Voyage dans le monde arabe
Entre deux rives, 50 ans de passion pour le monde arabe, par Gilles Gauthier, Editions JC Lattès, Paris, 2018.
A 18 ans, Gilles Gauthier a pris la route avec trois amis. A Tarifa, les lumières de l’Afrique l’ont fait chavirer. Après avoir visité l’Algérie, puis le Maroc, il a décidé d’étudier l’arabe, de retour à Paris, et c’est là qu’a commencé son histoire avec le monde arabe qu’il relate, de manière passionnante, dans son nouvel ouvrage autobiographique, Entre deux rives, 50 ans de passion pour le monde arabe. Autrefois diplomate, Gauthier est le traducteur des romans d’Alaa El-Aswany. Aujourd’hui, conseiller de Jack Lang à l’Institut du monde arabe, il partage sa vie, entre l’Egypte et la France. Il nous emmène dans un voyage très personnel au Yémen, en Syrie, au Liban, en Iraq, à Bahreïn, bref aux quatre coins d’un monde arabe qui, aujourd’hui, n’est plus le même, comme il le dit bien dans son prologue: « Ce monde arabe qui était pour moi, il y a tant d’années, un horizon lumineux, désirable, serein, mais presque inaccessible, n’est plus aujourd’hui sur nos écrans que bruit, fureur et désespérance quotidienne ».
Gauthier est le seul auteur français à être présent au Salon du livre. Une rencontre avec le public est prévue à cette occasion, où il parlera de son oeuvre, mais la date est encore à déterminer.
D. Ch.
Al-Chamandar, mentir vrai
Al-Chamandar, de Khaled El-Khamissy, Dar Al-Shorouk, Le Caire, 2019.
Depuis plus de 12 ans, l’écrivain Khaled El-Khamissy n’a signé que trois romans. A chaque fois, c’est un franc succès. Taxi, devenu rapidement un best-seller et aussitôt traduit en plusieurs langues européennes en 2007, puis avec moins de succès Safinet Nouh (l’arche de Noé) en 2009, et enfin Al-Chamandar, qui vient de paraître et qui doit s’attendre à un grand succès. L’écrivain a créé le personnage de Chihab Al-Chamandar et fait tout dans le roman et autour du roman pour faire de lui un personnage légendaire, pareil à un Ulysse des temps modernes. Il s’agit de sa naissance, des origines de ce peintre qui appartient à la classe moyenne, et sa mort à l’âge de 60 ans. Dans une soirée de dédicace du roman, Khamissy, qui est également producteur et réalisateur, parle de son personnage comme d’une personne en chair et en os qui dépasse son invention pour vivre sur la toile à partir des commentaires des amis et de leurs postes sur les murs du Facebook, à tel point que l’auteur dit avoir reçu les mots de condoléances après sa mort. « Il est ingrat, je le sais, mais moi je ne hais jamais le genre humain », dit El-Khamissy. En plus, en quatrième de couverture, il met des extraits du peintre renommé Helmy Al-Touni, du réalisateur Daoud Abdel-Sayed ou de la petite-fille de Salvador Dali, comme si toutes ces personnalités avaient connu de près Chihab Al-Chamandar. Comme si personne ne pouvait échapper à sa présence. Chaque chapitre du roman est intitulé au nom de l’une des peintures de l’artiste comme si les stations de sa vie se dessinaient et se racontaient à partir de son oeuvre artistique.
A ne pas rater, chez le même éditeur, Shorouk, Beit Al-Harir (la maison de la soie) de Alaa Khaled, 2019: A la salle 2, B19 l
Dina Kabil
Un couple de naufragés
Al-Zekra Al-Sanawiya (Anniversario) d’Imma Monso, traduction de l’espagnol de Abdel-Salam Bacha, éditions Sefsafa, 2019.
Venant du monde universitaire, l’écrivaine Imma Monso est née en Espagne en 1959. Elle a étudié la philologie française à Strasbourg et à Caen avant de se spécialiser dans la linguistique appliquée. Elle commence à écrire en 1996, année de la parution de son premier roman, No se sap mai (on ne sait jamais), sorti en catalan. Celui-ci a reçu de nombreux prix littéraires, de quoi l’encourager à publier, à ses propres frais, une demi-douzaine de romans et de recueils de nouvelles à succès.
Dans son nouveau roman Anniversario, qui vient d’être traduit en arabe, un couple dans la quarantaine discutait alors qu’il voyageait en voiture, gravissant une route montagneuse. Leur vie bascule. Seul l’homme connaît la direction de leur voyage, c’est une tentative désespérée de sa part afin de regagner le coeur de son épouse. Bien qu’elle soit bien habillée, elle ne semble pas être très amoureuse. Le rapport au sein du couple, leurs vies en chevauchement, sont racontés par bribes.
