’institut. En effet, les photographies aériennes montrent que les travaux de percement de routes de contournement de 4,5 km de longueur autour de Huwara, au sud de Naplouse dans le nord de la Cisjordanie, ont confisqué plus de 267 000 m2 de terres de la ville, dont 63 % étaient plantés avec plus de 3 400 oliviers. Pour sa part, le ministère palestinien des Affaires étrangères a condamné ce projet de nouvelles routes qui en Cisjordanie « approfondit et étend la colonisation et sabote délibérément toute chance de créer un Etat palestinien sur le terrain ».
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