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Réfugiés de Syrie : submergé, le Liban craint l’asphyxie

Amira Samir, Lundi, 06 janvier 2014

Le pays du Cèdre accueillerait 1,3 million de réfugiés en provenance de Syrie, soit 30 % de sa population. Incapable de faire face à ce flux constant, le pays appelle à l'aide. Ses infrastructures ont atteint leurs limites.

Refug.
Le Liban accueille plus de 36 % de la totalité des réfugiés syriens dans la région. (Photo : AP)

Un rapport du Haut Commissariat des Nations- Unies pour les Réfugiés (HCR) estime qu’un habitant sur cinq au Liban est un réfugié syrien. « Ce petit pays accueille ainsi plus de 36 % de la totalité des réfugiés syriens dans la région », indique le HCR.

Depuis l’explosion de la crise syrienne en mars 2011, des milliers de réfugiés affluent au Liban. Trois ans après le début du conflit, le flux est toujours aussi important. D’après les chiffres fournis par le HCR, au mois de décembre dernier, le nombre de réfugiés syriens enregistrés au Liban a atteint plus de 842 000 personnes, auxquelles s’ajoutent plus de 52 000 Palestiniens ayant également fui la Syrie. S’y ajoutent les réfugiés non enregistrés. Selon le gouvernement libanais, le nombre total de réfugiés avoisine désormais le 1,3 million de personnes, soit près de 30 % de la population du Liban.

Une situation qui influe négativement sur la stabilité et l’économie du pays. « Avec un tel nombre de réfugiés, le Liban entre dans une phase critique. Cet afflux risque de plomber les recettes commerciales et touristiques du Liban et d’aggraver la pauvreté et le chômage. Il faut prendre en considération que le Liban est un petit pays, qui n’a pas les moyens d’accueillir un nombre aussi énorme de réfugiés », explique Gamal Abdel-Gawad, chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram.

Le secteur du tourisme, qui représentait une source importante de revenus, est impacté par la décision de nombreux pays de déconseiller les voyages au pays du Cèdre par crainte des effets de la guerre voisine.

Payés à bas prix, les réfugiés sont accusés de prendre le travail des Libanais. Des sentiments nationalistes et racistes se développent, surtout dans les quartiers pauvres où habitent des Libanais qui ne trouvent pas de travail et considèrent que les réfugiés entravent toute chance de reprise économique.

Certains Libanais appellent l’Etat à contrôler ce « problème » en plaçant les réfugiés dans des camps aux sorties limitées et en fermant les deux postes-frontières officiels, au nord et à l’est du Liban.

« Les Libanais ne comprendraient pas pourquoi l’on vient en aide aux Syriens, alors qu’eux-mêmes sont aussi démunis (…). Qu’on leur donne à manger et c’est tout ! », s’indigne Nathalie Hamoudi, responsable du programme éducation de l’Unicef au Liban.

Pourtant, le souhait des réfugiés syriens, dont les trois quarts sont des femmes et des enfants qui vivent des conditions humanitaires très difficiles, est de rentrer au pays. La majorité des réfugiés vit en effet dans des campements sauvages. Selon un rapport de l’Unicef, 72 % des réfugiés au Liban ont besoin d’une aide humanitaire continue et 30 % d’entre eux vivent dans des abris médiocres (tentes, garages, immeubles désaffectés, chantiers abandonnés). Dans un rapport publié à la fin du mois de novembre dernier, l’ONG Human Rights Watch tire la sonnette d’alarme sur le sort des réfugiées syriennes au Liban et affirme que certaines d’entre elles sont victimes d’agressions et de harcèlement sexuel.

Appel à l’aide

Pour gérer le flux de réfugiés, le président libanais, Michel Sleiman, a lancé à plusieurs reprises un appel à l’aide internationale pour soutenir ce « lourd fardeau » qui dépasse les capacités d’accueil de son pays, pauvre en ressources et surendetté. A la demande de l’Etat libanais, la Banque mondiale a entrepris une évaluation de la situation, en coopération avec des agences des Nations-Unies, l’Union européenne et le Fonds monétaire international. Les conclusions sont alarmantes.

A la fin de 2014, le nombre de réfugiés dépassera 1,6 million, soit 37 % de la population libanaise. L’Etat va devoir débourser des milliards de dollars pour répondre à la demande croissante de services publics (eau, électricité, nourriture, santé et éducation). Selon une estimation de la Banque mondiale, pour le Liban, la facture de la guerre en Syrie s’élèvera à 7,5 milliards de dollars fin 2014.

« Au Liban, nous sommes au niveau L3, c’est le degré d’urgence maximal. Cela signifie que le fossé entre les infrastructures existantes et les besoins des populations est le plus élevé qui soit. C’est le seul L3 dans le monde actuellement », explique Typhaine Gendron, responsable du bureau de l’Unicef à Zahlé, au Liban.

La Banque mondiale s’est engagée à créer un groupe international de soutien au Liban (ISG) pour aider le pays à gérer l’afflux massif de réfugiés. Cette initiative témoigne d’un nouveau modèle de coopération internationale face à une crise. Elle offre une aide au développement accompagnant des interventions humanitaires de court terme. Organisations humanitaires, ONG locales et internationales et centres officiels essayent, avec des moyens souvent réduits, d’aider ces réfugiés : une goutte d’eau dans l’océan.

« Le pays du Cèdre subit de plein fouet les retombées économiques et sociales de la crise syrienne. Le Liban est toujours la victime des conflits politiques qui sévissent dans la région », conclut Gamal Abdel-Gawad du CEPS d’Al- Ahram.

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