Al-Ahram Hebdo : Le nouveau projet de la loi sur les banques impose aux sociétés de change une augmentation de leurs capitaux de 5 à 20 millions de L.E. en leur accordant un délai d’un an pour se conformer à la loi. Cela vous paraît-il réaliste ?
Mohamed Al-Abiad : Bien sûr que non. Aujourd’hui, les sociétés souffrent de récession et de faiblesse d’activité après la décision de flottement de la livre égyptienne face au billet vert, prise en novembre 2016. Depuis, le mouvement d’achat et de vente du dollar au sein des sociétés est presque nul. Les banques contrôlent le marché du dollar et les sociétés de change sont devenues incapables même de couvrir leurs dépenses à cause du recul de leurs activités. Tous les rapports quotidiens envoyés par les sociétés à la BCE prouvent leur incapacité à augmenter les capitaux. Jusqu’à présent, nous ne sommes pas conscients de l’objectif réel de la clause sur l’augmentation du capital des sociétés dans la loi. Vraiment, cette hausse n’a aucun intérêt. Cela n’est pas justifié pour le moment.
— Quelles sont vos prochaines étapes ? Comment allez-vous réagir face au projet de loi ?
— Ce n’est pas la première confrontation avec la BCE. Cette dernière avait obligé les sociétés de change, il y a quelques années, à augmenter leurs capitaux de 1 à 10 millions de L.E. pour se conformer aux clauses de la loi sur les banques de 2003. Les sociétés opérantes sur le marché à ce moment-là ont intenté un procès devant le Conseil d’Etat pour arrêter l’application de la loi et elles ont obtenu un verdict invalidant la clause sur l’augmentation du capital.
— Pourquoi les sociétés de change n’ontelles pas recours à la fusion pour augmenter leur capital ?
— Les sociétés ne parviennent pas à fusionner pour s’adapter au nouveau projet de loi, il est vrai. La création d’une entreprise ou d’une société doit avoir pour objectif de maximiser les profits. Un objectif difficile à réaliser dans les mauvaises conditions actuelles. Avant de demander aux sociétés de change de considérer cette option, je voudrais appeler les parties concernées à réétudier le nouveau projet de loi sur les banques et à entamer un dialogue avec toutes les parties concernées par la loi pour arriver à un consensus qui convient à tous les acteurs. En effet, en cas d’application du projet de loi sous sa forme actuelle, la majorité des sociétés de change seront obligées de fermer leurs portes et de sortir du marché, puisqu’un grand nombre de ces sociétés opèrent avec un capital inférieur à 5 millions de L.E.
— La Banque du Caire et la banque Al- Ahly ont annoncé récemment la création de leurs sociétés de change d’un capital de 50 millions de L.E. Comment allez-vous faire face à cette compétition ?
— Il n’y a rien à faire au moment actuel, car les conditions sont très difficiles. Les banques ont tous les moyens pour satisfaire leur clientèle. Des moyens qui font défaut dans les bureaux de change qui jouaient auparavant un rôle majeur pour satisfaire les besoins grandissants des clients en devises. Aujourd’hui, il existe 111 sociétés de change en Egypte. Seules 60 sont actuellement opérantes. Quant aux autres, ou bien elles ont été sanctionnées par la BCE et ont dû fermer leurs portes pour une certaine période à cause des infractions, ou elles ont été interdites par la BCE. Toutefois, l’expérience a prouvé l’échec des sociétés de change créées par les banques, car les dirigeants de ces sociétés sont des fonctionnaires bancaires alors que les dirigeants des sociétés de change sont eux-mêmes les propriétaires de leurs sociétés et c’est tout ce qu’il faut pour faire réussir ces entreprises.
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