« Aidez-nous. Aidez les institutions de l’Etat à contrer la progression de ce virus… évitez les rassemblements et les contacts … suivez les conseils de prévention… agissez sérieusement, correctement et avec responsabilité dans les deux prochaines semaines pour que le pays puisse sortir de cette crise sans précédent dans l’histoire contemporaine ». Tel était le message adressé aux Egyptiens par le président Abdel-Fattah Al-Sissi, lors de son discours prononcé le 22 mars, à l’occasion de la Journée de la femme égyptienne, concernant l’attitude à adopter face à la pandémie de coronavirus. «
Nous cherchons à surmonter cette crise avec le moindre coût. Il ne s’agit pas uniquement d’un coût économique, c’est une question de vie et de santé des citoyens », a ajouté le président.
Le président Abdel-Fatah Al-Sissi a demandé mardi au gouvernement et aux appareils concernés par la lutte contre le coronavirus de « faire le nécessaire pour renforcer la prévention au niveau de l'Etat et du citoyen à travers une série de mesures supplémentaires à même de réaliser les plus grands niveaux de sécurité, et ce, sans affecter la vie quotidienne du citoyen égyptien ». « Je suis confiant que le peuple égyptien répondra à ces mesures de manière à préserver notre chère patrie. Qu'Allah préserve l'Egypte et les Egyptiens », a affirmé le président de la République.
« Restez chez vous » est un slogan qui gagne du terrain en Egypte et dans le monde entier afin de contenir la propagation du coronavirus et d’éviter un scénario à l’italienne. Jusqu’à lundi soir, le Covid-19 avait infecté plus de 330000 personnes dans 180 pays, dont près de 16000 sont mortes. Alors que la course mondiale pour trouver un vaccin au virus est lancée, l’Egypte est entrée dans une phase décisive dans la lutte contre le Covid-19. Les prochains jours seront déterminants pour endiguer l’épidémie et casser les chaînes de transmission. En l’absence d’un vaccin contre ce virus très contagieux, les experts sont unanimes: la distanciation sociale est la mesure la plus efficace. Il s’agit de modifier ses habitudes quotidiennes afin de réduire au minimum les contacts étroits avec les autres. Le taux de reproduction du Covid-19, le R0, se situe entre 2 et 3 comparé à celui de la grippe saisonnière qui est de l’ordre de 1,5. Selon le ministère de la Santé, l’Egypte compte 366 cas confirmés et 19 décès. 12 cas infectés par le virus ont été rétablis, portant ainsi le nombre des personnes guéries à 68.
« L’Etat a pu contrôler jusqu’à présent l’épidémie. Cependant, si les gens ne respectent pas le confinement et la distanciation sociale, la situation pourrait devenir très critique. Si le nombre de personnes contaminées dépasse la barre des 1000, il sera difficile de suivre l’origine de chaque cas », a averti Hala Zayed, ministre de la Santé, avant d’ajouter : « C’est le comportement des gens qui déterminera les scénarios à venir ».
Depuis le début de la crise, le ministère de la Santé a mis en place un plan de lutte global avec trois phases. La première consiste à freiner l’introduction du virus dans le pays. La seconde, dans laquelle nous sommes actuellement, vise à contenir la propagation du virus. Quant à la troisième phase, la plus dramatique, elle consiste à faire face à la vague épidémique. « L’objectif des mesures strictes et accélérées de prévention prises récemment par le gouvernement est d’éviter à tout prix que l’on passe à cette phase où le virus sera incontrôlable », a déclaré Khaled Mégahed, porte-parole du ministère de la Santé.
Pourquoi donc les 15 prochains jours seront-ils déterminants? Selon Dr Tareq Abdel-Qader, spécialiste des maladies infectieuses, « l’étude de l’évolution du virus dans les pays touchés a révélé que le risque d’explosion des chiffres est grand, notamment au cours de la troisième et la quatrième semaine de la propagation ».