Sefsafa à la salle 1, pavillon B32.
D. K.
A la recherche du bonheur
Wizarat Al-Saada Al-Qossoua (The Ministry of Utmost Happiness) d’Arundhati Roy, traduction d’Ahmed Chaféï, éditions Kotob Khan, Le Caire, 2019.
Le Ministère du bonheur suprême nous emporte dans un voyage au long cours, des quartiers surpeuplés du Vieux Delhi vers la nouvelle métropole en plein essor et, au-delà, vers la Vallée du Cachemire et les forêts de l’Inde centrale, où guerre et paix sont interchangeables et où, de temps à autre, le retour à « l’ordre » est déclaré. Le roman met en scène deux femmes et une pléiade de personnages que la ville a expulsés pour ne trouver d’autre endroit que les cimetières afin de toucher au bonheur. Le premier roman d’Arundhati Roy, The God of Small Things (le dieu des petits riens), lui a valu le prix Booker International en 1997.
A lire, chez le même éditeur, le nouveau roman de Adel Esmat, Al-Wassaya (les testaments), Le Caire 2019. Au Salon du livre, salle 1, C14 l
D. K.
La philosophie de l’islam
L’oeuvre complète du penseur Sayed Hussein Nasr, en 5 volumes, traduction de Omar Nour Eldine, aux éditions Afak, Le Caire, 2019.
Né à Téhéran en 1933, Sayed Hussein Nasr est l’un des plus importants philosophes islamiques contemporains. Il est le seul musulman à ce jour à avoir fait l’objet d’un énorme volume de la fondation World Philosopher’s Library, aux côtés d’éminents philosophes comme l’Allemand Habermas.
En cinq volumes, la maison d’édition Afaq aborde sa vie, sa pensée et son oeuvre, ainsi que les principales thématiques qu’il aborde comme L’Homme et la nature, L’Islam et l’accablement de l’homme occidental moderne, Les Trois Sages musulmans : Al-Sahrurdi, Ibn Sina et Ibn Arabi.
Sayed Hussein Nasr a enseigné comme professeur à l’Université George Washington et n’a pas pu retourner dans son pays d’origine, l’Iran, en raison du mécontentement des mollahs au pouvoir. Spécialisé en philosophie islamique, il s’est lancé dans une nouvelle voie des religions comparées, du soufisme, de la philosophie cognitive et de la métaphysique. Sa philosophie comprend une virtuose critique de la modernité et la postmodernité et de leur influence sur l’âme de l’homme contemporain. Il est parmi les penseurs qui ont donné une réponse quant à l’existence du mal.
Afak sera présente au Salon du livre à la salle 1, pavillon C41l
D. K.
Chicaneur à jamais
Salami Aleik Ya Zaman : Mochaghabat Sahafi (le journal d’un journaliste chicanier à ses 80 ans) par Salah Eissa (Le Caire, Dar Al-Karma), 2019.
Salah Eissa était un écrivain et un journaliste remarquable, connu pour ses écrits et ses prises de position audacieuses. Il était si sarcastique que son dernier livre, publié à titre posthume un an après sa mort, s’intitulait Le Journal d’un journaliste chicanier. Eissa, surnommé le « conteur », était l’un des journalistes les plus connus d’Egypte. Il documentait la vie de nombreux personnages historiques, de célébrités et des tueurs en série les plus notoires d’Egypte, Raya et Sékina.
Il a pris le sarcasme comme moyen d’analyser la réalité, de montrer le dysfonctionnement qui l’entoure et d’en extraire des histoires et des leçons. Dans ce livre, Eissa a mis ses connaissances encyclopédiques et ses réflexions sur la culture, les arts et l’Histoire, ainsi que ses émotions et ses réactions face aux événements qui l’entourent. Le livre ne révèle pas seulement le style d’écriture de Eissa et ses pensées, il nous emmène également dans sa vie personnelle, dans les lieux où il a travaillé, dans les prisons où il a été détenu, dans son village natal, dans la ville où il a vécu et dans la famille où il a grandi. Le livre est un voyage dans l’esprit, le coeur et les souvenirs de Eissa, un voyage dans les époques qu’il a survolées. Le livre est le dernier témoignage de Eissa sur ses 80 ans. Des fragments de vie assez palpitants.
Al-Karma publie également le nouveau roman de Omar Taher : Kohl Wa Habbahan (rimmel et cardamome), Le Caire, Dar Al-Karma, 2019. A la salle 2-B9 l
Mohamad Saad
Histoires de noyade
Al-Gharaq (la noyade) du romancier Hammour Ziada, Dar Al-Aïn, Le Caire, 2019.
