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L’EI en perte de vitesse sur plusieurs fronts

Amira Samir, Jeudi, 06 octobre 2016

La défaite annoncée de Daech en Libye intervient suite à son affaiblissement dans d'autres bastions. Tour d'horizon des différentes lignes de front.

Deux ans après sa fulgurante expansion en Iraq et en Syrie, la situation du groupe djihadiste semble enfin se retourner. L’organisation djihadiste connaît une série de revers significatifs dans ses trois principaux bastions, la Syrie, l’Iraq et la Libye. Au cours de ces derniers mois, Daech a perdu environ 40 % de ses territoires en Iraq et environ 20 % en Syrie. L’organisation a également perdu un bon nombre de ses partisans, soit dans les combats soit lors de frappes aériennes. Depuis 2014, Daech a perdu plus de 22 000 de ses combattants, notamment sur les fronts iraqien et syrien. « Daech a subi de lourdes pertes. C’est la raison première pour laquelle le groupe essaie de mener des attaques hors de ses bastions habituels. Mais, jusqu’à présent, il n’a réussi ni en Europe, ni en Afrique, ni en Asie », souligne Nourhane Al-Cheikh, professeure de sciences politiques à l’Université du Caire.

En Iraq, berceau du groupe djihadiste, l’armée iraqienne et des milices chiites soutenues par l’Iran se sont chargées de reprendre Fallouja, grande ville prise par l’Etat Islamique (EI) en janvier 2014. Le pilonnage de l’aviation américaine a également été décisif. En mars 2015, l’armée iraqienne a repris Tikrit, puis Ramadi, en décembre de la même année. L’emprise de l’organisation a alors commencé à s’effriter en Iraq. « Dès l’annonce de la création de l’Etat islamique en Iraq et en Syrie, le 10 juin 2014, la communauté internationale s’est dite prête à se regrouper, pour faire face aux défis djihadiste. En Iraq, les forces iraqiennes sunnites, chiites et kurdes se sont unies contre l’ennemi commun et ont réussi dans certains combats, soutenus par les Américains, à reprendre des territoires occupés par le groupe », indique Iman Ragab, experte au département des études sécuritaires et stratégiques du Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. Or, selon elle, la réalité est choquante parce que chaque communauté a ses propres priorités et intérêts. « Les changements politiques, qui ont suivi la création de l’Etat islamique, ont montré que les différentes parties iraqiennes ont usé de cette guerre contre Daech pour réaliser des gains politiques. Et le groupe a beaucoup profité de ces divisions », reprend Iman Ragab.

En Syrie, Daech a été principalement affaibli depuis le début de l’intervention russe, en septembre 2015. Raqqa, la capitale du groupe djihadiste, et la ville charnière de Manbij sont aujourd’hui menacées par les forces kurdes qui sont soutenues par l’aviation américaine. En janvier 2015, ces forces ont repris la ville syrienne de Kobané. « En Iraq comme en Syrie, Daech a perdu toutes ces grandes villes et les territoires qu’il occupait. Tout ce qui lui reste sont de petites villes ou des villages moins importants », indique Nourhane Al- Cheikh.

Revers significatifs

Avant sa défaite en Libye, les partisans de Daech avaient mené des attaques terroristes dans différents territoires hors de leurs zones de contrôle. Cependant, le groupe a reçu des revers notables dans plusieurs pays : en Algérie, en Tunisie, en Arabie saoudite et au Liban.

En Egypte, des membres du groupe implantés dans le nord de la péninsule du Sinaï ont revendiqué de multiples attaques dans le pays dont un attentat à la bombe contre un avion de touristes russes après son décollage de la station balnéaire de Charm Al-Cheikh. En août dernier, l’armée égyptienne a annoncé avoir tué le chef de cette branche du groupe, Abou-Doaa Al-Ansari, et nombre de ses adjoints les plus importants. Une nouvelle défaite pour le groupe.

Dans son rapport de juin 2016, l’Agence Stratford pour les analyses stratégiques a indiqué que le groupe Daech a connu des revers significatifs dans le Sinaï et a perdu un grand nombre de ses combattants. « Le groupe n’a pas réussi à occuper des villes ou des territoires du Sinaï, comme il l’avait fait en Iraq et en Syrie. Pourtant, le groupe résiste encore et est capable de multiplier ses attaques terroristes contre la police et l’armée égyptiennes. Les menaces de Daech du Sinaï se sont néanmoins multipliées et représentent un grand danger pour le régime égyptien actuel », cite l’Agence Stratford dans son rapport.

Selon Ahmad Ban, spécialiste des mouvements islamiques, « Daech représente un certain danger pour l’Egypte même s’il n’a pas réussi à étendre sa domination au Sinaï et que les efforts dans la lutte antiterrorisme ont porté des fruits ces derniers mois ». Le spécialiste pense ainsi que « 2017 sera une année très importante dans la lutte contre Daech. Et 2018 peut annoncer la défaite du groupe ».

Le degré de résistance de Daech varie donc d’une ligne de front à l’autre. Les priorités du groupe diffèrent selon la région. Selon Mohamad Gomaa, chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, la poursuite du conflit en Syrie peut renforcer les attaques de l’EI contre la coalition internationale en Syrie et en Iraq. « Mais la situation reste difficile, et il est délicat de prévenir l’avenir de Daech », conclut Gomaa.

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