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Un putsch non revendiqué

Amira Samir, Jeudi, 21 juillet 2016

Personne n’a revendiqué officiellement la tentative de coup d’Etat manquée du 15 juillet en Turquie. Le gouvernement d'Erdogan a arrêté plusieurs milliers de militaires, de juges et des personnalités de l’opposition.

Un putsch non revendiqué
(Photo : Reuters)

Très peu d’informations filtrent sur les auteurs de la tentative de coup d’Etat manqué en Turquie. Le pre­mier ministre turc, Binali Yildirim, a annoncé que la tentative de putsch a été menée par un groupe d’officiers de l’armée turque qui cherchaient à renverser le président Recep Tayyip Erdogan. Il a ajouté que le gouverne­ment a ensuite procédé à l’arresta­tion de 2 839 des putschistes mili­taires, sans déclarer leur apparte­nance politique. Deux groupes peu­vent être derrière cette tentative de coup d’Etat. Les putschistes kema­listes qui ont annoncé la création du « Conseil de la paix dans le pays » et ont cité ouvertement dans leur com­muniqué leur attachement à Mustapha Kemal Attatürk, le père de la Turquie moderne. La seconde hypothèse est que les instigateurs de ce putsch soient un ensemble d’offi­ciers de rang moyen attachés aux principes de laïcité. Dans la nuit du putsch, un communiqué émanant des « forces armées turques » et procla­mant la mise en place de la loi mar­tiale ainsi qu’un couvre-feu national a été diffusé sur la chaîne officielle de la télévision turque.

Les putschistes ont alors déclaré avoir « pris le contrôle du pays pour assurer et restaurer l’ordre constitu­tionnel, la démocratie, les droits de l’homme, les libertés fondamentales et le respect de la loi ».

Aucun militaire n’a pourtant revendiqué cette tentative de coup d’Etat. Le général Erdal Öztürk, commandant du troisième corps d’armée, le général d’armée Adem Huduti, commandant de la seconde armée, ainsi que le général de divi­sion Avni Angun, commandant de la garnison de Malatya, ont été placés en garde-à-vue. L’ancien chef de l’état-major de l’armée de l’air, le général d’armée Akyn Öztürk, a également été interpellé.

2 745 juges ont été forcés de quit­ter leur fonction, et selon la chaîne de télévision turque NTV, Alparslan Altan, l’un des 17 juges de la Cour constitutionnelle, a été également placé en détention.

L’hypothèse guléenne

Dans une déclaration à la télévision, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a très vite pointé du doigt la mouvance islamiste de son pire enne­mi et ancien allié, Fethullah Gülen, le dénonçant comme étant le principal instigateur du putsch de vendredi der­nier. L’imam Fethullah Gülen est un ex-allié d’Erdogan, devenu son enne­mi juré après un scandale de corrup­tion survenu à la fin de 2013, dans lequel un grand nombre de proches d’Erdogan ont été impliqués. Gülen, 75 ans, exilé aux Etats-Unis depuis les années 1990, est soupçonné aujourd’hui d’organiser un « Etat parallèle » destiné à renverser Erdogan. Il est à la tête d’un puissant mouvement turc appelé Hizmet (ser­vice, en turc), qui compte un gigan­tesque réseau d’écoles, d’ONG et d’entreprises, et dont l’influence s’étend dans les médias, les bureaux de police ou encore la magistrature.

Enfin, des rumeurs ont affirmé que les militaires putschistes ont été sou­tenus par les Etats-Unis. D’après ces rumeurs, la base militaire américaine d’Incirlik, qui avait préalablement annoncé sa fermeture et servait de base arrière à la coalition internatio­nale, aurait servi de soutien à Fethullah Gülen.

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