Le cadavre d’une jeune fille flotte sur le Nil. On appelle au secours. Tel est le début du nouveau roman de l’écrivain soudanais Hammour Ziada. La découverte du cadavre coïncide avec un coup d’Etat dans le pays de la victime. Existe-t-il un lien entre les deux événements? C’est ce qu’on suit, de manière à couper le souffle, dans ce 3e roman de Ziada. Son premier, Al-Kong, a été publié aux éditions Mérit, son deuxième, Chouq Al-Darwich (la passion du derviche), à Dar Al-Aïn. Celui-ci a connu un véritable succès et a figuré sur la liste des finalistes du Prix International de la Fiction arabe décerné par le Centre d’Abou-Dhabi pour la culture et le patrimoine aux Emirats arabes unis.
Le nouveau roman se déroule dans les villages d’Oum Durman, au Soudan. L’écrivain ne cesse de tisser un tas d’histoires imbriquées, mêlant mythes, contes populaires et superstitions. Le résultat: une narration très attrayante. L’action se déroule dans les années 1960, une période où le Soudan était marqué par les coups d’Etat successifs, avant que le régime actuel ne s’installe. A travers les témoignages et les petits contes de villageois, c’est l’histoire contemporaine du Soudan qui est habilement narrée. A lire également chez le même éditeur : Les Politiques culturelles à l’époque de Sarwat Okacha, par Mohamad Sayed Rayan, 2019. A la salle 1-B14 l
S. F.
Manuel de films
Cinémaëyanne ? (comment voir un film cinématographique?), par Mahmoud Abdel-Chakour, Dar Nahdet Masr, Le Caire, 2019. Collection Kayfa (comment).
Sans recourir à un jargon académique ou à un style savant, le critique Mahmoud Abdel-Chakour accompagne les lecteurs dans les salles, en face des grands écrans, leur expliquant toutes les composantes d’un long métrage: scénario, dialogues, montage, réalisation, prise de vue, etc. Abdel-Chakour est vice-rédacteur en chef de la revue hebdomadaire Octobar. Il est également critique de cinéma et de littérature, et a déjà publié un bon nombre d’ouvrages, dont : Youssef Chérif Rizqallah, Du point de vue cinématographique, Les Masques de la narration, J’étais un ados dans les années 1970 et Le Cinéma de Mohamad Khan.
L’auteur souligne l’importance du scénario pour réussir un film, en assurant que le réalisateur le plus compétent ne peut jamais présenter de belle oeuvre sans disposer d’un bon scénario, faisant la différence entre synopsis, scénario et dialogues. Ecrire pour le cinéma veut dire partir d’une image et de l’action, cela devrait être clair dans n’importe quel travail dramatique. Le réalisateur, quant à lui, est le chef d’orchestre qui amalgame tous les éléments du film, afin d’aboutir à une bonne fin. A la salle 1-B16 l
Sameh Fayez
L’économie au quotidien
Mollak Misr (les propriétaires de l’Egypte), ouvrage rédigé par un groupe de chercheurs, sous la direction de Mohamad Gad, Le Caire, Dar Al-Maraya, 2019. 343 p.
L’ouvrage analyse la réalité égyptienne selon un prisme politico-économique, en partant d’une recherche plus ancienne publiée en 1985 dans un livre de Samia Imam (Qui possède l’Egypte ?). Celle-ci avait étudié le capitalisme lors de la période de l’Infitah (ouverture économique sous Sadate). La majorité des livres économiques récents ont cherché à se distancier du politique et à se contenter d’offrir une analyse néolibérale de l’économie égyptienne. Le résultat a été, le plus souvent, au profit des politiques néolibérales et n’a pas permis de lier les mesures économiques à leur contexte politique.
A travers ses 7 chapitres, le livre explore la dynamique de l’économie égyptienne depuis les années 1970 jusqu’à nos jours. Il met en relief le retrait progressif de l’Etat de l’activité économique, pour laisser la scène au secteur privé. Le livre aborde également l’émergence du phénomène des complexes de logements privés en Egypte, qui est un phénomène social important et un signe de l’accumulation des capitaux. Le livre propose également des données et des graphiques à l’appui.
Le nouveau Centre international des expositions, situé à Al-Tagammoe Al-Khamès.
Bissan Kassab explore la marchandisation du logement. Mohamad Gad dissèque le secteur agroalimentaire. Omar Ghannam aborde la question de la privatisation des industries mécaniques. Karim Mougahed consacre tout un chapitre à l’industrie textile. Alaa Moustapha nous fait plonger dans le secteur de la communication, Abdel-Hamid Mekkawi dans l’industrie du pétrole, et Ossama Diab pose un regard profond sur le secteur financier comme un outil de concentration de la richesse.
Egalement chez les éditions Al-Maraya, le livre Akbar Min Ane Tara (plus grand que vous pouvez voir), Mohamad Sultan, Le Caire, Dar Al-Maraya, 2019. A la salle 2-C47 .
M. S.
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