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Des activistes privés de liberté

Mavie Maher, Mardi, 14 mai 2013

Moubarak est tombé depuis plus de deux ans, mais la chasse aux opposants est plus intense sous la présidence de Morsi. Exemples de révolutionnaires en détention.

Doma
Doma, en détention, attend son verdict le 3 juin. (Photo: AP)

Abdel-Rahman Al-Arabi

Le 19 avril dernier à l’aube, quelques dizaines de soldats ont défoncé la porte de l’appartement et auraient attaqué la mère et les soeurs de Abdel-Rahman. Ils cherchaient le jeune étu­diant de 16 ans. Comme la plupart des Egyptiens de son âge, il ne s’intéressait qu’au football, et jouait au centre de jeunesse dans son quartier de Matariya. Avec la révolution, Abdel-Rahman s’est soudainement passionné pour la politique. Lors des élections présidentielles, il a voté Hamdine Sabbahi, et après les élections, il est devenu membre du Courant populaire.

Aujourd’hui, il est accusé « d’appartenir au groupe des Black Block et de promouvoir les idées du groupe à travers un réseau mondial d’information ». La police ajoute également aux accusations la possession d’arme et la tentative de brûler un commissariat de police. Le garçon a subi un interrogatoire suivi de 15 jours de détention qui ont été renouvelés pour 15 autres jours.

D’après le père de Abdel-Rahman, même les policiers ne croient pas dans la charge retenue contre son fils. « Ils se moquaient de lui en lui disant : Cet enfant peut-il faire tout ça ? Avant d’ajouter : C’est malgré nous qu’on exécute les ordres ». Comme il doit passer ses examens, Abdel-Rahman est escorté à l’école par la police, les mains menottées. Son père s’inter­roge : « Qu’est-ce qu’on attend d’un garçon comme lui quand il est exposé à une expérience pareille ? Comment peut-il aimer son pays ? ».

Imane Ahmad

Cette femme de 54 ans a été arrêtée le 27 avril dernier. Elle est accusée d’avoir détruit et brûlé des véhicules de police, d’avoir bloqué la circula­tion et battu des policiers. Infirmière, elle s’était dirigée vers le palais pour secourir les manifestants blessés lors des accrochages entre les révolution­naires, la police et les partisans de Morsi. Imane est membre du Front de la liberté pour le changement pacifique. Elle est actuellement détenue à la prison Qanater pour femmes, suite au refus du procureur de la transférer à l’hôpital pour raisons médicales, en attendant le début de son procès. Elle est mère de 2 filles : Radwa, en deuxième année d’université, et Hamis en secondaire. « Au début, je ne supportais pas de voir ma mère portant la djellaba blanche des prisonnières. Mais je suis fière d’elle. Elle est en prison pour avoir défendu ses valeurs », affirme sa fille aînée.

Chaïmaa Hamdi, membre du mouvement Hanharrarhom pour défendre les détenus, estime que le procès d’Imane est avant tout politique, « ils n’ont trouvé sur elle que le matériel des premiers soins ».

Ahmad Doma

C’est l’un des révolutionnaires les plus connus. Doma, un jeune de 24 ans, est un ancien membre de la Coalition des jeunes de la révolution. Il est aussi un ex-Frère musulman et issu d’une famille de Frères. En 2008, il quitte la confrérie alors qu’il était membre des mouvements d’opposition Kéfaya et 6 Avril. Il a été emprisonné dans le cadre de la campagne de collecte d’un million de signatures pour la destitution de Moubarak en 2007. Sous le Conseil militaire, il a été aussi arrêté et accusé d’utiliser des cocktails Molotov face à l’armée.

Le 30 avril dernier, Doma a été placé en détention pendant 4 jours en attendant le résultat de l’enquête pour « humiliations du président de la République ». Dans une conversation téléphonique lors d’une émission à la télé, Doma avait déclaré que Morsi s’est échappé de la prison durant la révolution et qu’il est responsable des meurtres des manifestants sous sa présidence. Un citoyen a alors porté plainte contre lui, l’accusant de porter atteinte au président. De plus, il est accusé d’avoir mis le feu au siège principal du Parti Liberté et justice. Doma restera en détention jusqu’au 3 juin, jour de la prononciation de son verdict.

Hamada Al-Masri

Il est en prison depuis le 23 janvier 2013, accusé d’avoir des armes, dont un fusil et 99 balles. Il aurait, selon la police, utilisé ces armes avec ses camarades, « ce qui constitue un danger pour la vie des autres », alors qu’il rendait visite à l’activiste Mohannad Samir à l’hôpital, suite à une tentative d’assassinat de ce dernier sur la place Tahrir. Le 30 avril, le procès de Hamada a été à nouveau reporté au 25 mai.

Agé de 35 ans, journaliste et père de 2 enfants, il était parmi ces révolutionnaires qui ont voté pour Morsi au deuxième tour des élections présidentielles, en croyant qu'il garantirait le droit de contestation. Aujourd’hui, il est membre du mouvement Sowar bela tayar (révolutionnaires sans courant).

Ossama Mansour, l’ami de Hamada qui était avec lui au moment de son arrestation, affirme qu’il n’avait aucune arme sur lui. Selon lui, c’est une ten­tative du régime pour faire taire les révolutionnaires, précédée par une campagne de diffamation contre eux. « On dit qu’il possède des millions et vit dans une villa alors qu’il habite dans un petit appartement de 40 m2 ».

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