Mercredi, 18 septembre 2024
Dossier > Dossier >

Ayman Gabr : Port-Saïd possède 10 % du patrimoine historique de l’Egypte

Hanaa Al-Mekkawi, Mardi, 01 juin 2021

Ayman Gabr, président de la société historique de Port-Saïd, affirme que le patrimoine et la culture sont les deux fondements du projet de développement de la ville.

Ayman Gabr

Al-Ahram Hebdo : En quoi le patrimoine est-il lié au développement du gouver­norat de Port-Saïd ?

Ayman Gabr : Tous les pays qui possèdent un patrimoine architectural considèrent celui-ci comme une composante culturelle, artistique et historique, et un aspect important du tourisme. Ces bâtiments sont censés accueillir les touristes qui viennent spécialement pour admirer l’art architectural et en apprendre davantage sur l’histoire et sur les personnages qui ont occupé un jour ces bâtiments. Il faut transformer ces bâtiments en hôtels. Il faut aussi prendre soin des sites uniques, telle la rue Al-Mina qui abrite plusieurs anciennes propriétés et une passerelle qui donne sur le canal. Nous avons lancé l’idée d’un projet de développement de cet endroit pour qu’il devienne un modèle et un trésor architectural unique. Nous avons mis en place une vision de la planification et du budget requis, mais celle-ci n’a pas encore été approu­vée par le gouvernorat. En plus des bâtiments résidentiels, des églises et des mosquées, nous avons des théâtres qui étaient autrefois un modèle en miniature de l’Opéra. Ils ont été tous négligés pendant plus de 40 ans. Casa Italia, est l’un de ces bâtiments négligés. Connu mainte­nant sous le nom de la Bibliothèque américaine, ce bâtiment comprend une immense et unique muraille en marbre qui avait été faite pour accueillir le leader Mussolini. Cependant, c’est avec beaucoup d’espoir que ce dossier sera pro­chainement pris en charge, en particulier avec l’intérêt récent manifesté par l’Etat pour les musées et la parade momies qui a ébloui le monde entier. C’est pourquoi nous avons créé la société historique de Port-Saïd dans le but de sensibiliser les habitants de la ville, en particu­lier les jeunes, à notre patrimoine et à l’impor­tance de le préserver. Nous espérons avoir un plan général pour le développement de la ville, et que ce plan soit constant et ne change pas à mesure que les responsables changent. Nous demandons également que l’Organisme national de l’harmonie architecturale, qui suit le minis­tère de la Culture et qui possède des ingénieurs, des techniciens et des experts, soit la seule direc­tion responsable de rénover ces bâtiments et personne d’autre, pour éviter toute déformation ou pollution visuelle. Ainsi, on peut relancer le tourisme, ce qui relancera l’économie et mènera au développement globale de la ville.

— Qu’est-ce qui rend le patrimoine de Port-Saïd si spécial ?

Port-Saïd possède 10 % du patrimoine historique de l’Egypte

— La présence du Canal de Suez et son importance pour la navigation mondiale a donné un aspect particulier à Port-Saïd et a donné envie à de nombreux pays de laisser une marque dans la ville à travers des oeuvres architecturales et artistiques. Par exemple, l’in­génieur Gustave Eiffel, qui a construit la Tour Eiffel, y a construit 2 bâtiments. Et de nom­breux architectes étrangers ont érigé à Port-Saïd des bâtiments qui sont des copies de leur travail ailleurs. Alors, la ville a un style euro­péen. Ses quartiers et ses rues sont disposées d’une manière très spéciale, avec des balcons en bois. Le Phare de Port-Saïd est le premier bâtiment au monde construit avec du béton armé. La ville compte un certain nombre de jardins rares, comme le jardin Feryal ainsi qu’un grand nombre d’églises grecques, armé­niennes, latines et maronites, ayant des concep­tions différentes.

— Quelle est l’importance de ce patri­moine ? Et comment le préserver ?

— Port-Saïd est la troisième ville de la République en termes de patrimoine architectu­ral après Le Caire et Alexandrie. La ville pos­sède un trésor architectural qui remonte à la période allant de la fin du XIXe siècle jusqu’aux années 1950. Il y a en Egypte 7 000 bâtiments classés comme patrimoine, dont 700 à Port-Saïd, ce qui signifie que la ville compte 10 % des bâtiments patrimoniaux d’Egypte. Avec la création d’une zone franche à Port-Saïd au milieu des années 1970, la ville a connu une nouvelle expérience économique, et ses caracté­ristiques ont changé. La démographie de la ville a changé et la mafia des constructions a réussi à démolir un grand nombre de bâtiments. Cependant, en 2006 puis en 2008, de nouvelles lois ont été adoptées pour réglementer la démo­lition des bâtiments et préserver la richesse immobilière. Bien que ces lois aient contribué à réduire les démolitions, elles ne les ont pas totalement empêchées, et il y a beaucoup de violations de la part des propriétaires eux-mêmes ou des entrepreneurs qui ne s’intéres­sent qu’aux avantages financiers.

— Port-Saïd a été choisie comme capitale culturelle de l’Egypte cette année. Quel sera l’impact de cette décision sur le gouverno­rat ?

— C’est un honneur que Port-Saïd soit la capitale culturelle de l’Egypte. Il faut en profi­ter pour éliminer les obstacles qui entravent la prospérité culturelle. Il faut des projets qui visent à établir une culture durable comme c’était le cas autrefois. Si la ville aujourd’hui est un modèle numérique réussi, alors nous devons créer des logiciels qui transmettent aux gens les événements importants et les services culturels. Il faut former des équipes théâtrales dans les écoles. J’espère aussi faire revivre le rôle des centres de jeunesse et des centres culturels. Nous avons établi un centre culturel à Port-Saïd il y a 15 ans avec un coût de 250 millions de L.E. Ce centre doit accueillir les jeunes et les enfants et leurs présenter des acti­vités culturelles, afin de découvrir celles et ceux qui possèdent des talents et les soutenir. De plus, le nombre de cinémas doit augmenter, puisqu’on n’a que 2 pour une population de 850 000 habitants, alors qu’on en avait 25 000 dans les années 1950 et la population à l’époque n’était que de 200 000 habitants. Le fait que Port-Saïd soit la capitale de la culture en Egypte permettra aussi à la ville d’achever la reconstruction du Musée national de Port-Saïd qui expose des chefs-d’oeuvre pharao­niques, coptes et islamiques. Ce musée, qui a un emplacement remarquable sur le canal, avait été démoli il y a une trentaine d’années en raison de failles dans sa construction. Je suis optimiste et je pense que nous aurons une année prospère au niveau de la culture, parce que l’Etat accorde un grand intérêt à tous ces projets.

Lien court:

 

En Kiosque
Abonnez-vous
Journal papier / édition numérique