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Le passage vers la nouvelle normalité

Aliaa Al-Korachi, Lundi, 04 mai 2020

Malgré l’augmentation du nombre de contaminations au coronavirus et dans l’attente d’un traitement ou d’un vaccin, l’Egypte, comme le monde entier, s’apprête à reprendre le chemin d’une certaine normalité. Une normalité dont les contours précis sont en train d’être déterminés.

Le passage

« Selon les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le monde entier va cohabiter avec le coronavirus dans la période à venir… Le comportement des gens doit être modifié durant cette phase transitoire, jusqu’à ce qu’un traitement ou un vaccin soit trouvé ». C’est ce qu’a déclaré, dimanche 3 mai, Hala Zayed, ministre de la Santé. La ministre a attribué l’augmentation du nombre de cas de coronavirus aux « comportements des gens en dehors des heures de l’interdiction de circuler », en particulier au cours des deux semaines qui ont précédé le mois du Ramadan. Le nombre de contaminations au coronavirus en Egypte a connu une augmentation relative depuis vendredi 31 avril, lorsque le bilan le plus élevé d’une journée a été signalé, avec 358 nouveaux cas positifs. L’Egypte a atteint la barre des 1000 cas le 4 avril et a dépassé la barre des 6000 cas le 2 mai. Selon le bilan publié dimanche 3 mai par le ministère de la Santé, l’Egypte a enregistré 272 nouveaux cas de Covid-19 et 14 décès, portant le nombre total de cas confirmés à 6467 et celui des décès à 429. Les résultats des tests de 1970 des cas confirmés sont redevenus négatifs, et 1562 d’entre eux ont pu sortir des hôpitaux consacrés à la quarantaine après leur guérison complète. Selon Hassan Hosni, chef du comité scientifique anti-coronavirus, dépendant du ministère de la Santé, « la stabilité des taux d’infection et l’aplatissement de la courbe épidémiologique seront liés, dans la période à venir, aux respects des mesures de prévention par les citoyens ». La situation en Egypte « est toujours sûre tant que les chiffres de la semaine ne sont pas le double de ceux de la semaine précédente », a assuré Hala Zayed. Cela dit, l’augmentation était prévue. « Elle est le résultat de la congestion dans les rues, en particulier dans les deux semaines qui ont précédé le mois du Ramadan », ajoute-elle. La preuve: Google Maps a signalé que la fréquentation des lieux du commerce qui a chuté de 40% au début de la crise a baissé seulement de 11% au cours de deux semaines avant Ramadan. Et selon Amjad Al-Haddad, chef du département des allergies et de l’immunologie au sein de l’Organisme des sérums et des vaccins, le terme « coexister avec le coronavirus » ne signifie ni que la crise est terminée, ni la levée des mesures de restrictions.

Plan de cohabitation

5 mois après le déclenchement de cette crise sanitaire sans précédent, le monde se trouve aujourd’hui face à une équation difficile à réaliser : lutter contre la pandémie sans pour autant entraîner de dommages irréversibles à l’économie. « Nous avons encore un long chemin à parcourir… Ce virus sera avec nous pendant longtemps. Il doit y avoir une nouvelle normalité », a averti Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS. En Europe, des pays comme l’Espagne, la France et l’Allemagne ont déjà programmé une sortie graduelle du confinement. En Egypte, le premier ministre, Moustapha Madbouli, a déclaré que le gouvernement souhaitait que la période d’après la fête de l’Aïd Al-Fitr soit une occasion pour le retour progressif à la vie normale. « Ce retour à la vie normale », comme l’a précisé le Conseil des ministres dans un communiqué sera tributaire du respect des mesures préventives par la population et un recensement quotidien est effectué pour les cas de contamination et de décès tout en surveillant constamment l’efficacité de ces interventions et la réaction de la population. Madbouli a signalé que les membres du groupe médical du Comité suprême pour la gestion de crise du coronavirus (les ministres de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, de la Santé et de la Population et le conseiller du président de la République pour les affaires de santé et de prévention) ont préparé un ensemble de mesures de prévention qui doivent être suivies par tous, gouvernement, citoyen et secteur privé.

Pour sa part, la ministre de la Santé, Hala Zayed, a dévoilé cette semaine « les traits principaux de la première phase du plan de coexistence ». Celui-ci consiste à assouplir les restrictions et rouvrir progressivement l’économie tout en respectant toutes les précautions nécessaires. Selon Hala Zayed, « toutes les mesures préventives anti-coronavirus seront appliquées méticuleusement dans tous les établissements et la situation épidémiologique sera réévaluée tous les quatorze jours pour réagir en conséquence ». Ce plan vise à réduire les services directs avec le public au profit des services électroniques et à encourager le paiement électronique, tout en continuant à fermer les lieux qui représentent « un risque élevé » pour la transmission. Le plan comprend des règles générales et des procédures contraignantes en cas de réouverture des installations, tels la mesure obligatoire de la température des visiteurs de l’installation et consacrer une chambre d’isolement pour recevoir tout membre de l’établissement présentant des symptômes de la maladie pendant le travail.

