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Sameh Choukri : Une histoire glorieuse et une influence durable

Mercredi, 16 mars 2022

Dans cette tribune, le ministre des Affaires étrangères, Sameh Choukri, explique le rôle de la diplomatie égyptienne au service des intérêts nationaux.

Sameh Choukri,

Article paru dans la revue Al-Siyassa Al-Dawleya en janvier 2022.

La célébration du centenaire de la reprise du travail du ministère des Affaires étrangères le 15 mars 1922, après sa suspension consécutive à la déclaration du protectorat britannique sur l’Egypte en 1914, porte de nombreuses significations dans notre marche vers l’indépendance nationale et plus tard dans l’établissement de l’Etat égyptien aux mains de ses fils fidèles. Elle devient alors un jalon qui nous rappelle le registre glorieux de la diplomatie égyptienne pendant notre histoire moderne, avec tous les défis qu’elle a dû relever avec audace et ténacité, soutenue par des cadres nationaux qui ont fait de leur mieux pour recouvrer les droits de l’Egypte.

La diplomatie égyptienne est passée au fil de ce siècle par différents moments de joie et de tristesse en temps de guerre comme en temps de paix. La diplomatie égyptienne, représentée par son siège au Caire et ses missions à l’étranger, a toujours été et continue d’être un pont reliant l’intérieur à l’étranger en coordination avec les organes de l’Etat. En outre, elle a incarné une voix vibrante sur les tribunes des organisations multilatérales et auprès des décideurs dans leurs capitales respectives.

La diplomatie égyptienne était parfaitement consciente que les droits spoliés seront recouverts dans leur intégralité. Cela fut le cas par exemple grâce aux efforts inlassables de la diplomatie égyptienne à la suite de l’agression tripartite de 1956 et de la guerre d’Octobre 1973. Et enfin au moment du recouvrement de la ville de Taba en 1989, sur laquelle nous avons hissé notre drapeau en toute digité et tout honneur. De même, la contribution de la diplomatie égyptienne à l’établissement de la stabilité internationale et régionale au fil des dernières décennies témoigne de la sagesse des orientations de l’Egypte qui met à profit tous les moyens, en vue d’établir la sécurité, la paix et la prospérité des Etats et des peuples.

Le parcours de la politique étrangère de l’Egypte au cours du siècle dernier montre clairement que Le Caire a toujours été à l’origine de la stabilité dans son environnement régional à travers une politique éthique équilibrée qui ignore les mesquineries et cherche, loin de tout marchandage, à calmer les foyers de tensions, à résoudre les crises et à ancrer la paix.

La politique étrangère de l’Egypte a toujours reflété des faits clairs que l’on peut résumer comme dans les points suivants. Premièrement, la diplomatie n’a jamais fait peu de cas des droits de l’Egypte et n’a jamais accepté de compromis, ni n’a désespéré quant à la récupération de ces droits, face à l’intransigeance ou les tergiversations. Ses mots d’ordre ont alors été la maîtrise de soi et la flexibilité qui ont rendu justice à ses causes. Ajoutons à cela que Le Caire était armé de la foi de son leadership politique dans la force de son front interne.

Deuxièmement, la constante de la politique étrangère de l’Egypte est la diversification des axes de ses actions, le respect mutuel, le refus de l’ingérence dans les affaires internes des Etats, le respect de leur souveraineté et l’indépendance de leur décision politique. La diplomatie égyptienne s’est rangée en faveur des choix des peuples et a tenu à avertir de la nécessité de la cohésion des institutions nationales pour éviter que leur chute ne conduise à des cycles de désordre dans la région.

Troisièmement, la diplomatie égyptienne a réussi, pendant les dernières décennies, à accumuler une importante expertise dans les différents domaines de l’activité diplomatique bilatérale et multilatérale, en plus de la diplomatie du développement économique, écologique, environnemental et autres. Cette expérience a contribué à la conception d’orientations réalistes et raisonnables vis-à-vis de questions internationales et a permis aux décideurs de disposer de la flexibilité nécessaire pour traiter les spécificités de chaque question, surtout à la lumière des mutations profondes qui façonnent la structure de la communauté internationale et ses acteurs. Partant, la diplomatie égyptienne a été capable au fil de sa longue histoire de faire des prévisions détaillées de certains événements-clés et de mettre en place les scénarios nécessaires pour les traiter.

