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Une histoire liée aux enjeux régionaux et internationaux

Racha Darwich, Mardi, 04 décembre 2018

Le Liban vient de célébrer, le 22 novembre dernier, le 75e anniversaire de son indépendance. Fruit d’une longue lutte, cette indépendance ne marquera pas pour autant la fin de ses peines.

Après la disparition de l’Empire ottoman à l’issue de la Première Guerre mondiale en 1918, le Liban est placé sous mandat français en vertu des accords de Sykes-Picot. Alors que les troupes alliées, principalement britan­niques, occupent le Liban dès 1918, les troupes anglaises se retirent en octobre 1919 laissant la place aux françaises, le Traité de Versailles signé le 28 juin 1919 ayant confirmé le mandat français du Liban. Cette période témoigne les premières divisions au Liban. D’un côté, des manifestations nationalistes arabes essentielle­ment menées par les musulmans exigent le rattachement du Liban au Royaume de Syrie du roi Faysal Bin Hussein. D’un autre côté, les chrétiens réclament la mise en place d’un Liban indépendant protégé par la France. La conférence de San Remo attribuera définitive­ment à la France le mandat sur le pays du Cèdre le 25 avril 1920 et l’Etat du Grand Liban est proclamé le 1er septembre 1920.

L’année 1926 sera une année cruciale avec la promulgation, le 23 mai 1926, de la Constitution qui crée les postes de président et de chef du gouvernement. L’Etat du Grand Liban devient officiellement une République et prend le nom de République libanaise. Ce mois de mai témoigne alors de l’élection de Charles Debbas à la présidence et Auguste Bacha Habib consti­tue le premier gouvernement libanais avec 7 membres dont 2 maronites, 1 sunnite, 1 chiite, 1 druze, 1 grec orthodoxe et 1 grec catholique. Le 29 mai, également, sera mis en place le Sénat libanais présidé par Mohammed El-Jisr.

Dans les années 1930, un mouvement poli­tique appelant à la fin du mandat français s’organise. Le 13 novembre 1936 est signé le Traité franco-libanais qui stipule l’accession à l’indépendance dans un délai de 3 ans. Le texte du traité stipule une coordination entre les deux pays sur le plan de la politique étrangère et de la défense tout en établissant les rela­tions diplomatiques. La France s’engage à protéger le Liban et le pays du Cèdre à accep­ter la présence de troupes françaises sans limitation de durée ou d’effectif et cela pour les 25 prochaines années. Le traité est dénon­cé par des personnalités sunnites qui récla­ment le rattachement du Liban à la Syrie. Des troubles intercommunautaires éclatent alors à Beyrouth et à Tripoli, et en fin de compte, le traité ne sera ratifié ni du côté libanais ni du côté français.

C’est dans la tourmente de la Seconde Guerre mondiale que le Liban marche vers son indépendance. Avec ses ports et son infrastructure, le Liban détiendra une posi­tion géostratégique cruciale pendant cette guerre. En 1940 et 1941, le Levant est sous l’autorité du régime de Vichy. En consé­quence, une armée britannique complétée par des détachements de la France libre occupe la Syrie et le Liban et entre à Beyrouth le 15 juillet 1941. Le Liban passe alors, comme la Syrie, sous le contrôle de la France libre qui a promis l’indépendance aux deux pays.

Pacte national

Le 21 septembre 1943, le chrétien maro­nite, Béchara El-Khoury, grand défenseur de l’indépendance, est élu président de la République par la Chambre des députés. Il s’accorde avec le musulman sunnite, Riad Solh, qui prend la tête du gouvernement. L’accord qui donnera naissance au « pacte national », en vertu duquel les chrétiens acceptent de renoncer à la protection de la France et les musulmans à celle des pays arabes. Ce pacte choisit aussi de consolider la répartition officieuse des postes de responsa­bilité entre les différentes communautés. L’objectif proclamé est de rendre chrétiens et musulmans solidaires dans une communauté arabophone à cheval entre Orient et Occident. Cependant, bien que le pacte ait posé la base de la coexistence entre les communautés confessionnelles du Liban il a semé les germes des conflits internes alimentés par les ingérences extérieures.

Dans sa lutte pour l’indépendance, Riad Solh annonce alors son intention de suppri­mer tous les articles de la Constitution rela­tifs au mandat français. Le parlement vote la suppression de ces articles le 8 novembre. Le gouverneur français réplique le 11 novembre en arrêtant Béchara El-Khoury, Riad Solh et d’autres personnalités qui sont emprisonnées à la citadelle de Rachaya. Toujours le 11 novembre, 7 parlementaires s’introduisent dans le parlement en dépit d’un blocus des forces de l’ordre et adoptent le drapeau Libanais. Le lendemain, des véhicules fran­çais sont attaqués et incendiés lors d’une grève de protestation à Beyrouth. Mais ce n’est que le 22 novembre que le président de la République et son gouvernement sont libé­rés. La France libre se résout à accorder l’indépendance au pays. C’est à cette date qu’on célébrera désormais l’indépendance du Liban. La souveraineté du Liban est officiel­lement reconnue le 3 janvier 1944. Le traité franco-britannique du 13 décembre 1945 décide le départ des troupes françaises et britanniques du Liban. Les dernières troupes quittent Beyrouth le 7 avril 1946 mettant ainsi un terme au mandat français au Liban.

75 ans après son indépendance, le Liban demeure toutefois la scène de nombreuses ingérences régionales et internationales. Politiquement fragile et ayant une position géographique sensible, le pays du Cèdre reste tributaire du climat politique de toute la région.

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