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Syrte, une victoire capitale

Nada Al-Hagrassy, Mardi, 14 janvier 2020

Verrou stratégique entre l’est et l’ouest de la Libye, la ville de Syrte a été libérée par l’Armée Nationale Libyenne (ANL). Un tournant dans la bataille de Tripoli qui vise à libérer la capitale des milices terroristes.

Syrte, une victoire capitale
Les tribus libyennes sont mobilisées contre le spectre d'une intervention turque. (Photo : AFP)

« Syrte a été totalement libérée », a annoncé Ahmed Al-Mesmari, porte-parole de l’Armée Nationale Libyenne (ANL), lors d’une conférence de presse à Benghazi, le 7 janvier. La libération de Syrte, ville stratégique entre l’est et l’ouest de la Libye, est une victoire éclair et décisive, et constitue un point tournant dans l’opération du Volcan de la colère lancée par l’ANL en avril 2019, qui vise à libérer la capitale, Tripoli, des milices terroristes. Les forces de l’ANL ont pris le contrôle de cette ville stratégique de Syrte quasiment sans combat. Les affrontements semblent avoir été limités et sans avoir causé des pertes humaines. Les forces progouvernementales chargées de défendre la ville se sont retirées avec leurs équipements. « Ce fut une opération soudaine et rapide. Sa préparation a duré quelques mois et fut exécutée minutieusement », a déclaré Al-Mesmari.

Ville natale de l’ex-dirigeant Muammar Kadhafi, renversé et tué lors de la rébellion de 2011, Syrte a accueilli très favorablement l’arrivée des forces de Haftar. Le bataillon 604, une puissante unité locale, composé en majorité de combattants salafistes, jusque-là intégré dans la Force de protection de Syrte, progouvernementale, a rejoint soudainement le camp du maréchal Haftar.

Protéger les infrastructures militaires et pétrolières

La perte de Syrte représente un sérieux revers pour le Gouvernement d’union nationale (GNA), dont les forces contrôlaient la ville depuis 2016 quand elles en avaient chassé le groupe Etat islamique. Ce soudain revirement a joué en faveur de l’ANL qui, après avoir pris le contrôle de la ville, a immédiatement assuré la protection des champs pétroliers situés au sud de la ville, coupant ainsi la route aux milices pro-GNA à s’emparer de ces champs et en profiter pour financer leurs opérations. D’ailleurs, l’ANL a également pris le contrôle des infrastructures militaires de la ville convoitée par leurs rivaux, notamment l’aéroport de Gordabiya, alors que circulaient des rumeurs dans la ville selon lesquelles les forces turques voulaient en faire une base aérienne.

La position géographique de Syrte fait d’elle un atout stratégique. Située au beau milieu de l’autoroute est-ouest, qui traverse le pays horizontalement, elle a un débouché sur l’axe nord-sud qui relie le désert à la Méditerranée. A cela s’ajoute l’existence des infrastructures militaires comme l’aéroport de Gordabiya, la base militaire de Gafra, ainsi que nombre de ports maritimes joignant la Libye à l’étranger, surtout le sud de l’Europe. Egalement, Syrte est connue comme le berceau des plus fertiles champs pétroliers libyens à Barika et Ras Lanouf, qui la classent neuvième parmi les dix pays les plus riches en énergie d’hydrocarbures.

« Le timing de la reprise de la ville de Syrte, anticipant l’intervention promise par Ankara en soutien aux forces rivales, est très opportun », explique le politologue Ziad Aql, spécialiste de la Libye au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. Et d’ajouter : « La prise de Syrte constitue une frappe préventive et un coup dur contre le projet expansionniste islamo-turc et aux convoitises turques de contrôler les richesses pétrolières de la Libye. Elle constitue une étape majeure vers la libération de la capitale Tripoli située à 450 km de Syrte », ajoute Aql. En outre, la ville de Syrte est le portail sud de la ville de Misrata, fief des groupuscules terroristes progouvernementaux. D’ailleurs, « au-delà d’une réussite militaire, par la libération de la ville de Syrte, Haftar envoie un lourd message à tous les acteurs internationaux, y compris la Turquie : L’ANL est une force militaire et institutionnelle capable de fixer des objectifs et d'avoir le pouvoir de les réaliser », conclut le politologue Ziad Aql.

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