Réouverture progressive

Dans le cadre de ce plan, certains services gouvernementaux, suspendus aux cours des dernières semaines pour endiguer le virus, ont ouvert cette semaine leurs portes au public. Les tribunaux ont repris leurs travaux, dimanche 3 mai, après une suspension depuis la mi-mars. Le chef de la Cour d’appel du Caire a décidé de reprendre le travail dans les tribunaux pour « faire respecter les droits de l’homme » des personnes en détention provisoire dans de nombreuses affaires suspendues.

Selon le rapport, plus de 8000 affaires pénales ont été reportées en raison de la suspension des procédures judiciaires. Les tribunaux pénaux, quant à eux, fonctionneront 2 jours par semaine, au lieu de 6. Les cours de cassation pour délits reprennent leurs audiences, 60000 recours ayant été suspendus depuis la mi-mars. En outre, le ministre égyptien de la Justice, Omar Marwan, a ordonné de porter des masques et de maintenir une distance entre les employés et le public dans les tribunaux. D’un autre côté, les services de la circulation sont opérationnels depuis dimanche 3 mai pour délivrer des permis et des licences à tous genres de véhicules. Le ministère de l’Intérieur a déclaré la nécessité de porter des masques comme « condition préalable » pour fréquenter les services de la circulation. Sur un autre volet, le premier ministre a adopté, dimanche 3 mai, certaines réglementations pour stimuler le tourisme intérieur, dans le cadre du plan de coexistence avec le coronavirus conformément aux directives de l’OMS. Les hôtels pourront ouvrir leurs portes à de nouveaux clients et seront autorisés à offrir à nouveau des services à condition qu’ils fonctionnent à un plafond de 25% jusqu’au 1er juin, a déclaré, dimanche, le ministre du Tourisme et des Antiquités, Khaled El-Enany. « Les hôtels devraient pouvoir accueillir des clients à 50% à partir de juin », a-t-il ajouté. Le ministre du Tourisme et des Antiquités a souligné également que la licence médicale accordée aux hôtels sera soumise à de nombreuses conditions préalables, notamment la fourniture d’une clinique et d’un médecin pour chaque hôtel, ainsi que la disponibilité de kits de protection individuelle et de matériel de désinfection.

Les hôtels ne seront cependant toujours pas autorisés à organiser des fêtes ou des mariages, ni aucun type d’activités nocturne, a également déclaré El-Enany. Un étage entier dans chaque établissement touristique sera également consacré à l’isolement de tout cas de coronavirus confirmé ou suspecté. Chaque hôtel fonctionnera avec une capacité maximum de 50 % des employés. Les clients doivent être assis à des tables à manger à une distance d’au moins 2m entre eux, avec 1m entre chaque personne à la même table. Les tables familiales ne doivent pas dépasser six chaises et les ustensiles de cuisine à usage unique doivent être utilisés autant que possible.

Renforcer la capacité hospitalière

Parallèlement à ces mesures d’ouverture, le pays se prépare aussi à tous les scénarios. Afin de renforcer la capacité hospitalière, l’Egypte vient de lancer une stratégie à trois niveaux pour préparer 34 hôpitaux de maladies infectieuses à travers le pays pour servir d’isolement aux patients atteints de coronavirus. Les hôpitaux seront chargés d’assurer le contrôle, le diagnostic, la mise en quarantaine et le traitement, en plus d’effectuer des recherches scientifiques. Jusqu’à présent, seuls 17 des 30 hôpitaux d’isolement préparés pour la deuxième phase de la pandémie sont occupés par des malades du coronavirus. La ministre a aussi noté que le nouveau système concernant le transfert des patients qui n’ont que des formes bénignes de la maladie aux résidences universitaires est jugé très « efficace », puisqu’il a contribué à réduire la pression sur les hôpitaux.

Le président Abdel-Fattah Al Sissi, lors de sa rencontre vidéoconférence avec nombres de directeurs d’hôpitaux consacrés aux cas de Covid-19 placés en isolement, a enjoint au gouvernement de fournir tout le matériel et les équipements médicaux nécessaires aux hôpitaux accueillant les cas de Covid-19, et « de s’assurer d’y appliquer les protocoles thérapeutiques avancés ». Par ailleurs, Hala Zayed a annoncé la reprise cette semaine des campagnes de santé publique, dans le cadre de deux initiatives, « 100 millions de citoyens en bonne santé » et la « Santé de la femme ». « Tous les services de santé devraient reprendre. La lutte contre le Covid-19 ne doit pas se faire au détriment d’autres maladies », conclut-elle .

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