Les jeunes journalistes se plaignent de leurs conditions de travail.
Etre journaliste en Egypte n’est pas si simple. Le métier semble moins attirant surtout que la situation des jeunes journalistes est devenue de plus en plus préoccupante. Le travail sans contrat de travail ou salaire rentable, sans protection syndicale, autant de problèmes qu’affrontent les nouveaux venus sur le marché. A ceci s’ajoute le licenciement arbitraire d’un bon nombre d’entre eux sans raisons impérieuses et réelles. «
Les jeunes journalistes font face à de nombreux défis que personne ne peut nier. Il y a certes une exploitation de la part de la plupart des journaux où ils travaillent. Leurs droits sont bafoués dans presque tous les journaux, qu’ils soient nationaux ou indépendants. Ils ne peuvent pas défendre leurs droits, comment peuvent-ils donc défendre les droits de la société ? », estime Abir Al-Saadi, ancien membre du conseil du syndicat des Journalistes.Nesrine, 26 ans, travaille pour un quotidien indépendant, raconte comment elle a beaucoup souffert au début de sa carrière. «
Dans la plupart des journaux où j’ai travaillé, la direction m’a fait toujours un contrat de travail et j’étais donc obligée de travailler sous le label de stagiaire pendant plus de trois ans ». Un contrat signifie un salaire fixe puis une adhésion au syndicat des Journalistes et c’est ce que les publications veulent éviter, faute de financement surtout. «
Parfois je percevais une sorte de prime, mais celle-ci ne couvrait même pas les frais de transport ou la facture de téléphone pour contacter les sources », raconte Nesrine, en poursuivant : «
Le pire est qu’au bout de deux ans de travail, on est poussé à quitter le travail : pas de place pour vous ici,
nous dit-on ». Elle ajoute : «
En 2014, le journal Al-Youm Al-Sabie
, pour lequel j’ai travaillé, a licencié 135 jeunes journalistes. Le problème du licenciement abusif des jeunes journalistes a été pratiqué timidement au passé, mais est devenu aujourd’hui une coutume ».
Absence de sécurité
La sécurité professionnelle est aussi l'un des principaux problèmes. Certains journaux laissent les jeunes journalistes couvrir les manifestations et les événements sanglants sans les former ou leur donner les informations nécessaires en vue de les protéger. Selon le Réseau arabe pour l’information des droits de l’homme, 11 journalistes égyptiens ont trouvé la mort depuis le 28 janvier 2011. « La plupart des journaux envoient les journalistes stagiaires qui ne sont pas encore membres du syndicat pour couvrir les événements dangereux. Il s’agit là d’une irrégularité qui afflige les jeunes journalistes », souligne Al-Saadi, en indiquant qu’elle a quitté son poste au conseil du syndicat pour protester contre l’échec de l’établissement à protéger les journalistes. Les poursuites sécuritaires sont considérées par beaucoup comme la plus dangereuse menace aux journalistes. Cette poursuite sécuritaire fait que les jeunes ont toujours peur en couvrant les événements ou en rédigeant leurs papiers, notamment en l’absence d’un rôle syndical. Certes, parmi les problèmes que rencontrent ces jeunes journalistes, il y a aussi l’absence du rôle du syndicat des Journalistes, qui est censé les protéger et résoudre leurs problèmes avec leurs journaux.Pour Gamal Fahmi, ancien membre du conseil du syndicat, « le syndicat soutient tous les journalistes détenus. Nous ne demandons que la libération des journalistes détenus pour avoir pratiqué leur profession. La plupart des journalistes détenus sont jugés dans des procès politiques ».Interviewé par Al-Ahram Hebdo, Salah Eissa, membre du comité de rédaction de la nouvelle loi sur la presse et les médias, explique que le syndicat, avant la révolution de 2011, était en grande partie dominé par le pouvoir politique, et était capable de régler les problèmes des journalistes, car il y avait à l’époque une sorte d’accord implicite entre le gouvernement et le syndicat, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. « Aujourd’hui, le gouvernement n’essaye plus d’intervenir dans les affaires du syndicat, et cette équation d’intérêts réciproques n’existe plus », estime Eissa.
Violations en tout genre
Selon un rapport publié en 2015 par le comité des libertés du syndicat des Journalistes, les violations contre les jeunes journalistes ont augmenté d’une façon sans précédent. Le rapport revient, en fait, sur la nature des violations et les restrictions non seulement par des appareils gouvernementaux, mais aussi par des gens ordinaires contre les journalistes pour les empêcher de travailler. « Le comité des libertés a enregistré 782 violations contre les journalistes, dont la plupart sont des jeunes », affirme le rapport.Jeunes journalistes et photojournalistes participent de temps à autre à des manifestations devant les locaux de leur syndicat, au Caire, demandant au syndicat de défendre leurs droits à une liberté de presse et à une sécurité professionnelle. Ils se plaignent aussi de leur statut social et économique, et des difficiles conditions de l’intégration au syndicat. En effet, intégrer le syndicat était le rêve de tout jeune journaliste, parce que la majorité des institutions, surtout publiques, n’accordent pas le même traitement aux journalistes syndiqués et non syndiqués. « C’est vrai que l’adhésion au syndicat est régie par la loi. Pourtant, le syndicat présente le même soutien aux journalistes non affiliés », affirme Gamal Fahmi. Néanmoins, vu la situation actuelle les journalistes ne détiennent plus aujourd’hui le quatrième pouvoir.
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