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Processus de paix : Au-delà des intentions

Sabah Sabet avec agences, Mardi, 09 mai 2017

Aucune déclaration rocambolesque ni décision concrète n'ont suivi la première rencontre Trump-Abbas. Les deux hommes ayant simplement laissé planer l'espoir d'une relance des négociations de paix.

Processus de paix : Au-delà des intentions
Mahmoud Abbas avec Donald Trump, lors de sa dernière visite à Washington. (Photo : AFP)

C’est dans un contexte bien parti­culier que s’est tenue, mercredi 3 mai, la première rencontre entre le président palestinien, Mahmoud Abbas, et le nouveau locataire de la Maison Blanche, Donald Trump. En effet, les deux se sont rencontrés au moment où le processus de paix est au point mort depuis 2014, où les espoirs sont limités et où le Hamas a fait une volte-face inattendue.

Se voulant optimiste, Donald Trump a déclaré, après avoir reçu Mahmoud Abbas : « Nous voulons créer la paix entre Israël et les Palestiniens, nous y arriverons », voulant faire passer le message qu’il est convaincu de la possibilité d’arri­ver à un accord de paix entre Israël et la Palestine. Cela dit, Trump est resté très évasif sur la façon dont il enten­dait aboutir sur un dossier sur lequel tous ses prédécesseurs ont échoué. « Dans ma vie, j’ai toujours entendu que l’accord le plus difficile à conclure était probablement celui qui est entre les Israéliens et les Palestiniens. Voyons si nous pouvons démentir cette affirmation », a-t-il lancé. Quant à Abbas, il a également prononcé une courte allocution à la tonalité plutôt optimiste. Louant les talents de négociateur de son hôte, il a évoqué l’espoir d’un « traité de paix historique » sous sa présidence.

Mais au-delà de ces déclarations de bonne volonté, rien. Aucune pré­cision, aucun agenda, aucun plan de reprise des négociations de paix. Cependant, nombreux sont les observateurs qui estiment que la rencontre est positive en soi. Pour Ilan Goldenberg, un expert du Center for a New American Security cité par l’AFP, la rencontre est importante même si elle n’a abouti à rien. « Le simple fait que cette ren­contre a lieu est l’un des nombreux signaux qui démontrent que l’ap­proche de Trump face au conflit israélo-palestinien est plus conven­tionnelle que ce à quoi tout le monde s’attendait », estime-t-il.

L’Administration américaine évasive

En effet, de part et d’autre, les déclarations ont été convention­nelles : une fois de plus, Abbas a répété qu’il « est temps qu’Israël mette fin à son occupation ». « Nous aspirons à la liberté, à la dignité », a lancé M. Abbas. Les Palestiniens réclament un Etat indépendant dans les frontières de 1967, ayant pour capitale Jérusalem-Est, ce qui signi­fie la fin de 50 ans d’occupation de la Cisjordanie, de la bande de Gaza et de la partie majoritairement pales­tinienne de la Ville sainte. Quant à Donald Trump, il a tenté de mettre la pression sur Abbas en lui disant qu’il ne peut y avoir de paix durable si les dirigeants palestiniens « ne condam­nent pas à l’unisson les appels à la violence et la haine ». Il a même demandé à Abbas d’arrêter la sub­vention financière donnée aux familles des Palestiniens en prison.

Autre point important, la solution à deux Etats. Mettant en avant un mes­sage de « souffrance » mais aussi « d’espoir » de son peuple, le prési­dent palestinien a réaffirmé avec force son attachement à une solution à deux Etats. Pourtant, en recevant mi-février son « ami », le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, Trump avait affirmé que la solution à deux Etats n’était pas la seule possible, rompant avec un principe de référence défendu durant des décennies par la communauté internationale et tous les présidents américains, démocrates comme républicains. Or, lors de sa rencontre avec Abbas, il n’est pas revenu directement sur ce sujet sensible, se contentant d’afficher sa conviction qu’une solution n’était pas hors de portée. Le président américain a éga­lement mis en sourdine sa promesse de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël et d’y installer l’am­bassade américaine, une décision qui aurait provoqué à coup sûr la colère des Palestiniens.

La colonisation, obstacle majeur

Nous nous trouvons donc face à une situation coutumière : des décla­rations de bonne volonté suscep­tibles de n’être suivies de rien de concret. En effet, selon des observa­teurs, les espoirs de relance du pro­cessus de paix restent minces malgré tout. Et ce, pour différentes raisons. Tout d’abord, le contexte d’accéléra­tion des constructions de logements dans les colonies israéliennes depuis l’élection de Donald Trump. Les responsables palestiniens jugent dif­ficile de se rasseoir à la table des négociations tant qu’Israël n’aura pas accepté de geler la colonisation en Cisjordanie, dont la reprise avait fait tourner court les précédents pourparlers sous l’égide des Etats-Unis il y a trois ans.

Selon Dr Tareq Fahmy, professeur de sciences politiques à l’Université américaine du Caire, Trump, qui est poussé par son désir de se présenter comme un « médiateur, un arbitre ou un facilitateur d’un processus qui mènera à la paix, va exercer des pres­sions et en même temps offrir des garanties ». « Ces garanties, dit-il, seront données à Israël pour qu’il accepte de reprendre les pourparlers. Il peut s’agir notamment d’augmen­ter les aides financières octroyées par les Américains aux Israéliens, et plus important, leur donner la garantie que leur sécurité sera défendue, notamment face à l’Iran ».

Et le Hamas dans tout ça ?

Autre facteur-clé, le Hamas. Depuis le Qatar, où il vit, le chef du Hamas, Khaled Mechaal, a estimé que Trump avait « une occasion historique » de « mettre la pression sur Israël (...) pour trouver une solution équitable pour le peuple palestinien ». Et d’ajouter : « Ma demande à l’Administration Trump est de rompre avec les approches erronées du passé (...) et peut-être de saisir l’opportunité que repré­sente le document du Hamas », a-t-il déclaré sur CNN, en référence à la nouvelle plateforme présentée lundi 1er mai, par son mouvement visant à atténuer le ton belliqueux de son texte fondateur. En effet, ce vire­ment du Hamas constitue lui aussi un changement de taille qui pourrait avoir un certain impact sur le pro­cessus de paix. Selon Mohamad Gomaa, chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques d’Al-Ahram (CEPS), « le Hamas a des problèmes dans ses relations avec la région, en premier lieu à cause de ses relations avec les Frères musulmans, et parce qu’à l’origine, il n’est pas accepté sur le plan international. Le Hamas avait donc besoin de réintégrer le proces­sus de paix. Et c’est la raison de ce changement. Il ne veut pas sortir de l’équation, ne veut pas être hors jeu, veut se représenter en tant que représentant d’une partie du peuple palestinien ». « Cela dit, ajoute le chercheur, la nouvelle charte du Hamas n’aura pas un énorme impact parce que le Hamas ne représente qu’un maillon faible de la chaîne et n’est pas un acteur important dans le processus de paix ». D’ailleurs, juste après l’an­nonce du Hamas, le gouvernement israélien s’est montré réticent, esti­mant que ce texte ne changeait rien et jugeant que le Hamas essayait « de duper tout le monde ». Quant à l’Administration américaine, elle n’a pas fait de commentaires. Et elle n’a pas non plus fait de déclaration claire sur le processus et les mesures qui vont être prises. Reste à attendre la suite. L’annonce n’a pas été confirmée, mais le déplacement du président américain en Israël et dans les Territoires palestiniens serait à l’étude pour les 22 et 23 mai. Affaire à suivre.

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