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Gehad Abou Hashish : Dans le monde arabe, le taux de l’édition numériquene dépasse pas les 10 %

Dina Kabil, Mardi, 10 septembre 2019

L’éditeur jordanien Gehad Abou Hashish a représenté le côté arabe lors de la 9e Conférence internationale de l’édition numérique, tenue à Pékin le mois dernier, où il a souligné les défis auxquels l'édition est confrontée à l’heure actuelle.

Gehad Abou Hashish

Al-Ahram-Hebdo : Au Salon de Pékin, vous avez été un messager arabe important. Est-ce la pre­mière participation de la maison d’édition Fadaate et comment était votre contribution ?

Gehad Abou Hashish: Notre pre­mière participation au Salon de Pékin était en 2018, où nous avons signé un protocole de coopération avec la maison Intercontinental qui consiste au partenariat dans le cadre des droits internationaux des livres. En cette édition du salon, la maison d’édition Fadaate dont je suis le représentant a contribué à de nombreuses activités telles que le lancement du recueil de nouvelles édité par la maison du Peuple pour la littérature et la mai­son Fadaate. Cela consistait à ras­sembler dans le même livre 8 écri­vains chinois et 8 arabes, venant de Jordanie, d’Egypte, d’Iraq, de Syrie, de Tunisie, du Maroc, de Palestine et d’Oman.

— Comment avez-vous pu approcher le lecteur chinois, sur­tout avec votre catalogue arabe ?

— Nous avons, sur notre catalo­gue, certains livres traduits du chinois vers l’arabe, comme Le Miracle de Huawei et Les Hommes-robots de Chine, en plus de 4 romans des classiques de la littérature chinoise comme Les Rêves des palais rouges et La Romance des trois royaumes, entre autres oeuvres remarquables. Nous avons aussi des oeuvres arabes traduites en chinois comme le roman de l’Iraqienne Hadia Hussein, Les Femmes du seuil.

— Vous avez aussi participé au 9e Colloque de l’édition électro­nique organisé en marge du salon. Comment pourriez-vous juger la scène actuelle de l’e-édition arabe ?

— Le titre de mon papier présenté dans ce cadre est « L’édition numé­rique dans le monde arabe, le réel et les défis », j’ai dû contacter nombre d’éditeurs dans le monde arabe et dont les témoignages me sont d’une grande importance, comme l’Egyp­tien Ali Abdel-Moneim et le Jordanien Dr Ahmed Rahahla. Je m’y suis affronté à la situation négative de l’édition numérique aux pays arabes. Or, le taux de cette édition ne dépassait pas les 10% de l’édition en papier jusqu’en 2018, en sachant que les statistiques ne sont pas très pré­cises quant à l’intérêt porté à l’e-book. Il y a plusieurs points majeurs à relever: Les éditeurs arabes se limitent au transfert classique du livre en papier vers le numérique, ils ne possèdent pas les connaissances technologiques suffisantes pouvant aboutir à une conscience contempo­raine du progrès qui nous entoure, en plus du désintérêt de l’éditeur de savoir les types des lecteurs et d’ana­lyser leurs différentes tendances. Et cela, sans compter le niveau de l’en­seignement dans les différents pays arabes qui ne déploient aucun effort pour rejoindre la société de connais­sance développée sur l’échelle mon­diale.

— Pourtant, l’emploi de la tech­nologie, de l’Internet en particu­lier, est très développé parmi les Arabes, notamment la jeune géné­ration. Qu’est-ce qui empêche donc l’élan au niveau de l’édition numérique ?

— Les Arabes sont encore au seuil de l’édition électronique, malgré le progrès remarquable sur le plan de l’utilisation des appareils électro­niques, des smartphones en particu­lier. Les plateformes qui facilitent l’accès au contenu électronique ne traitent pas l’éditeur arabe au pied d’égalité avec l’éditeur occidental, et en plus, elles contribuent à augmen­ter ce fossé par la prolifération de contenus illicites, en accueillant sur leurs espaces des sites de vente en ligne qui offrent des livres piratés. C’est pourquoi l’Union des éditeurs arabes a sorti le décret numéro 129, le 16 juillet 2019, qui consiste à « considérer les grandes sociétés telles que Google, Amazon, YouTube, Apple et Microsoft et leurs alliés, des partenaires au crime du piratage et de la contrefaçon ».

— Dans le cadre de votre expé­rience en tant que maison d’édi­tion arabe qui souffre de la fai­blesse du marketing du livre en général et numérique en particu­lier, comment pourriez-vous profi­ter du partenariat avec le côté chinois ?

— Dans Fadaate, nous tentons de développer nos capacités électro­niques, et pour cela, nous venons de lancer Fadaate Media qui est concer­né par le marketing des livres et de leurs auteurs et d’aller en quête de projets électroniques sur le plan international et y trouver des espaces d’interaction. Quant au partenariat avec les Chinois, et d’après notre propre expérience de Fadaate-Intercontinental, je peux confirmer que la partie chinoise se distingue des autres pourvoyeurs de fonds parce qu’elle s’intéresse première­ment à créer un équilibre dans le domaine de l’édition, internationale­ment, et loin de la mainmise de cer­taines grandes boîtes sur le marché. Cela dit, le fonds offert par les Chinois ne tente pas d’imposer son point de vue, mais de maintenir de véritables partenariats mutuellement bénéfiques. Un partenariat qui ne s’attache pas uniquement aux gains matériels, mais surtout à la construc­tion des ponts culturels. Le plus important est que le côté chinois s’intéresse à diffuser la langue arabe et à fournir tout ce qui manque à la librairie arabe dans les domaines de la philosophie chinoise, l’architec­ture, l’art chinois, en plus des livres des légendes et des chevaliers.

— Comment pourrait-on, sur le plan arabe, consolider les rapports culturels avec la Chine et profiter de cet espace accueillant comme vous l’avez confirmé ?

— Il faut savoir que le côté chinois oeuvre à créer une relation véritable de partenariat et cherche à la réussir à tout prix, la preuve en est qu’il a commencé depuis quelques années à enseigner la langue arabe, et le nombre des universités qui l’ensei­gnent atteint aujourd’hui 170. En plus des projets culturels de partena­riat montés actuellement dans la tra­duction, le théâtre et d’autres formes artistiques. L’important est de préser­ver des relations de partenariat équi­tables qui dépassent les gains finan­ciers, en insistant sur le culturel qui renforce toute coopération possible.

*Gehad Abou Hashish est poète, écrivain et éditeur, fondateur de la maison d’édition jordanienne Fadaate qui sera présente au Caire prochainement.

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