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Chine-monde arabe, des liens toujours plus forts

Ahmad Kandil*, Mardi, 10 septembre 2019

Tenue du 4 au 9 septembre, la 4e exposition Chine-pays arabes marque une nouvelle étape des relations entre l’Empire du milieu et le monde arabe. Explications.

Chine-monde arabe, des liens toujours plus forts

« Recherchez le savoir même en Chine ». Un adage ancien qui montre que les Arabes ont toujours reconnu le développement et l’essor de la Chine. Au cours de ces trois dernières décennies, ils ont redécouvert ce pays. Alors que la 4e exposition Chine-pays arabes, qui s’est ouverte le 5 septembre à Yinchuan, est bien plus qu’une quête du savoir. Aujourd’hui, les Arabes et les Chinois estiment qu’ils ont l’occasion d’améliorer leur coopération économique et politique. Cet événement, placé sous le signe de la promotion des échanges économiques et commerciaux, et auquel participent près de 500 associations professionnelles et représentants d’entreprises chinois, arabes et autres, intervient au moment où le partenariat économique entre la Chine et les pays arabes connaît un vrai essor. Les quelque 20 pays arabes qui y sont représentés ont signé en tout 287 accords dans les domaines du commerce et de l’investissement d’une valeur totale de 26 milliards de dollars.

Des échanges en nette hausse

Les échanges commerciaux entre les pays arabes et la Chine sont passés de 37 milliards de dollars en 2004 à 244 milliards fin 2018. La Chine est ainsi devenue le deuxième partenaire commercial des pays arabes après l’Union européenne. Et les pays arabes sont ainsi devenus le septième partenaire commercial de la Chine.

L’année dernière, Pékin a importé des pays arabes l’équivalent de 140 milliards de dollars de biens, tandis que les importations arabes en provenance de la Chine ont atteint 104 milliards de dollars, les pays du Golfe représentant 66% de ces échanges commerciaux. La stratégie récente de ces pays qui consiste à « se réorienter vers l’Est » explique ce développement de leurs relations avec la Chine.

Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que les deux parties aspirent à porter à 600 milliards de dollars le volume de leurs échanges commerciaux, en particulier dans le cadre de l’Initiative chinoise « La Ceinture et la Route », dans laquelle les pays arabes occupent une place prépondérante grâce à leur emplacement stratégique à leur potentiel économique, et à leurs ressources naturelles et humaines.

Dans son discours à l’occasion de la 8e édition du Forum de coopération sino-arabe, qui a eu lieu le 10 juillet dernier à Beijing, le président chinois, Xi Jinping, a annoncé des prêts d’un montant de 20 milliards de dollars destinés à des projets de développement dans des pays arabes.

Par ailleurs, un rapport récent de l’Institution arabe pour la garantie des investissements et le crédit à l’exportation montre que la Chine a devancé les Etats-Unis pour devenir le plus grand investisseur dans les pays arabes avec 32% du total des investissements étrangers directs, soit 29,5 milliards de dollars, alors que les investissements américains dans la région ne représentent que 8%, soit 7 milliards de dollars.

Les investissements chinois sont concentrés au Soudan (15 milliards de dollars), aux Emirats arabes unis (9 milliards de dollars) et en Egypte (3 milliards de dollars). Les Chinois investissent dans des zones franches industrielles et dans des projets d’infrastructure, ce qui indique leur optimisme quant à l’avenir de leurs relations avec les pays arabes.

Selon le ministère chinois du Commerce, Pékin a signé des accords de coopération économique, commerciale et technologique avec 21 pays arabes, et des accords de protection des investissements avec 17 pays arabes, ainsi que des accords visant à éviter la double imposition avec 12 pays arabes.

