C’est dans la Nouvelle Capitale administrative que l’atelier de dialogue soudano-soudanais, intitulé « Perspectives de transition démocratique vers un Soudan pour tous », a eu lieu du 2 au 7 février 2023. Objectif : accélérer le processus politique au Soudan. A l’invitation de l’Egypte, cet atelier a réuni 85 participants de 35 organisations et entités soudanaises. Les participants ont été répartis en 12 commissions pour discuter des questions soulevées sur la scène politique soudanaise, telles que les arrangements constitutionnels, les questions de l’Est du Soudan, les structures et les organes de l’autorité de transition, la justice transitionnelle, le démantèlement du système du 30 juin, la réforme institutionnelle, la jeunesse et les médias. « Ni une seule faction, ni un seul bloc politique soudanais ne peut diriger seul la période transitoire, car celle-ci requiert, par nature, la solidarité de toutes les forces soutenant la transition démocratique », peuton lire dans la conclusion du communiqué final de l’atelier.
En fait, l’atelier s’est conclu par une panoplie de recommandations importantes et la publication d’une proposition d’un « document national directeur de la période de transition » de 38 pages qui servirait comme feuille de route pour surmonter la crise politique (voir fiche des principales clauses). Lors de la conférence de presse rapportée par l’Agence de presse du Moyen-Orient (MENA), les participants ont profondément salué l’initiative de l’Egypte d’accueillir ce dialogue soudano-soudanais, tout en soulignant l’importance de renforcer les relations historiques et privilégiées que le Soudan entretient avec l’Egypte. Mubarak Al-Fadil Al-Mahdi, chef du parti Oumma de la réforme et du renouveau, a confirmé, lors de la conférence de presse, que l’atelier du dialogue avait réalisé un bond en avant dans la scène soudanaise. « Maintenant, nous sommes devenus un bloc unifié avec un accord sur toutes les questions représentant une grande partie du peuple soudanais. Nous ne sommes pas en désaccord avec nos frères de la coalition de la Déclaration de la liberté et du changement — le Conseil central — sur les tâches de la période de transition et sur le fait d’avoir un gouvernement de transition indépendant, mais le différend porte sur le fait que, dans l’accord-cadre, ils annulent le document constitutionnel qu’ils ont même contribué à rédiger en 2019 et ils parlent maintenant de rédiger une nouvelle Constitution, mais sans résultat ». Et d’ajouter : « A travers ce dialogue, nous avons maintenant atteint une étape finale. Le moment est venu de former un gouvernement et de se présenter aux élections. Nous devons plutôt désigner une autorité de transition composée d’experts pour organiser les élections ».
Lever les obstacles
Par ailleurs, Abdel-Razeq Acher, du Bloc démocratique, a évoqué la réussite de l’atelier du Caire quant à l’obtention de documents sur les arrangements constitutionnels, la réforme institutionnelle, la paix, les questions de l’Est du Soudan, la suppression de l’autonomisation de l’ancien régime, la récupération des fonds, les questions de la jeunesse et de la révolution, la justice transitionnelle et les structures de la période de transition. Pour sa part, le chef du Bloc démocratique soudanais, Mubarak Ardol, a déclaré : « Nous avons convenu de former une autorité constituante de transition qui choisit les dirigeants suprêmes de l’Etat, à commencer par le premier ministre, les membres du Conseil de souveraineté et le parlement. Le document n’a pas précisé de noms spécifiques pour le poste de premier ministre ». Il a souligné : « L’autorité de transition sera composée d’une centaine de membres hommes et femmes, avec des pourcentages de 60 % pour les signataires, 10 % pour les groupes de résistance et de jeunesse et 30 % pour les femmes et autres groupes. Nous avons également proposé de créer le poste de vice-premier ministre, que le nombre de ministres soit de 25 et qu’il y ait un gouvernement d’union nationale composé de compétences sans quota partisan ».
En outre, les participants ont souligné la nécessité de démanteler la structure d’autonomisation du régime du 30 juin 1989 dans le cadre du processus d’établissement de l’Etat de droit, et ont estimé que la réforme des différents organes et institutions de l’Etat nécessitait la mise en place des commissions spécialisées stipulées dans le document constitutionnel. Ali Askouri, du Bloc démocratique, quant à lui, s’est félicité du rôle de l’Egypte et des pays voisins parce qu’ils connaissent mieux la situation au Soudan, et historiquement, les relations entre l’Egypte et le Soudan sont profondément enracinées. « Les pays voisins ont un grand rôle à jouer pour soutenir les Soudanais et les rapprocher les uns des autres », estime-t-il.
A son tour, Mirghani Musa, ancien ministre soudanais des Transports et membre du Bloc démocratique, a souligné que « la question de l’Est du Soudan, depuis l’indépendance, n’a pas été comprise, malgré l’importance de sa situation géographique. Nous avons essayé d’expliquer les complexités du processus et comment extraire cette région des problèmes hérités de marginalisation et de retard, en particulier en matière d’éducation et de ressources ». Il a ajouté que Le Caire avait réalisé pour l’Est du Soudan ce que toutes les luttes du mouvement politique civil n’avaient pas pu réaliser, c’est le fait d’être une plateforme de négociation ouverte à tous les partis dans l’Est du Soudan sans exception. A la fin de la rencontre, tous les participants sont convenus du fait que « le dialogue soudanosoudanais est la seule issue pour le Soudan pour traverser la période de transition » .
Les principales clauses du document
— Adhésion au document constitutionnel signé en août 2019, amendé en 2020, et l’inutilité de publier un nouveau document constitutionnel, d’autant plus qu’il n’y a pas d’autorité constituante qui autorise l’introduction d’une nouvelle Constitution.
— Formation d’un « gouvernement d’union nationale » composé de 25 ministres choisis en fonction de leur compétence et sans quota partisan. Création du poste de vice-premier ministre.
— Mise en place d’un organe de transition composé de 100 membres, répartis comme suit : 60 % pour les signataires du document, 10 % pour les comités de résistance et la jeunesse, et 30 % pour les autres groupes et femmes.
— Non-ingérence des forces armées dans les affaires politiques. Les forces armées sont des forces professionnelles et non partisanes qui reflètent les formations de la diversité et du pluralisme soudanais.
— Les Forces de soutien rapide font partie des forces armées conformément à sa loi.
— Les forces armées et autres forces régulières ne sont pas autorisées à exercer un travail politique.
— Dissolution de toutes les milices et leur désarmement, intégration des Forces de soutien rapide et d’autres forces sous l’égide des forces armées, et réforme du système de sécurité et militaire.
— Nomination du directeur des renseignements généraux et de la police est du ressort du chef de l’Etat ou du président du Conseil de souveraineté, sur recommandation des organes dirigeants.
— Renvoi de la plupart des mandats de la commission de démantèlement du 30 juin à la justice, après son échec durant la dernière période.
— Poursuite de la négociation avec les composantes de l’Est du Soudan sous des auspices internationaux.
— Engagement à la mise en oeuvre de l’accord de paix de Juba signé en octobre 2020, tout en oeuvrant à affronter les conditions qui ont produit les différentes guerres civiles.
— Mise en place d’une commission des jeunes qui s’occupe de leurs problèmes et qui assume les tâches de financement des projets visant la réduction du taux de chômage et le renforcement de leurs capacités professionnelles et techniques, ainsi que leurs talents sportifs et culturels.
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