Al-Ahram Hebdo : La corruption est-elle la crise majeure menaçant le secteur du blé en Egypte ?
Fathi Al-Charqawi : Oui, la corruption est devenue de plus en plus apparente ces dernières années. Plusieurs hommes d’affaires possédant des silos privés de stockage du blé commettent de graves violations et font entrer des quantités fictives de blé local dans les silos, et cela en remplaçant le blé local, acheté par le gouvernement, par du blé importé à bas prix et de qualité médiocre, gardant ainsi les bénéfices nés de la différence entre les deux prix. Ainsi, ces hommes d’affaires sont accusés de détournement de fonds publics. Quant aux silos appartenant à l’Etat, ils ne fonctionnent qu’à 20 % de leurs capacités, ce qui reflète un gaspillage de l’argent public. En plus, il est cité dans les archives du ministère de l’Approvisionnement que la réserve stratégique du blé est de 4,9 millions de tonnes, ce qui contredit la réalité, parce que l’Egypte ne possède qu’environ 3,4 millions de tonnes. Je souhaite que les employés des divers organismes qui ont fermé les yeux sur cette corruption soient punis. Mais ce qui est vraiment frustrant c’est que le ministère de l’Approvisionnement protège de toutes ses forces la corruption et les corrompus.
— A part cette affaire de corruption, le blé ne fait-il pas face à d’autres difficultés ?
— A part la corruption, le blé égyptien ne souffre d’aucune crise majeure, au contraire, les conditions sont convenables pour son agriculture. Les centres de recherches publics sur les grains déploient de grands efforts afin d’augmenter la productivité au niveau vertical, et de développer des variétés de blé de haute qualité. Mais à chaque fois que le prix du blé chute, les agriculteurs sont peu enthousiastes à le cultiver.
— Comment expliquez-vous le fait que l’agriculteur égyptien s’est éloigné de la culture du blé ? Le prix du blé en est-il la cause ?
— L’agriculteur égyptien n’a pas abandonné la culture du blé. Mais parfois, la chute des prix du blé peut mener à cela. Ajoutant aussi ce qu’on appelle le cycle agricole qui est un élément important du maintien ou de l’amélioration de la fertilité des sols et donc un atout pour l’augmentation des rendements. Ainsi, il ne peut pas cultiver le blé de manière continue.
— Comment expliquez-vous alors le fait que l’Egypte est l’un des grands importateurs de blé ?
— On ne peut pas expliquer cela par le fait que les agriculteurs égyptiens ne cultivent pas suffisamment de blé. C’est plutôt à cause du fait que l’Egypte est l’un des premiers consommateurs de blé à l’échelle mondiale. Le problème du blé reflète un certain abus de la consommation. Mais en réalité, cette consommation excessive a commencé à chuter avec l’application du nouveau système de subvention du pain qui, d’ailleurs, souffre de plusieurs aspects de corruption (lire page 5).
— Quels sont les problèmes posés par le blé importé ?
— C’est aussi la corruption qui représente la crise essentielle menaçant le blé importé. A cause de la corruption dans la surveillance des importations et des exportations, on risque de faire entrer dans le pays des quantités de blé de mauvaise qualité. Je pense qu’on doit mettre fin à l’activité des silos privés. C’est l’Etat qui doit récupérer le blé et le stocker dans ses silos afin d’empêcher tout détournement de fonds publics et le gaspillage des ressources.
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