En 2017-2018, les ménages ont dépensé en moyenne 51 400 L.E. par an, contre 37 600 L.E. en 2015, soit une augmentation d’environ 42,7 %. C’est ce que vient de dévoiler le rapport publié par l’Agence centrale pour la mobilisation publique et les statistiques (CAPMAS) sur les « revenus et dépenses » pour 2017-2018. Pour analyser l’évolution de la structure de consommation, l’enquête distingue 12 principaux postes de dépenses dans le budget des ménages : nourriture et boissons, logement, santé, transport, vêtements, éducation, tabac, restaurants et hôtels, ameublement, services divers, télécommunications ainsi que culture et divertissement .
Selon Héba Al-Leissi, professeure d’économie à l’Université du Caire, il n’y a pas eu de changement profond dans la répartition du budget des ménages entre les différents postes de dépense par rapport à 2015. Les Egyptiens ne changent pas facilement leur mode de consommation. « L’augmentation de taux de dépenses dans quelques catégories était prévue et logique. Elle s’explique principalement par la hausse des prix des biens de première nécessité, due à la dévaluation de la livre égyptienne en novembre 2016 », estime Héba Al-Leissi. Avis partagé par Youmna Al-Hamaqi, experte en économie, qui pense qu’il faut prendre en considération les indices économiques que relève l’analyse de la structure de consommation des ménages concernant le niveau de vie en Egypte.
Selon les résultats de l’enquête, la part attribuée à l’alimentation, au logement et à la santé gagne un peu plus du terrain au détriment de l’éducation et des loisirs. « Le niveau de vie influence la manière de consommer. Plus le niveau de vie s’élève moins la part de budget attribuée à la nourriture et au logement est importante. Et à l’inverse la part du budget pour les loisirs et la culture augmente », explique Al-Hamaqi.
La part du lion à l’alimentation
L’alimentation constitue le principal poste de dépense. Il représentait, à lui seul, 37 % des dépenses de consommation des Egyptiens en 2017-2018 contre 34 % en 2015. Selon l’étude, les ménages ont consacré environ 190 000 L.E. par an à leur alimentation. Le panier alimentaire a été en outre un peu modifié. La consommation de la viande, toujours en tête des priorités du budget des ménages, a baissé pour passer de 30 % en 2015 à 27,8 % en 2018. La consommation de produits laitiers, de fromages et d’oeufs a également diminué, passant de 13,7 % en 2015 à 12,5%. Alors que la part du budget consacrée aux légumes et aux céréales a légèrement augmenté de 13 % en 2015 à 14,2 %.
Cela dit, selon le rapport, environ 88,5 % des ménages égyptiens bénéficient du « système des subventions alimentaires » offert par le gouvernement. Celle-ci est passée de 860 L.E. en 2015 par ménage à 2 000 L.E. en 2017-2018. Adel Amer, économiste, estime que sans ces programmes de protection sociale, y compris les aides alimentaires, ces dépenses auraient pu être supérieures.
Les dépenses relatives au « logement et ses annexes » (loyer et factures) arrivent au deuxième rang avec 19 % des dépenses contre 17 % en 2015. Cette augmentation concerne principalement l’électricité et le gaz (ou bonbonne de gaz), le taux est passé de 16,5 % en 2015 à 21,5 %, influencé par la levée progressive des subventions sur le carburant et l’électricité.
Le taux d’équipement des ménages a aussi augmenté légèrement. 96,5 % des ménages possèdent un réfrigérateur, 95,7 % un téléviseur ou LCD, alors que 28,6 % disposent d’un lave-linge automatique et 12,2 % au moins un climatiseur.
La part attribuée à la santé dans le budget des ménages reste stable. Elle occupe la troisième position avec 9,9 % des dépenses. Seules les dépenses consacrées aux produits et appareils médicaux sont passées de 50 % des 9,9 % en 2015 à 55 % en 2018. Al-Hamaqi pense que « la société civile et les initiatives récemment lancées par l’Etat comme la campagne de dépistage de l’hépatite C ont joué un rôle considérable pour alléger les dépenses sur la santé pour les ménages les plus modestes ».
Quant au poids du poste des dépenses de transport, celui-ci a baissé de 6,1 à 6,3 %. Selon la CAPMAS, environ 7,6 % des ménages égyptiens possèdent une voiture particulière, alors que 9,8 % disposent d’une moto ou mobylette.
L’éducation arrive en 8e position. Les dépenses consacrées à ce poste se sont même réduites de 4,8 % en 2015 à 4,5 %. Pourtant, la part attribuée aux cours privés occupe toujours la première place : 37,7 % des dépenses relatives à l’éducation, contre 30,8 % pour les frais scolaires. La dernière part, les loisirs et la culture, ne dépasse pas 2,1 % du budget des ménages. Ce qui montre, selon Hamaqi, que les familles au revenu faible préfèrent généralement allouer leur budget aux besoins les plus vitaux et restreindre la part consacrée au divertissement.
Des écarts entre les zones urbaines et rurales
Selon la CAPMAS, la répartition des dépenses est presque la même qu’on vive en milieu rural ou urbain. Cependant, on dépense bien plus en ville qu’à la campagne : 56 300 L.E. par ménage en zone urbaine par an en 2017-2018 contre 42 500 L.E. en 2015, soit une augmentation de 32,3 % ; 47 300 L.E. en 2017-2018 contre 31 800 L.E. en 2015 en zone rurale, soit une augmentation de 48,6 %.
L’alimentation pèse toujours le plus dans le budget tant pour les ménages ruraux qu’urbains. 40,2 % des dépenses mensuelles en milieu rural sont consacrées à la nourriture contre 33,9 % en milieu urbain. Chaque gouvernorat possède cependant des habitudes alimentaires particulières. Selon le rapport, ce sont les gouvernorats frontaliers où domine la notion des tribus qui consomment le plus de viande.
Le logement vient en 2e position pour les deux catégories avec 20 % des dépenses en milieu urbain et 17 % en milieu rural. Le 3e poste de dépense pour les ménages urbains et ruraux est les soins de santé qui représentent pour les deux environ 10 %. Les gouvernorats de Kafr Al-Cheikh et de Damiette sont ceux qui dépensent le plus pour les services et soins de santé. Le transport vient en 4e position, avec respectivement 6,7 % et 5,4 % pour les milieux urbain et rural. Quant à l’éducation, le gouvernorat d’Assouan enregistre le taux de dépenses le plus faible estimé à 4,5 % tandis qu’Alexandrie figure en tête de la liste avec 14,5 %, suivie du Caire avec 13 % de dépenses.
Dix catégories
Pour analyser le revenu moyen entre les différentes classes sociales, le rapport a divisé la population en dix catégories de même taille. Chaque catégorie représente 10 % du total des individus, après les avoir classés par ordre croissant en fonction des dépenses annuelles par habitant (voir page 4).
La catégorie la plus inférieure, (la 1re décile), soit les 10 % qui dépensent le moins, a vu son revenu augmenter de 22 500 L.E. par an en 2015 à 30 400 L.E. en 2018-2017. Alors que le revenu annuel moyen des 10 % qui dépensent le plus est passé de 81 000 L.E. en 2015 à 100 300 L.E. en 2018-2017.
Ce qui consacre davantage, comme le conclut l’étude, « la disparité entre les 10 catégories ».
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