De son côté, le monde arabe considère la Chine non seulement comme un partenaire en matière de commerce et d’investissement, mais également comme un modèle à suivre en matière de croissance économique et d’affranchissement de la pauvreté. Le modèle économique unique de la Chine (le capitalisme à la chinoise) intéresse les politiciens, les idéologues, les économistes et les hommes d’affaires arabes. Il offre des enseignements essentiels pour faire face à la mondialisation avec audace, créativité et confiance en soi.

Outre ses accomplissements économiques qui en ont fait la deuxième économie mondiale, les Arabes considèrent la Chine comme un partenaire politique et stratégique fiable. Contrairement à d’autres puissances mondiales, la Chine n’a ni un passé colonial ni une ambition de domination. C’est un pays qui s’est toujours rangé du côté des pays en voie de développement et qui coopère avec les pays arabes sur la base d’intérêts réciproques.

Des liens historiques

Historiquement, les pays arabes ont été les premiers à reconnaître la République populaire de Chine dès sa fondation en 1949, bien avant sa reconnaissance par les Nations-Unies.

Les relations sino-arabes ont connu un essor avec la Conférence de Bandung en juin 1955, à une époque d’extrême polarisation internationale. Les pays arabes ont également soutenu l’entrée de la Chine aux Nations-Unies au début des années 1970. Il va sans dire que le principe d’une seule Chine est l’un des piliers de la politique du monde arabe à l’égard de ce pays.

La création du Forum de coopération sino-arabe en 2004 a permis de placer ces relations dans un cadre institutionnel, de quoi permettre un suivi de leur développement. Dans le cadre de ce forum, quinze mécanismes de coopération ont été mis en place dans les domaines politique, économique, culturel et scientifique. La visite historique du président chinois, Xi Jinping, au siège de la Ligue arabe en janvier 2016 a permis d’espérer de belles perspectives pour l’avenir.

De leur côté, les Chinois, dans le cadre de leur « marche vers l’Ouest », cherchent à mettre à profit leurs relations avec les pays arabes, notamment pour sécuriser l’accès aux ressources énergétiques. Selon certaines estimations, la consommation pétrolière de la Chine en 2030 s’élèverait à 800 millions de tonnes par an, dont 75 % seront importés.

La Chine cherche aussi à combler le vide créé au Moyen-Orient par le désengagement des Etats-Unis, qui, eux, sont sur la voie de l’autosuffisance énergétique. Il s’agit donc pour la Chine de renforcer non seulement les liens économiques, mais aussi politiques avec les Arabes.

La politique chinoise envers les pays arabes est indissociable d’une stratégie plus large qui s’inscrit dans une ouverture à l’Afrique. Dans le cadre de ce que les Chinois appellent la Route de la soie maritime, Pékin a cimenté sa présence politique, économique et militaire à Djibouti où elle a construit sa première base militaire en dehors de l’Asie, ainsi que la plus importante zone franche d’Afrique. A l’échelle du continent africain, les investissements chinois se chiffrent à 100 milliards de dollars.

Cependant, pour que le partenariat sino-arabe acquière une dimension stratégique, il serait important d’engager un dialogue franc et approfondi sur des questions fondamentales. Il s’agit pour les Arabes et les Chinois de réfléchir à l’avenir de leur relation en particulier en ce qui concerne l’Initiative « La Ceinture et la Route ». En fait, les Arabes risquent de subir les conséquences des ambitions que nourrissent d’autres pays tels que la Turquie, l’Iran et Israël qui, eux aussi, sont appelés à jouer un rôle central dans cette initiative.

Il s’agit également de définir quel est exactement le rôle attendu de la Chine dans la résolution des crises et des conflits provoqués par l’Iran dans la région. Les Arabes attendent de voir la Chine reconsidérer ses relations avec l’Iran, surtout après les menaces de Téhéran de bloquer le détroit d’Ormuz. Les déclarations du vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Chen Xiaodong, dans lesquelles il a appelé l’Iran à la coexistence pacifique avec ses voisins, pourraient traduire une prise de conscience des dangers posés par la politique régionale de Téhéran l

d’Al-Ahram Chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques

(CEPS)

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