Quelque 200 bureaux de vote en Egypte recevront les électeurs qui, pour diverses raisons, se trouvent au moment du vote hors de leur circonscription d’origine. C’est l’amendement de l’article 32 de la loi sur l’exercice des droits politiques, promulgué par décret présidentiel une semaine avant le référendum, qui donne aujourd’hui une chance à ce bloc électoral non négligeable de voter. Leur nombre est estimé à environ 4 millions de personnes. Le nouveau texte autorise, « en cas de référendum, à l’électeur qui se trouve dans un gouvernorat autre que celui inscrit sur sa carte d’identité de voter dans des bureaux de vote particuliers dans le gouvernorat où il est présent ». La décision du gouvernement de ne pas considérer les 2 jours du scrutin comme fériés a rendu le déplacement de ces électeurs presque impossible, même si une partie aurait voulu éviter une amende de 500 L.E. en cas de non-vote, comme le stipule la loi.
Hazem Mounir, ancien directeur de l’unité des élections au Conseil national des droits de l’homme, a qualifié cette mesure de positive. « Avec les difficultés de déplacement et de voyages, la majorité de ces électeurs n’ont pas pu participer au référendum de la Constitution en 2012, à cause de l’exigence, sous Morsi, de voter dans la résidence électorale, ce qui n’était pas le cas lors du référendum de mars 2011 sous le Conseil militaire, lequel a enregistré la plus haute participation électorale dans l’histoire de l’Egypte ».
Par contre, pour un nombre d’analystes, cet amendement laisse la porte grand ouverte à de potentielles fraudes, puisqu’il rend possible le vote plus d’une fois dans différents bureaux. « Les craintes trouvent leur origine sous les régimes précédents, puisque le référendum se déroulait presque sans aucune règle. Mais les mesures prises aujourd’hui par le gouvernement pourraient les réduire considérablement », dit Mounir.
La Haute Commission électorale a aussi annoncé sur son site Internet que les « bureaux de vote particuliers seront liés par un réseau informatique clos, pour vérifier si le nom de l’électeur figure sur la liste électorale, et notamment s’il a déjà voté dans l’un de ces deux centaines de bureaux de vote », explique Mounir. L’autre mesure consiste à obliger l’électeur à plonger entièrement son doigt dans l’encre phosphorique. « L’aggravation de la peine de prison qui peut coûter au fraudeur trois ans derrière les barreaux pourrait avoir un effet dissuasif », estime-t-il encore.
Des mesures qui peinent à convaincre. Selon Amr Hachem Rabie, président de l’unité des élections au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, la crainte d’une manipulation du référendum persiste, puisque la base de données électronique des électeurs n’est pas généralisée aux autres bureaux de vote, rendant alors impossible la détection immédiate des voix doublées. Selon lui, « la seule solution pour éviter une fraude est de créer un mécanisme qui permet à ces bureaux particuliers d’informer, dans l’immédiat, les circonscriptions d’origine de ces électeurs ». Et d’ajouter : « L’encre reste alors la seule garantie. Mais avec un référendum qui se déroule sur 2 jours et une encre qui s’efface en 24 heures, l’éventualité que l’électeur pourrait aller le lendemain revoter dans sa circonscription d’origine existe ».
L’encre, fabriquée en Egypte et utilisée pour la première fois pour réduire, selon les déclarations officielles, le coût de l’encre importée qui vaut quatre fois plus, « ne rassure guère », conclut Rabie.
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