Al-Ahram Hebdo : Comment jugez-vous la tenue de la première édition du Forum économique du Canal de Suez ?
Philippe Garcia : Le forum est organisé par l’Autorité du Canal de Suez en partenariat avec l’Association du souvenir de Ferdinand de Lesseps et du Canal de Suez et le bureau de Business France. C’est une excellente initiative qui est adossée à la politique égyptienne de faire de l’Egypte une plateforme régionale de réexportation vers l’Afrique et le Moyen-Orient. Apparemment, le forum sera organisé chaque année et il est conçu pour devenir le Davos de l’Afrique. Nous sommes très honorés d’être le premier pays partenaire. Nous saisirons cette excellente occasion pour organiser des rencontres d’affaires au sein du forum, et nous avons prévu de recruter des entreprises françaises susceptibles d’investir dans la zone économique et pour nouer une coopération avec l’Autorité du Canal de Suez sur différents sujets.
— Quelle est l’importance de ce forum pour les investissements français en Egypte ?
— Pour nous, le forum vise à engager une véritable coopération avec l’Autorité du Canal de Suez et les partenaires égyptiens. Il va permettre aux entreprises françaises d’avoir un panorama actualisé de ce qui se passe dans la zone économique, de connaître les perspectives d’investissement à court, à moyen et à long terme et de faire découvrir aux investisseurs une région qui possède d’excellentes infrastructures, en particulier logistiques, qui permettent de transporter leurs marchandises vers les différents centres de consommation. Les entreprises pourront élargir leur intérêt pour l’Egypte et mesurer à quel point le marché égyptien est prometteur. Leur présence au forum leur permettra d’en savoir davantage sur les atouts de la zone économique pour éventuellement décider d’un investissement.
— Combien de compagnies participeront-elles au forum ?
— Nous avons commencé à faire la promotion du forum auprès des entreprises françaises. Nous souhaitons faire de l’événement le point de départ d’une véritable coopération économique, commerciale et logistique dans le Canal de Suez. Notre objectif est de faire venir une vingtaine de sociétés de France et probablement entre 20 et 30 filiales françaises déjà implantées en Egypte. Etant donné que le Forum est appelé à devenir le Davos de l’Afrique, nos partenaires de l’Autorité du Canal de Suez nous indiquent avoir invité déjà quelques pays africains comme le Kenya, Djibouti, le Tchad et autres.
— A qui vous adressez-vous ? De grands investisseurs, des PME ?
— Les entreprises françaises ciblées sont évidemment celles qui sont capables d’investir dans la zone économique mais nous souhaitons les faire venir aussi pour éveiller leur appétence pour le marché égyptien. Nous allons faire venir des entreprises sur la base des besoins exprimés par le Canal de Suez qui évolue perpétuellement et j’ai l’impression qu’avec l’évolution de la taille des bateaux, les besoins du canal ne sont plus des besoins de génie civil pour agrandir, approfondir ou élargir ses dimensions, mais la priorité est plutôt de fluidifier le trafic, l’optimiser, le rationaliser.
— Dans quel domaine le côté français entend-il investir dans la zone économique ?
— Nous avons établi un dialogue avec l’Autorité du Canal de Suez, qui porte sur les technologies que la France pourrait apporter à l’Autorité avec des partenaires égyptiens pour rationaliser, digitaliser, moderniser et fluidifier les procédures. Au forum, nous organiserons des rencontres d’affaires entre les entreprises françaises et les décideurs de l’Autorité du Canal de Suez dans des secteurs comme la digitalisation et la connexion digitale entre les ports et le canal, entre l’Organisme de gestion du Canal de Suez et le trafic. Nous travaillerons aussi sur la sûreté et la sécurité du trafic, ainsi que sur l’amélioration de la logistique. Et il y a un autre sujet sur lequel nous aimerions travailler avec l’Autorité du Canal de Suez qui est celui de l’environnement. 19 000 bateaux passent par le Canal de Suez chaque année, produisant une empreinte carbone assez élevée. Nous avons une dizaine d’entreprises en France dans le domaine de l’environnement pour promouvoir les solutions de dépollution et la transition énergétique du transport maritime. Si la France se positionne dès aujourd’hui sur un sujet qui va devenir prioritaire pour le canal, on peut devenir le grand partenaire de l’Autorité du Canal de Suez pour les aspects environnementaux.
— Y a-t-il des sujets concrets établis entre la France et la zone du Canal de Suez ?
— Il y a un sujet sur lequel nous nous sommes déjà positionnés, c’est celui du développement de l’aquaculture. En France, nous avons une importante production aquacole. Il y a donc une production que nous pouvons développer le long du canal, et il y a aussi une volonté du côté égyptien d’utiliser la zone spéciale pour développer une filière ferroviaire. Si cela se confirme, nous serions dans les premiers rangs des partenaires de l’Egypte et nous pourrions même présenter cette filière ferroviaire lors du forum économique. Tout ce que nous faisons c’est sur la base d’une écoute attentive des demandes et des besoins égyptiens. Nous ne sommes pas là pour imposer nos idées. Nous sommes là dans une logique de coopération.
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