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Propagande géante en faveur du « Oui »

Amira Samir, Lundi, 13 janvier 2014

Une importante campagne de propagande a lieu pour inciter les Egyptiens à approuver la Constitution. Dans les médias, seuls les partisans du « Oui » peuvent s’exprimer, alors que les partisans du « Non » ont du mal à transmettre leur message.

Propagande

Le pont du 6 Octobre est inondé de panneaux publicitaires affichant : « Oui à la Constitution ». Dans les deux sens de ce pont traversant la capitale d’est en ouest, environ 2 000 affiches sont accrochées aux lampadaires, pour convaincre les Egyptiens de voter « Oui ».

En parallèle, et en pleine rédaction de la Constitution, sur la place Tahrir, à la veille du second anniversaire des affrontements de Mohamad Mahmoud, une grande affiche surplombait l’un des immeubles : « Comme nous l’avons montré le 30 juin, montrez-leur notre peuple ! Montrez-leur notre nombre ! Participez à la Constitution … », signée par « des Egyptiens qui aiment leur pays ».

Une semaine plus tard, cette affiche a été remplacée par une autre, rouge vif, portant un message plus clair : « Participer à la Constitution veut dire Oui au 30 juin et au 25 janvier ». Et encore plus tard, la même affiche a été remplacée par une autre, plus précise, en vert et bleu. En grosses lettres : « Oui à la Constitution », et bien entendu signée par : « des Egyptiens qui aiment leur pays ». Dans d’autres villes, comme Alexandrie, des affiches semblables sont signées par : des « jeunes qui veulent vivre ».

Mais qui sont ces « Egyptiens qui aiment leur pays » et ces « jeunes qui veulent vivre » ? Qui financent ces campagnes de propagande pour la nouvelle Constitution ? Le gouvernement affirme que ce sont des hommes d’affaires et des organisations de la société civile. Mais on peut aussi facilement observer de nombreuses affiches signées par d’anciens membres du Parti national démocrate, au pouvoir jusqu’à la révolution de janvier 2011.

« Nour communications » est la compagnie publicitaire chargée de la campagne pour le « Oui ». Celle-ci était autrefois chargée de la campagne d’Ahmad Chafiq, l’ex-candidat à la présidentielle. Cette campagne s’inscrit, en effet, dans le cadre d’une autre, plus importante, promouvant la « feuille de route » et envahissant les rues et les chaînes de télévision depuis le renversement de Mohamad Morsi, le 3 juillet dernier. L’idée est que le « Non » au scrutin ne soit pas une option.

Une guerre contre le non-sévit sur les chaînes de télévision privées et publiques. Cette campagne est menée par les présentateurs des programmes et leurs invités. « 96 % des invités des chaînes télévisées parlent du Oui à la Constitution. La majorité absolue des médias ne permet pas aux opposants de s’exprimer. Cela sème le doute sur la Constitution et la période transitoire », estime Mohamad Kamal, vice-directeur du bureau médiatique du mouvement 6 Avril.

Guerre des fatwas

Même les fatwas (avis de la religion) ont été employées à cet égard. Les cheikhs du ministère des Waqfs ainsi que plusieurs cheikhs azharites affirment dans leurs prêches qu’il faut participer au scrutin et voter « Oui », et que le « Non » ou le boycott sont « illégitimes ».

Le parti salafiste Al-Nour, qui soutient la feuille de route, a organisé une campagne dans les mosquées de provinces, pour inciter à voter « Oui », alors que des cheikhs salafistes, qui appellent au « boycott », ont été interdits de monter aux minbars des mosquées. « Celui qui essaye de promouvoir le Non ou appelle au boycott du référendum est arrêté et humilié par la police. Certains membres du mouvement 6 Avril et du parti L’Egypte forte ont été arrêtés alors qu’ils distribuaient des tracts pour le Non. En parallèle d’une campagne de diffamation menée contre les partisans du Non », affirme Kamal.

Dans le camp du « Non », figurent une partie de la mouvance du 25 janvier, le mouvement 6 Avril, une grande partie de la gauche qui, contrairement aux Frères qui ont appelé au boycott, ont préféré mener une campagne contre le projet de la Constitution. Mais aucune campagne hostile au nouveau texte ne trouve sa place dans les médias.

Pour Yasser Abdel-Aziz, expert en communication et média, « ceci est très normal. Les télés privées ont le droit d’adopter un seul point de vue. Mais celles appartenant à l’Etat ne possèdent pas le même droit », souligne-t-il. Pourtant, selon lui, « l’ampleur de la campagne du Oui reflète l’avis de la majorité du peuple égyptien, et donc la minorité, n’a pas sa place dans les médias ».

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