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Guerre contre Daech  : Des raids peu décisifs

Amira Samir, Mardi, 17 février 2015

Six mois après le début de la guerre contre Daech, la participation des pays arabes dans cette guerre n'est toujours pas claire.

guerre contre Daech
Des F16 émiratis stationnés sur une base jordanienne. (Photo : AP)

Les Etats-Unis ont réussi à mobili­ser une partie des pays arabes pour participer à, ou soutenir, l’interven­tion militaire contre l’organisation de Daech (l’Etat islamique en Iraq et au Levant). Ils affirment que dix pays arabes se seraient engagés, éventuel­lement militairement, dans cette guerre contre le groupe terroriste, notamment les pays du Golfe, l’Egypte, l’Iraq, le Liban et la Jordanie. Cet appui des pays arabes inclut à leur accord « se joindre, le cas échéant, à une campagne mili­taire coordonnée ».

Suite à une rencontre du secrétaire d’Etat américain, John Kerry, avec le chef de la Ligue arabe, Nabil Al-Arabi, au Caire, en septembre dernier, les pays arabes se sont enga­gés à lutter contre le terrorisme de Daech « aux niveaux politique, sécu­ritaire et idéologique ». Mais parmi ces pays, peu ont précisé la nature de leur implication dans cette guerre. « La majorité des pays arabes se sont ralliés aux Etats-Unis dans la guerre déclarée à Daech. Vers fin août 2014, la participation des gouvernements iraqien, émirati et jordanien était, en fait, la plus claire », précise Imane Ragab, spécialiste des questions sécu­ritaires au Centre d’Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram.

L’Iraq est le pays arabe le plus tou­ché par cette guerre qui se déroule sur son sol et dans son espace aérien. La Syrie aussi, même si Bachar Al-Assad est une persona non grata dans la Coalition internationale: les exac­tions ultra-médiatisées commises par Daech ont éclipsé celles commises par le régime de Bachar contre ses opposants.

Ces deux théâtres de combats ne font aucune halte, néanmoins, les Etats-Unis et leurs alliés actuels au Moyen-Orient ont décidé de donner la priorité absolue aux opérations contre Daech. La Syrie a alors mis en garde Washington contre d’éven­tuelles frappes sur son territoire sans son accord. Dans une interview diffu­sée récemment par la BBC, Bachar Al-Assad a révélé que les Etats-Unis informent Damas de certaines de leurs opérations militaires contre Daech.

Depuis septembre dernier, outre l’Iraq, quatre pays arabes ont partici­pé aux frappes aériennes visant le groupe terroriste, à savoir l’Arabie saoudite, la Jordanie, Bahreïn et les Emirats arabes unis. Du jamais vu dans la région. « Aux yeux de la diplomatie américaine, l’Arabie saoudite est l’élément-clé de la coali­tion par son poids économique et sa portée religieuse pour les sunnites. Les autres pays du Golfe sont aussi importants pour les Américains », souligne Mohamad Ezz Al-Arab, spécialiste des affaires des pays arabes et du Golfe au CEPS.

Le 10 février dernier, les Emirats arabes unis ont repris leurs raids aériens contre Daech après plus d’un mois de suspension, alors que l’ar­mée de l’air jordanienne a intensifié ses raids contre les positions du groupe, après la publication d’une vidéo montrant le supplice d’un pilote jordanien, Moaz Al-Kassasba, capturé, puis brûlé vif par les terro­ristes de Daech. Lors d’un entretien avec le souverain jordanien, le roi du Bahreïn, Hamad bin Issa Al-Khalifa, dont le pays accueille la Ve flotte américaine, a promis « d’apporter toute l’aide souhaitée par la Jordanie pour combattre le terrorisme et proté­ger l’islam ».

D’autres autres pays arabes colla­borent de manière plus discrète sous forme d’assistance militaire, de sou­tien diplomatique, et de coopération en matière de renseignements pour intercepter les réseaux financiers et de recrutement du groupe djihadiste. Le Koweït, par exemple, accorde des facilités militaires aux Etats-Unis. Et le Qatar met à la disposition des Etats-Unis la base aérienne d’Udeid et accueille le Centcom, commande­ment militaire américain chargé du Moyen-Orient et de l’Asie centrale. Toutefois, l’attitude de Doha reste incertaine puisqu’il est soupçonné en Occident de financer des groupes islamistes radicaux. « Le Qatar et le Koweït n’ont pas procédé à des bom­bardements aériens, mais offrent des facilités militaires aux avions améri­cains qui effectuent des frappes. Les avions américains qui participent aux raids utilisent ses bases dans ces deux pays », explique Mohamad Ezz Al-Arab.

Alors que « pour Abou-Dhabi, c’est une expérience à ne pas rater », estime Imane Ragab. Selon elle, « la participation à la guerre contre Daech aide certains pays arabes, notamment les Emirats et la Jordanie, à renforcer leurs capacités de lutte anti-terroriste, et d’autres pays, notamment l’Arabie saoudite, à avoir un rôle régional de leadership et à consolider son influence en Iraq et en Syrie dans la période de l’après-guerre ».

Dans sa rencontre avec les ministres arabes de la Défense à Djeddah, John Kerry affirmait qu’il n’y aurait pas de troupes combattantes américaines au sol. Cependant, il semble que le déploiement de troupes sur le sol est une démarche imminente et que les pertes seront probablement impor­tantes du côté arabe. Mohamad Ezz Al-Arab prévoit des ripostes de Daech contre les pays arabes partici­pant à cette guerre et leurs citoyens.

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