Une quinzaine de dirigeants africains, plusieurs dirigeants européens et de la région du Golfe, ainsi qu’une dizaine de responsables d’organisations internationales ont été invités par la France, les 17 et 18 mai, à assister à deux conférences, la première pour discuter des moyens de relancer les économies africaines ralenties par la pandémie et la seconde traitant de la réintégration du Soudan dans les circuits de financement internationaux après trois décennies d’isolement. Outre ces deux événements, l’agenda de la visite du président était très chargé en France: Sommet Macron-Sissi à l’Elysée, ainsi que des rencontres avec des dirigeants africains, des responsables et des chefs d’entreprises françaises en marge de la visite. En fait, il s’agit de la sixième visite du président Sissi en France depuis sa prise de fonction en 2014. Elle intervient en pleine phase de «
partenariat stratégique » qui se renforce entre les deux pays d’un jour à l’autre. Le Caire et Paris ont une convergence de vues à l’égard des questions relatives au développement, à la reprise économique, à la stabilité et à la sécurité en Afrique et dans la région du Moyen-Orient. Selon beaucoup d’experts, la visite du président Sissi à Paris pour participer au Sommet de financement des économies africaines ouvre de nouveaux horizons de coopération entre l’Egypte et la France, d’une part, et entre le continent africain et la France, d’autre part. Puisqu’elle intervient après l’entrée en vigueur de l’accord de la zone de libre-échange continentale africaine, le plus grand accord signé sur le plan mondial depuis la fondation de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 1995. Selon Bassam Rady, porte-parole de la présidence, «
l’Egypte joue un rôle vital aux niveaux régional et international dans le soutien de la phase de transition au Soudan, et occupe une position spéciale en Afrique, ce qui lui permet de renforcer les initiatives internationales visant à soutenir les pays africains ».
Convergence de vues
Avant le début de la conférence, les deux présidents se sont vus en tête-à-tête au Palais de l’Elysée. De nombreux dossiers régionaux et internationaux d’intérêt commun ont été discutés, dont notamment la cause palestinienne et l’escalade de la situation actuelle dans les territoires palestiniens. Le président a exprimé la ferme position de l’Egypte à cet égard pour mettre fin aux actes de violence, le plus tôt possible, et parvenir à une solution juste et globale garantissant les droits du peuple palestinien, dans le but d’établir son Etat indépendant conformément aux références internationales. De son côté, le président français a salué le « rôle absolument clé » de la médiation égyptienne afin de « restaurer la confiance à court terme » entre les différents acteurs du conflit. Selon Bassam Rady, les deux pays ont examiné les moyens de renforcer les cadres de la coopération bilatérale à différents niveaux, notamment économique et commercial, pour augmenter le volume des investissements français en Egypte, d’autant plus que la France est considérée comme l’un des partenaires les plus importants de l’Egypte sur le continent européen (voir page 5). Selon l’Agence centrale pour la mobilisation publique et les statistiques (CAPMAS), les investissements français en Egypte ont augmenté de 17,9% en 2020, alors que le volume des échanges commerciaux entre les deux pays a atteint 2,4 milliards de dollars au cours de cette même année. La France se classait au 12e rang de la liste des partenaires commerciaux de l’Egypte en 2019. Quant à la coopération militaire entre les deux pays, elle est stratégique et diversifiée (voir page 3). A son arrivée, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a accueilli à son lieu de résidence à Paris le PDG de Dassault Aviation, fabricant des avions militaires Rafale, M. Eric Trappier. Au cours de cette rencontre, le président Sissi a exprimé la fierté de l’Egypte quant à la coopération étendue et fructueuse avec la société Dassault. L’Egypte vient de signer avec la France un contrat de fourniture de 30 avions Rafale. « Ce contrat illustre le caractère stratégique du partenariat entre la France et l’Egypte, alors que nos deux pays sont engagés résolument dans la lutte contre le terrorisme et oeuvrent à la stabilité dans leur environnement régional », avait salué dans un communiqué le ministère français des Armées.
Soutenir la transition au Soudan
La deuxième étape de la visite du président Sissi à Paris était au grand palais éphémère construit sur le Champ-de-Mars où se tenait la Conférence internationale d’appui à la transition soudanaise. L’enjeu? Comment alléger les dettes extérieures du Soudan, pays riche en ressources pétrolières et minières, qui sont évaluées à 60 milliards de dollars? « La France est fière d’être la porte d’entrée du Soudan vers la communauté internationale », a déclaré le président Macron avant d’annoncer « l’annulation de toutes les dettes du Soudan envers son pays, estimées à 5 milliards de dollars » (voir page 4). « Nous soutenons l’annulation de la dette soudanaise envers la France, qui est l’une des plus importantes dettes au Club de Paris, estimées à 5 milliards de dollars », a ajouté Macron. Le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, a annoncé pour sa part que Paris allait prêter 1,5 milliard de dollars au Soudan, sous la forme d’un prêt-relais, pour lui permettre de couvrir ses arriérés vis-à-vis du Fonds monétaire international. Comment l’Egypte peut-elle aider le Soudan? « La sécurité et la stabilité du Soudan sont une partie intégrante de celles de l’Egypte et de la région », a déclaré le président Sissi dans son allocution prononcée lors de la conférence. Et d’ajouter: « L’Egypte s’est engagée à déployer tous les efforts possibles dans le but de soutenir les mesures prises par le gouvernement soudanais visant à parvenir à la stabilité économique ». S’exprimant sur la manière de soutenir la transition du Soudan, le président égyptien a appelé les parties soudanaises à déployer des efforts pour ramener la paix et la stabilité sur les terres du Soudan, ceci dans le cadre d’un consensus national global.
Coopération franco-africaine
Dernière étape de la visite du président: le Sommet de financement des économies africaines. Il vise à établir une nouvelle phase de partenariat économique franco-africain et à apporter un grand soutien aux pays africains touchés par la pandémie du Covid-19. Le 27 avril dernier, Emmanuel Macron avait appelé à « un New Deal » pour mettre en place un paquet de soutiens financiers massifs à l’Afrique afin de permettre au continent de se remettre du recul de 2,1% de son PIB et de sa première récession depuis 25 ans (voir page 5). La croissance devrait redevenir positive en 2022 mais à un rythme inférieur à celui des pays plus développés.
Au cours de ce sommet, le président Sissi a mis l’accent sur les questions qui préoccupent les pays du continent et réclamé un renforcement des efforts internationaux pour faciliter leur intégration dans l’économie mondiale, en facilitant le transfert des technologies et en augmentant le volume des investissements étrangers vers les pays africains .
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