Al-Ahram Hebdo : Selon vous, le niveau de participation prévu au prochain sommet arabe est-il satisfaisant ?
Hossam Zaki : Le niveau de la participation est satisfaisant. En effet, la participation de tous les pays membres est toujours considérée comme un bon signe, ce sera le cas au Sommet de Amman prévu le 29 de ce mois. En ce qui concerne le niveau de la participation des chefs des Etats membres, je considère qu’elle est également satisfaisante. Ceci est essentiellement dû aux bonnes relations que la Jordanie entretient avec les pays de la région ainsi qu’à sa situation stratégique qui la place dans l’oeil du cyclone.
— Qu’adviendra-t-il de la participation du cas spécial de la Syrie ?
— Le siège de la Syrie est actuellement vacant. L’Iraq a évoqué cette question lors du Conseil des ministres. Pour le moment je pense que la majorité des Etats membres s’accordent sur la nécessité de la présence d’un accord politique entre les protagonistes sur la transition et l’avenir de la Syrie. Ceci serait comme une pré-condition pour traiter la question de la récupération par Damas de son siège au sein de la Ligue arabe. Mais en l’absence d’un tel accord, il serait peu probable de résoudre ce problème.
— Le gouvernement syrien a fait explicitement part de ses doutes à l’égard de la Ligue arabe, comment dans ces conditions la Ligue peut-elle jouer un rôle de médiateur dans la crise syrienne ?
— Je me dois de me retenir de commenter sur la confiance que le gouvernement syrien ressent par rapport à la Ligue arabe, mais, par contre, je pense que la crédibilité du régime de la Syrie demeure également à vérifier. Les pays membres de la Ligue arabe ont adopté dès le début du conflit en Syrie une ligne politique qu’ils ne seraient pas prêts de modifier tant que les protagonistes ne concluent pas un accord politique dans le pays.
— Outre la Syrie, le monde arabe connaît deux crises majeures, en Libye et au Yémen. Le sommet peut-il apporter des solutions à ces deux urgences ?
— S’agissant de la Libye, le sommet arabe a saisi le problème dès le début. Heureusement, il n’y a pas de divergence de vues parmi les pays membres sur la Libye, ce qui nous permet de nous concentrer sur la vraie cause du conflit qui consiste essentiellement sur les différends entre les protagonistes libyens eux-mêmes. Dans ce cadre, la Ligue des pays arabes soutient tous les efforts visant à rapprocher les positions des différentes parties libyennes. L’envoyé spécial de la Ligue joue un rôle important dans ce domaine, mais dans ce genre de conflit, les efforts diplomatiques prennent du temps avant d’aboutir.
Quant au Yémen, le sommet va mettre à jour une résolution pour prendre en compte l’évolution des faits. Les pays membres s’accordent sur la nécessité de trouver une solution au conflit dans le pays qui ne serait pas au détriment de la légitimité. Dans ce contexte, la Ligue des pays arabes soutient le président légitime ainsi que son gouvernement, tout en mettant l’accent sur l’importance des efforts diplomatiques ayant pour objectif de normaliser la situation dans le pays.
— Depuis quelques années l’ingérence turque et iranienne devient de plus en plus pesante dans les affaires des pays arabes. Le Sommet d’Amman entend-il prendre des mesures à l’encontre de ces ingérences ?
— L’Iran et la Turquie sont deux forces régionales qui ont leurs intérêts dans la région qui interférent naturellement avec les pays arabes. Les deux pays ont leur politique à l’égard de la région, et parfois des guerres par procuration. La Ligue des pays arabes est bien consciente de ces ingérences.
Je tiens à rappeler dans ce contexte que les ingérences iraniennes figurent sur l’agenda des sommets arabes depuis quelques années, alors que la Turquie n’est pas sur l’agenda. Mais ceci ne nous empêchera pas de débattre de toutes les ingérences dans les affaires des pays arabes, tout en mettant l’accent sur l’Iran sur lequel les pays membres s’accordent.
— La priorité donnée à la cause palestinienne s’est inclinée ces dernières années pour céder la place aux problèmes liés au Printemps arabe. Le Sommet d’Amman va-t-il redonner cette priorité au conflit palestino-israélien ?
— Permettez-moi tout d’abord de qualifier les négociations avec Israël comme un processus politique et non pas un processus de paix. D’ailleurs, relancer ce processus politique est étroitement lié à la position de la nouvelle administration américaine. A mon avis, l’Administration Trump est encore dans une phase préliminaire et elle n’a pas encore développer une politique compréhensive à l’égard du processus politique entre la Palestine et Israël. A mon sens, il y a encore lieu à influencer la politique américaine à cet égard. De la part des pays arabes, l’initiative arabe est toujours sur la table. Mais je tiens à rappeler à cet égard que l’initiative est indivisible et repose essentiellement sur la solution des deux Etats.
Les Palestiniens sont disposés à gouverner leur pays, et la majorité des pays du monde reconnaît leur aptitude à prendre leur Etat en main. Il conviendrait de dire que le nombre des pays qui reconnaissent l’Etat de la Palestine dépasse ceux qui ont des relations diplomatiques avec Israël. L’approche des pays arabes en l’état actuel des choses devrait contourner les obstacles posés par le gouvernement israélien actuellement au pouvoir. Bien que ceci ne soit pas une tâche facile, le dialogue avec les protagonistes internationaux devrait nous permettre d’avancer. Pour ce faire, les pays membres devraient s’accorder au prochain Sommet d’Amman sur un cadre précis consistant en des mesures concrètes et ordonnées. C’est ce que nous allons faire d’ailleurs.
Enfin, pour conclure sur la Palestine, il nous incombe la responsabilité de discuter avec les Palestiniens dans l’objectif de leur rappeler les effets néfastes de leurs divisions sur leur cause principale.
— La Ligue des pays arabes va-t-elle procéder à des médiations pour rapprocher les points de vue divergents entre des Etats membres ? Je pense notamment à l’Egypte et l’Arabie saoudite ...
— Le Sommet arabe d’Amman représente une occasion pour assainir les relations et apaiser les tensions entre les pays membres au niveau des chefs des Etats. Mais la Ligue arabe n’aura pas un rôle précis à jouer à cet égard.
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