Quatrièmement, les considérations géographiques et les exigences de l’Histoire ont imposé à l’Egypte d’emprunter des voies spécifiques dans sa politique étrangère en direction du monde arabe et de l’Afrique, qui sont un prolongement naturel et des piliers fondamentaux de la sécurité nationale égyptienne. L’Egypte a joué un rôle pionnier dans les mouvements de libération nationale au cours desquels Le Caire a apporté un soutien inconditionné à ses frères arabes et africains sur les plans politique, économique et médiatique. Cet intérêt s’est manifesté par l’accueil au Caire de la Maison des Arabes qui est la « Ligue arabe » et par la contribution à la création de l’Organisation de l’unité africaine. Ces deux organisations ont raffermi les liens de coopération et d’intégration arabe et africaine.

Cinquièmement, l’Egypte ne s’est jamais départie de la dimension islamique de son identité qui était considérée comme un axe pivot de ses actions de politique étrangère. Le Caire a participé à la mise en place de l’Organisation de la conférence islamique en 1969 et a tenu à en faire une tribune pour défendre les causes de la nation islamique et examiner ses préoccupations et ses soucis. L’Egypte a tenu également à son identité méditerranéenne et a fait sa promotion parmi les Etats de la Méditerranée. Ainsi, les relations entre ces deux rives se sont consolidées, étant donné leur long héritage culturel et civilisationnel et vu le poids politique et économique de ces pays.

Sixièmement, bien que l’Egypte ait toujours agi dans les cercles traditionnels de sa politique étrangère en raison de leurs liens avec la défense de sa sécurité, il n’en demeure pas moins qu’elle a mis l’accent sur d’autres cercles et a été omniprésente à l’Est comme à l’Ouest dans toutes les interactions mondiales. De nouveaux partenariats stratégiques ont été conclus avec toutes les grandes puissances partout dans le monde à travers un vaste réseau de relations, qui connaît une croissance remarquable et qui avait pour objectif de donner une impulsion aux intérêts égyptiens dans une variété d’axes, en Amérique du Nord et du Sud, ainsi qu’en Europe. Les pays d’Asie étaient également au centre de l’intérêt de l’Egypte avec qui les rapports ont connu un essor remarquable ces dernières années. C’est ainsi que l’Egypte a signé un accord de libre-échange avec le Mercosur, qui est l’un des plus importants blocs économiques de l’Amérique du Sud. Le Caire est également devenu un membre du dialogue de l’Organisation de Shanghai pour la coopération en Asie. Sans parler des relations nouées avec les pays de la francophonie et l’accueil à Alexandrie de l’Université Senghor.

Septièmement, la force douce de l’Egypte a toujours été un élément principal influent et complémentaire de sa politique étrangère, car l’Egypte possède un héritage civilisationnel et culturel varié qui lui a attribué une large présence civilisationnelle dans les différents cercles internationaux. Et ce, en plus du rôle d’Al-Azhar, en tant que mosquée et université, et de l’Eglise copte qui constituent ensemble une barrière contre les idées extrémistes.

Huitièmement, l’Egypte a réussi ces dernières années à exploiter toutes ses capacités accumulées pendant les dernières décennies et à faire usage des composantes de sa force globale. Ce qui lui a permis d’assumer un rôle plus effectif au niveau régional. Cependant, l’Egypte a tenu à rester à l’écart de tout risque irréfléchi, ou du fait d’être attirée dans des conflits qui pourraient aggraver les maux de la région.

Par ailleurs, les services consulaires présentés aux Egyptiens résidant à l’étranger constituent l’un des piliers essentiels de l’action diplomatique du ministère des Affaires étrangères. A ce propos, l’Etat ne se contente pas d’offrir des services consulaires et d’accorder un soutien aux Egyptiens à l’étranger, mais la direction politique tient aussi à disposer d’outils lui permettant d’évacuer les citoyens pris dans des zones de troubles et de guerre et de les rapatrier sains et saufs. En outre, l’Egypte tient à profiter de l’expertise des cadres égyptiens travaillant à l’étranger.

Il est réjouissant de constater que la célébration du centenaire de la reprise de l’activité du ministère des Affaires étrangères coïncide avec l’annonce par le président Abdel-Fattah Al-Sissi de « la Nouvelle République », qui écrit une nouvelle page de l’histoire contemporaine de l’Egypte. La naissance de la Nouvelle République ne constitue pas uniquement un emplacement du centre du Caire vers la Nouvelle Capitale administrative, mais c’est aussi le résultat d’efforts acharnés fournis par le peuple égyptien qui a défendu son droit de vivre dans une patrie qui ne soit pas dominée par des groupes qui ont tenté de s’accaparer le pays.

Le peuple a également enduré beaucoup de difficultés dans l’objectif de remettre le pays en ordre, en s’appuyant sur la confiance en sa direction politique et ses bonnes intentions visant à construire l’Etat sur des fondements solides. Et voilà que la Nouvelle République cueille les fruits de ses efforts en cristallisant les éléments de la force globale de l’Etat vers la réalisation du développement durable et de la prospérité; à travers une longue marche nationale faite de réalisations, dont chaque Egyptien est fier, et ce, afin de réaliser un avenir meilleur que méritent les nouvelles générations et qui garantit une vie décente à tous les Egyptiens.

La stabilité bien ancrée et le développement global que connaît l’Egypte dans le cadre de la Nouvelle République se sont reflétés dans les démarches entreprises par sa politique étrangère, dont les orientations sont devenues claires et dignes de confiance grâce à ses actions dans une région bousculée par des troubles et des tempêtes politiques menaçant sa stabilité.

L’Egypte a réussi en huit années de travail acharné et de volonté sincère à retrouver son rôle régional traditionnel. Elle a réussi, grâce à sa direction politique, à passer de la phase de retrouver son équilibre à celle de retrouver son influence, c’est-à-dire devenir un élément influent dans son entourage régional et fixer des lignes rouges à travers lesquelles elle montre sa force de dissuasion qui sauvegarde l’équilibre de la région et l’empêche de glisser vers le précipice du chaos.

Alors que nous entamons le second centenaire de la diplomatie égyptienne, nous remarquons que la scène internationale est devenue extrêmement compliquée au niveau de ses interactions. Cette scène se caractérise par la croissance continue du rôle des acteurs non étatiques, ce qui produit des répercussions sur la structure des actions internationales loin de leurs concepts classiques. Et ce, en plus des influences directes sur les fronts intérieurs de l’Etat. Il m’importe ici de mentionner que les mutations successives qui se produisent sur la scène internationale étaient prises en considération par le décideur en Egypte. A travers sa diplomatie et ses différents organes nationaux, l’Egypte a réussi à mettre en place une série d’actions visant à dominer ces événements et à éviter les répercussions négatives, de façon à sauvegarder la sécurité nationale et l’identité de l’Etat égyptien.

Le ministère des Affaires étrangères a tenu à suivre de près les évolutions de la scène mondiale, à enrichir les capacités de ses diplomates et à renforcer le potentiel des jeunes diplomates à travers une formation continue pour garantir leur aptitude à faire face à tout changement avec efficacité et rapidité, en vue de concevoir ensuite des plans d’action.

Le ministère accorde un intérêt particulier à la sélection des jeunes cadres et à leur formation conformément à la vision du président Abdel-Fattah Al-Sissi dans le cadre de la Nouvelle République; en plus de l’adoption des méthodes de transition numérique de façon à rester en phase avec tout ce qui est moderne.

Enfin, je tiens à adresser un message d’estime et de reconnaissance à tous les diplomates égyptiens à l’occasion du centenaire de leur ministère. Ce sont les fidèles soldats de la patrie, qui ne quittent jamais son front et qui ont construit l’édifice de la diplomatie égyptienne, de génération en génération, pour en faire une institution grandiose qui se soucie des intérêts de la patrie et du peuple.

Je voudrais m’adresser aux vétérans de la diplomatie égyptienne pour leur dire: Vous avez le droit d’être fiers d’avoir représenté l’Egypte avec honneur et d’avoir été au service du pays et du peuple partout dans le monde, y compris dans les régions de crise. Vous avez tenu la promesse et respecté le serment que vous avez prononcé en rejoignant le ministère.

A mes collègues diplomates oeuvrant aujourd’hui en Egypte et à l’étranger, je dis : Je vois en vous l’espoir du pays et j’ai confiance en votre nationalisme, ainsi qu’en vos qualités qui vous ont permis de devenir membres de cette institution nationale authentique. Sachez que vos responsabilités sont grandes et je suis sûr que vous n’épargnez aucun effort pour les assumer au mieux. Lisez l’histoire de votre pays pour vous guider dans votre vie professionnelle et votre parcours, afin de rester pour toujours les protecteurs du pays à l’étranger.

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