« Ce n’est pas le virus qui circule, ce sont nous qui le faisons circuler. Le confinement permet de ralentir la contagion et d’éviter un engorgement des hôpitaux », explique pour sa part Dr Alaa Hachich, chef du département des maladies épidémiques à l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). « La situation aujourd’hui est nettement meilleure que lors de la transmission silencieuse du virus… Nous ne pouvons pas combattre un virus si on ne sait pas où il se trouve. On cherche à tout prix à empêcher et à freiner la formation de nouveaux foyers de contagion », explique Hachich (voir entretien page 4).
Renforcement des mesures de prévention
Pour limiter la propagation du virus, le gouvernement a renforcé les mesures proactives visant à limiter les interactions dans l’espace public. Ainsi, l’Egypte a procédé progressivement à la fermeture des écoles, des universités, des musées, des aéroports, clubs sportifs ainsi que des cafés, restaurants et lieux de divertissement de 19h à 06h jusqu’au 31 mars. (Voir chronologie). Dans une démarche inédite, les prières collectives dans les lieux de culte ont été également suspendues. Toutes les mosquées et églises sont fermées depuis 21 mars pour une durée de deux semaines. L’appel à la prière a été temporairement modifié. Le muezzin a remplacé la formule « Venez à la prière » par « Priez chez vous ». Les rassemblements religieux dans d’autres pays, dont l’Iran qui a connu l’une des pires épidémies, ont provoqué une contamination massive.
De même, les deux prochaines semaines seront mises à profit pour le nettoyage et la stérilisation des différents bâtiments et établissements. Une vaste opération de stérilisation et de désinfection a été lancée à travers le pays, allant des aéroports aux hôtels, en passant par les universités, le transport public, le parlement et les institutions gouvernementales. Les Forces armées ont procédé la semaine dernière, dans le cadre de leur plan de soutien aux institutions de l’Etat dans la lutte contre le coronavirus, à la désinfection et la stérilisation de plusieurs bâtiments vitaux comme le complexe de Tahrir et les stations de métro en utilisant « les outils de désinfection et de stérilisation les plus modernes ». En parallèle, des campagnes intensives sont effectuées par le ministère de l’Intérieur pour s’assurer de l’application des mesures de précaution mises en place
Les gouvernorats ont réussi, en coordination avec le ministère de l’Intérieur, à fermer 4000 centres éducatifs au niveau de la République. « 15 330 » est un numéro spécial mis en place pour recevoir 24h sur 24h les plaintes contre les centres de cours particuliers, les cafés et les magasins qui ne respectent pas les règles de confinement. Quant à l’approvisionnement en produits alimentaires, « il est garanti », comme l’a affirmé le président Sissi dans son discours : « Il n’y aura pas de pénurie alimentaire en Egypte. Les stocks des denrées alimentaires sont suffisants et ne sont jamais inférieurs à 3 mois », a assuré le président.
Initiatives économiques
Sur le plan économique, les jours à venir seront également décisifs. Le président Sissi a annoncé, lors de son allocation, une série de décisions économiques pour « atténuer les répercussions du coronavirus sur l’économie égyptienne et alléger le fardeau qui pèse sur le citoyen ». Parmi ces mesures, on peut citer l’injection de 20 milliards de L.E. en soutien à la Bourse, la baisse des prix du gaz naturel et de l’électricité pour le secteur industriel et l’attribution d’une enveloppe d’un milliard de L.E. aux exportateurs (voir pages 6-7-8). En ce qui concerne le secteur du tourisme, le plus touché par cette crise, le président a annoncé le lancement d’une initiative visant à soutenir les travailleurs dans ce secteur et la rénovation des hôtels résidences, des hôtels flottants et la flotte de transport touristique. Les cinq primes dues aux retraités (soit 80% de leurs salaires de base) seront incluses à leurs rémunérations, en plus de la prime annuelle de 14% à compter de la prochaine année fiscale. Le 14 mars, le président Sissi a ordonné de consacrer une somme de 100 milliards de L.E. au financement du plan national anti-coronavirus.
« Le programme de réforme économique nous a largement aidé à faire face aujourd’hui aux répercussions de la crise du coronavirus », a conclu le président .
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