Al-Ahram Hebdo : Les 70 ans de la Nakba coïncident avec le transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem. Comment voyez-vous donc l’avenir ?
Djihad Al-Harazin : Pour parler de l’avenir de la cause palestinienne, 70 ans après la Nakba, et de la promesse du président Trump de transférer l’ambassade américaine à Jérusalem, il est d’abord nécessaire de réexaminer d’un oeil plus attentif le conflit du siècle. Il s’agit de la plus longue colonisation de l’histoire qui a été bâtie sur les ruines des maisons palestiniennes démolies à l’arrière-plan des massacres commis par les mains des gangs criminels juifs. Tout cela nous mène à nous demander : jusqu’à quand cette colonisation perdurera et privera le peuple palestinien de ses droits les plus simples et les plus élémentaires de liberté et d’indépendance? Ainsi, l’Autorité palestinienne multiplie les efforts sur divers volets. Le volet international qui mise sur la nécessité de procurer une protection de la communauté internationale et sur le fait que la Palestine devienne un Etat membre à part entière au sein de l’Onu. Ceci doit aller de pair avec une position internationale ferme pour demander des comptes à l’Etat hébreu pour ses crimes.
Le monde entier doit savoir que le peuple palestinien s’attache à sa terre et à ses droits légitimes et qu’il n’y renoncera jamais. Cet état de confrontation continu avec l’occupation sur tous les fronts et dans tous les lieux est un message adressé par un peuple qui milite pour récupérer ses droits spoliés et pour dire qu’aucun compromis n’est permis s’il porte atteinte aux constantes palestiniennes. Le monde entier doit en être conscient et doit comprendre qu’il n’y aura ni stabilité, ni paix avant que la cause palestinienne ne soit réglée. Les défenseurs des droits de l’homme, de la démocratie et de la justice de par le monde, et surtout les pays européens, doivent avoir une position plus claire vis-à-vis des pratiques de l’occupation. La cause palestinienne est vivante malgré toutes les tentatives visant à l’entériner.
— La solution à deux Etats est-elle encore viable avec ce qui se passe sur le terrain, notamment à Jérusalem ?
— La solution à deux Etats est une solution fondamentale, prônée par tout le monde. C’est la solution idéale, mais elle doit être établie sur les principes que nous avons proposés, à savoir un Etat palestinien indépendant sur les lignes de 1967 reconnu dans le cadre des résolutions de légitimité internationale et de l’Initiative de paix arabe. Il faut réaffirmer que ni les Etats-Unis, ni quiconque n’ont le droit d’enterrer les dossiers de Jérusalem ou des réfugiés.
— Concrètement parlant, que doit faire la communauté internationale pour faire face aux violations de l’occupation israélienne ?
— Le monde est plus que jamais appelé à oeuvrer à concrétiser la solution à deux Etats avec un Etat palestinien indépendant sur les lignes de 1967. Les pays qui n’ont pas reconnu la Palestine doivent le faire en fonction de cette solution. Ceux qui prétendent que la reconnaissance de l’Etat palestinien paralyserait le processus de paix ont tort. Au contraire, cette reconnaissance consolidera les chances de la réalisation de la paix et mettra un terme aux violations et aux crimes israéliens commis contre le peuple palestinien.
— Depuis la déclaration de la décision de Trump sur Jérusalem, l’Autorité rejette tout rôle unilatéral de Washington. Quelles sont, selon vous, les alternatives ?
— La déclaration de Trump a porté atteinte au rôle d’intermédiaire intègre de Washington dans tout projet de négociations à l’avenir. La position de Washington, qui fait cavalier seul, doit s’arrêter à tout prix. Même le président Abou-Mazen a mis l’accent, à partir de la tribune du Conseil de sécurité, sur la nécessité de trouver un mécanisme international multilatéral pour parrainer n’importe quelle opération de paix prochaine. Ceci doit, selon lui, aller de pair avec la tenue d’une conférence internationale sous un parrainage onusien pour servir de référence à toutes les parties impliquées. Le président avait déterminé les fondements des éventuels pourparlers. A commencer par les calendriers, les résolutions de légitimité internationale, l’initiative de paix arabe et l’engagement à la solution des deux Etats. La position palestinienne est claire. N’importe quel plan de paix qui ne répondrait pas aux droits du peuple palestinien et qui ne s’attacherait pas à ses constantes est catégoriquement refusé. Tous les projets de nation ou d’Etat alternatif aux frontières temporaires ou encore de leadership alternatif ne sont pas acceptés. Le critère réel de n’importe quel plan de paix doit se faire en contrepartie de l’obtention par les Palestiniens de droits indivisibles et complets dans les limites d’un Etat indépendant ayant pour capitale Jérusalem.
— Sur le plan palestino-palestinien, quel est le bilan des travaux du Conseil national palestinien, réuni la semaine dernière ?
— Des décisions importantes ont été prises lors de la 23e session du Conseil national palestinien, parmi elles la fin de la période transitoire, telle que stipulée dans les accords d’Oslo. Cette période se prolongeait sur 5 ans et aurait dû prendre fin en 1999. Mais avec les évolutions et la différence des circonstances, cette période a perduré. L’adhésion temporaire de la Palestine aux Nations-Unies a misé sur la reconnaissance mutuelle entre Israël et la Palestine. Israël, pour sa part, ne s’est pas engagé aux accords conclus, pourquoi donc la Palestine est-elle appelée à le faire? La tenue du Conseil national intervient à un moment primordial pour faire face aux challenges nationaux, les menaces qui affaiblissent la cause palestinienne. Je pourrais dire qu’à l’issue de sa 23e session, le conseil a réussi à renouveler les constantes relatives à la légitimité et à parvenir à une vision nationale palestinienne pour faire face aux défis actuels.
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