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Zéro zone à risques en 2020

Aliaa Al-Korachi, Mardi, 29 octobre 2019

Lancé en 2014, le plan national de réaménagement des zones informelles a réalisé de grands progrès sur le terrain. Deux millions de citoyens en tout profiteront de ce plan ambitieux d'ici 2030.

Zéro zone à risques en 2020
Al-Asmarat, un projet à grand succès.

Où en est le plan national de réaménagement des zones informelles ? Le plan avait été lancé en 2014 avec l’objectif d’éliminer tota­lement les zones informelles. Il com­porte trois volets, à savoir le réaména­gement des zones à risque, celui des zones non planifiées et enfin le réa­ménagement des marchés informels. Selon les chiffres publiés récemment par le Conseil des ministres, plus de 2 millions de citoyens ont profité jusqu’à présent de ce plan.

Les zones à risque sont celles qui mettent en danger la vie des habitants. C’est pourquoi elles constituent le premier volet du plan. 195 zones à risques, comprenant 105 672 loge­ments, ont été réaménagées. 31 mil­liards de livres égyptiennes ont été consacrées à cette première phase qui doit s’achever en 2020. « Le pro­gramme de réaménagement des zones à risques comprend au total 351 pro­jets. 60 % des travaux ont été ache­vés. Les 40 % restants, soit 165 pro­jets, seront achevés à la mi-2020 », dévoile à l’Hebdo Khaled Seddiq, directeur exécutif du Fonds de déve­loppement des zones informelles. Et d’ajouter : « On devait initialement achever les travaux de réhabilitation de toutes les zones à risques en 2019. Mais le rajout de 7 autres régions à la carte nationale des zones informelles nous a obligés à prolonger l’échéance d’une année supplémentaire ».

Le deuxième volet du plan national de réaménagement des zones infor­melles est le développement des zones non planifiées. Ce sont des zones dotées d’infrastructures, mais ne faisant pas partie du plan d’urbani­sation. Elles représentent 37,5 % du paysage urbain en Egypte. 22 mil­lions de personnes y vivent dans des conditions précaires

Selon le bilan dressé par le Conseil des ministres, 52 zones non plani­fiées, d’une superficie de 4 351 fed­dans et réparties sur 6 gouvernorats, ont été réaménagées. Le coût total du programme de réaménagement des zones non planifiées est estimé à 318 milliards de L.E. Les travaux de réa­ménagement de ces zones devraient prendre fin en 2030. Quant aux mar­chés informels (qui constituent le 3e volet du plan national), 23 seulement ont été réaménagés dans différents gouvernorats comme Al-Wadi Al-Guédid et la mer Rouge. En tout, l’Egypte compterait près de 1 105 marchés informels dans 25 gouverno­rats (voir page 5).

Selon Chérif Al-Gohari, urbaniste, le plan national de réaménagement des zones informelles a réalisé de réels progrès sur le terrain. Le fait que 31 milliards de livres (le plus gros budget jamais alloué par un gouver­nement depuis 2009) avaient été consacrées aux zones informelles à risques, indique qu’il existe une forte volonté politique d’en finir avec ce phénomène.

Créé en 2008, le Fonds de dévelop­pement urbain n’a commencé effecti­vement son travail qu’en 2014. Le fonds a commencé avec un budget de 870 millions de L.E. en 2015-2016. Ce budget a été doublé ensuite pour atteindre 1,5 milliard en 2016-2017. « Le budget 2018-2019, 15 milliards de L.E., est le plus important alloué au fonds », ajoute Seddiq.

Le droit à un logement adéquat

« Exode rurale, explosion démogra­phique et urbanisation mal gérée sont autant de facteurs qui ont contribué à l’expansion des zones informelles aussi bien au niveau vertical qu’hori­zontal en Egypte », estime Hassan Salama, sociologue. Et d’ajouter : « Les politiques de logement adoptées par les gouvernements successifs n’ont jamais permis de freiner la pro­gression des zones informelles, deve­nues au fil des années de véritables bombes à retardement ». Le tremble­ment de terre qui a frappé l’Egypte en octobre 1992, causant la mort de 560 personnes, a sonné pour la première fois l’alarme, attirant l’attention sur la fragilité des constructions dans les quartiers non réglementaires. C’est après l’effondrement d’un rocher dans la région d’Al-Doweiqa, qui a entraî­né la mort de 119 personnes, en sep­tembre 2008, qu’une carte nationale des zones à risques a été établie. La Constitution égyptienne de 2014 énonce, pour la première fois, dans l’article 78, « le droit des citoyens à un logement adéquat, sûr et salubre, d’une manière qui préserve la dignité humaine et réalise la justice sociale ». La Constitution a exigé également au gouvernement d’élaborer un « plan national pour résoudre le problème des zones informels en les dotant d’in­frastructures et d’installations, et en améliorant la qualité de vie et de la santé publique ».

Stratégies de relogement

Al-Asmarat (3 phases), Rawdet Al-Sayéda, Ahalina I et II et Gheit Al-Enab, Al-Nouras Al-Guédida et Bachayer Al-Kheir, les projets de relogement des habitants des zones à risques se multiplient (voir infogra­phie). « Plus de 60 projets sont en cours pour reloger des habitants des zones à risques dans différents gou­vernorats », souligne Seddiq. Port-Saïd a été déclaré en décembre 2018 « la première ville sans zones infor­melles » en Egypte.

« Il existe quatre catégories de zones informelles à risque : les loge­ments dangereux pour la vie des habi­tants ; inadéquats, insalubres et contre­venants », explique Seddiq, qui ajoute que « chaque zone a sa propre stratégie d’aménagement en fonction du degré de risque ».

« Parmi ces solutions figure le relo­gement des habitants dans les mêmes lieux ou dans des lieux alternatifs plus sûrs et plus proches de leurs vieilles maisons », affirme Seddiq, en don­nant l’exemple du projet d’Al-Asma­rat (1, 2 et 3), qui comprend 18 278 logements et qui a accueilli les rési­dents d’environ 15 zones informelles voisines. Par ailleurs, plusieurs autres mesures ont été prises dans le cadre du plan de réaménagement des zones informelles à risques : indemniser les habitants, éliminer les sources de dan­ger, construire de nouvelles résidences ou légaliser le statut des habitants des zones non planifiées.

Les défis de l’après-réaménagement

Assurer la durabilité des projets de réaménagement et empêcher la for­mation de nouvelles zones informelles reste l’un des grands enjeux du plan du gouvernement. Al-Gohari affirme qu’il est « nécessaire de mettre en place, à côté des projets de l’Etat, des programmes de construction de loge­ments sociaux qui associent les sec­teurs public et privé et offrent de facilités de payement afin de répondre au déficit de logements pour les ménages démunis ». Le gouverne­ment a déjà achevé 10 phases de logements sociaux dans tous les gou­vernorats du pays. Et il envisage d’atteindre vers la moitié de l’année 2020 un total de 800 000 apparte­ments.

Pourtant, l’enjeu principal n’est uniquement d’avoir des villes sans zones informelles et de reloger les habitants comme le souligne Soad Abdel-Réhim, directrice du Centre national pour les études sociales et criminelles, mais le plus important est de « préparer les habitants de ces régions à s’adapter à ce grand chan­gement dans leur vie ». Et de conclure : « Afin d’assurer une transi­tion réussie, le processus de sensibili­sation doit précéder le déménage­ment et pas le contraire. Sinon, on se retrouverait avec les mêmes pro­blèmes ».

Réaménagement des zones informelles Zones à risques
Source : Fonds de réaménagement des zones informelles

Les zones non planifiées réaménagées

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