Représentant 44% du corps électoral (24 millions de voix), l’électorat féminin a massivement participé à l’élection présidentielle des 26, 27 et 28 mai. Pour beaucoup d’observateurs, les voix des femmes ont joué un rôle décisif et ont donné un coup de pouce au taux de participation, grand enjeu du scrutin. Les chiffres officiels n’ont pas encore été dévoilés. Mais selon les estimations, la participation des femmes à la présidentielle dépasserait de loin celle du référendum sur la Constitution de 2014, où les femmes représentaient 55% de l’électorat, selon les chiffres publiés par le ministère du Développement administratif.
Selon Magued Sorour, directeur exécutif de la Fondation One World pour le développement de la société civile, l’une des ONG autorisées à superviser le scrutin, la présence de femmes, de toutes catégories sociales et de toutes tranches d’âge, dans les villes comme dans les villages, a été spectaculaire. « En dépit de toutes les menaces et la chaleur écrasante, la femme était sur le devant de la scène dès les premières heures du scrutin et a apporté une touche festive aux élections », explique-t-il. Et d’ajouter: « Bien que le clivage femme-homme soit très faible au sein de l’électorat et ne dépasse pas les 6%, le contraste était très clair entre les bureaux de vote réservés aux hommes qui étaient presque déserts et ceux réservés aux femmes qui étaient tout le temps remplis ».
Selon l’Organisme central de la mobilisation publique et des statistiques, les femmes représentent 48,9% de la population égyptienne (85,8 millions d’habitants). La plus large tranche d’électrices est constituée de femmes âgées de 21 à 30 ans. Elle compte plus de 7 millions d’électrices, tandis que la tranche la plus petite, âgée entre 18 et 20 ans, compte environ 2 millions d’électrices. Le nombre de femmes âgées entre 31 et 40 ans inscrites sur les listes électorales est évalué à 5,8 millions électrices, tandis que celles âgées de 41 à 50 ans sont 4 millions. Quant aux tranches d’âge des 51-60 ans et des plus de 60 ans, chacune compte environ 3 millions d’électrices.
En fait, la femme a activement participé à toutes les échéances électorales depuis le 25 janvier. Sa participation a été constamment en hausse. Celle-ci a atteint un point culminant lors du référendum sur la Constitution de 2014, où la femme est devenue un acteur principal en faveur du « Oui », comme explique Nermine Fouad, directrice de l’Association du développement de la femme.
Cette participation croissante de la femme durant les trois dernières années ne s’est pourtant pas traduite par une amélioration de la condition des femmes, qui sont toujours sous-représentées en politique. Toutefois, ce ne sont pas les motivations politiques qui ont fait bouger les femmes. « La recherche de la sécurité a été leur leitmotiv », explique Nermine Fouad. Et d’ajouter: « L’instabilité politique, économique et sociale pèse lourd sur la psychologie de la femme. Sa dynamique émane de son sentiment de la responsabilité envers sa famille ».
C’est ce qui explique pourquoi Abdel-Fattah Al-Sissi a été le candidat préféré des électrices, bien que son programme soit dépourvu de toute vision claire en ce qui a trait aux droits politiques de la femme. Pour elles, l’arrière-fond militaire est un grand avantage. « Néanmoins, le nouveau régime ne doit pas négliger ce que pourrait révéler dans l’avenir ce bloc électoral. Une fois la stabilité instaurée, ce bloc va chercher un rôle-clé sur la scène politique. Sinon, la participation des femmes va baisser », conclut Nermine.
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