Les restaurants syriens poussent comme des champignons en Egypte. (Photo : Reuters)
Dans la ville du 6 Octobre, située à 30 km du Caire, se trouve la plus grande concentration de Syriens en Egypte. Dans cette partie de la ville, nommée souvent « le petit Damas », une ambiance à la syrienne règne. De petits investissements syriens surtout dans la gastronomie poussent un peu partout. Fuyant la guerre déclenchée en 2011, les réfugiés sont partout. Ils sont concentrés notamment au 6 Octobre, Al-Obour, Al-Réhab, la ville du 10 de Ramadan, la Nouvelle Damiette, Mansoura et Alexandrie. L’Egypte a une expérience unique dans la région en matière d’intégration économique et sociale des réfugiés syriens, comme l’explique Ahmad Youssef, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire. « L’Egypte a réussi à gérer le problème de l’afflux des réfugiés non seulement du point de vue sécuritaire, mais aussi en ce qui a trait au développement ». « Les conditions d’accueil qu’offre l’Egypte aux réfugiés syriens sont positives et les meilleures par rapport aux autres pays de la région. En Egypte, les Syriens ont le statut de touriste, mais ont les mêmes droits que les citoyens. Les réfugiés ne sont pas installés dans des camps, ils sont accueillis dignement et intégrés positivement dans la société égyptienne. Ils ont un accès libre à plusieurs droits et services, tels l’éducation, le logement, la santé et le travail », ajoute Youssef. L’Egypte, classée au 5e rang parmi les pays accueillant les réfugiés syriens, reçoit, selon le HCR, 230 000 réfugiés, tandis que le ministère des Affaires étrangères indique que l’Egypte accueille plus d’un demi-million de réfugiés syriens. Selon le chercheur du Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram Bachir Abdel-Fattah, « la réussite de cette intégration réside dans l’homogénéité culturelle entre les deux communautés ».
Bâtir une nouvelle vie
La majorité des Syriens interrogés par Al-Ahram Hebdo ne cachent pas leur volonté de rentrer chez eux pour reconstruire leur pays, mais ils ne veulent pas pour l’instant « se précipiter ». Pour eux, tout dépend de la sécurité en Syrie et la possibilité de retrouver leur travail.
Amer, 46 ans, originaire de Damas, est arrivé en Egypte il y a six ans avec son épouse et ses quatre enfants. A Damas, il possédait plusieurs magasins de pâtisserie. Mais la guerre l’a obligé à tout abandonner. « Au départ, ce n’était pas facile de trouver un travail. Mais un an après mon arrivée en Egypte, j’ai réussi à ouvrir une petite pâtisserie, qui est devenue en quelques mois la plus connue dans la ville du 6 Octobre. Je n’ai jamais imaginé que je puisse un jour prospérer loin de mon pays », raconte Amer qui hésite de retourner en Syrie, après avoir « bâti une nouvelle vie en Egypte ». Nizar, un jeune homme de 37 ans, a été obligé en 2012 de quitter sa ville Hama où il possédait la plus grande usine de chaussures. « Quand les combats se sont intensifiés en Syrie, j’ai dû fuir en direction de l’Egypte avec ma femme et mes trois enfants. Vu que les Egyptiens adorent les plats traditionnels syriens, j’ai abandonné ma carrière et j’ai ouvert un petit restaurant où j’offre des sandwichs de kebab », souligne Nizar. Il a, quant à lui, refusé de s’inscrire auprès du HCR et a préféré obtenir un visa touristique qui doit être renouvelé tous les six mois. Malgré le succès de Nizar dans son travail, il entend liquider ses affaires en Egypte pour rentrer en Syrie janvier prochain. Il déclare avec un grand sourire : « Il est vrai que je ne me suis jamais senti étranger ici en Egypte, mais la Syrie doit être reconstruite par ses fils ».
Oum Khaled est un autre exemple. Cette femme de 50 ans, qui est arrivée en Egypte il y a sept ans avec ses deux fils, est inscrite auprès du HCR. Elle confirme avoir trouvé sa deuxième patrie en Egypte. « Nous sommes inscrits auprès du HCR et mes petits-fils reçoivent chacun une carte jaune de rationnement d’un montant de 400 L.E. par mois. Pour gagner de quoi vivre, mes enfants travaillent dans des magasins », raconte Oum Khaled. Bien qu’elle soit satisfaite, elle rêve de retourner à son pays. « J’ai commencé à contacter mes voisins en Syrie, afin de connaître les procédures de retour. Mais, parfois la peur de perdre mes enfants me freine, c’est pourquoi je préfère attendre en Egypte jusqu’à ce que la situation devienne rassurante », conclut Oum Khaled.
Lien court: