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Un vieux routier à la tête de la Banque Centrale

Hana Afifi, Lundi, 26 octobre 2015

En pleine crise monétaire et financière, l'Egypte a fait appel à l'expérience de Tareq Amer pour succéder à Hesham Ramez à la tête de la Banque Centrale, dans l'espoir de sortir de l'impasse.

Un vieux routier à la tête de la Banque Centrale
Tareq Amer

Vingt-sept ans d’expé­rience bancaire, dont dix dans le secteur public, ont valu à Tareq Amer le poste du gouverneur de la Banque Centrale. On attend de lui de redresser un système bancaire et une politique monétaire très controversés.

Amer, qui prendra ses fonctions le 26 novembre prochain succédant à Hesham Ramez, se trouve face à une situation alar­mante avec une livre égyp­tienne en chute libre, une réserve en dollars épuisée et une inflation grandis­sante. Pourtant, un air d’optimisme semble régner depuis sa nomina­tion. « Amer est quelqu’un de brave et de clairvoyant. Il prendra des décisions rapides qui se refléteront sur la stabilité de la livre égyptienne face au dollar. Il a une large expertise et il prendra le contrôle de la situation », a dit, à Al-Ahram Online, Ahmad Chiha, chef de la division des importateurs à la Chambre du commerce du Caire. Amer a été vice-gouverneur et membre du conseil d’administration de la Banque Centrale entre 2003 et 2008. Ancien dirigeant exécutif au sein des groupes américains Citibank et Banque d’Amé­rique, c’est surtout son succès en tant que chef de la Banque Nationale d’Egypte (NBE) qui l’a favorisé pour le poste du gouverneur de la Banque Centrale. Entre 2008 à 2013, il a fait de la NBE la plus grande banque d’Egypte. Au moment où il a quitté, la banque faisait des revenus de plus de 2 milliards de livres égyp­tiennes. Il a fait une réforme totale dans la structure administrative et la stratégie monétaire de cette banque. « Amer est quelqu’un qui écoute à ses collègues et l’avis des experts. Il fait confiance aux gens avec qui il tra­vaille, il n’est pas du genre à donner des ordres seule­ment », confie à Reuters l’un de ses anciens collè­gues à la NBE.

L’ancien président de la Fédération des banques égyptiennes était au coeur de la réforme du secteur bancaire lancée par la Banque Centrale en 2004 et avait son mot à dire dans la privatisation des banques. « Je ne suis pas contre la privatisation, mais je pense qu’une telle démarche doit s’accompa­gner d’une vision », dit-il suite à la privatisation de la Banque d’Alexandrie lors d’un entretien à la chaîne Alhurra en marge des réu­nions du FMI en 2011. Amer était favorable à la vente des petites banques pour renflouer les caisses de l’Etat, mais s’opposait à la privatisation des grandes banques telles que la NBE et la Banque Misr qui représentent 50 % du sec­teur bancaire.

S’ouvrir aux investisseurs

En 2010, à une époque où les réserves en devises étrangères étaient deux fois plus supérieures qu’aujourd’hui, Amer fai­sait tout pour les augmen­ter. La NBE avait alors émis des obligations monétaires aux Etats-Unis.

Le nouveau chef des banquiers avait toujours montré une tendance à s’ouvrir aux investisseurs étrangers et aux instances monétaires internationales. « L’accord avec le FMI va relancer la confiance des investisseurs étrangers en Egypte », a-t-il dit lors d’un entretien avec Al-Ahram Online en 2012. « Ici, dans mon bureau, j’ai rencontré de hauts res­ponsables dans des banques internationales qui m’ont dit qu’ils atten­daient deux choses de l’Egypte : la première est de signer le prêt du FMI. La seconde est de s’assu­rer que la politique moné­taire de la Banque Centrale reste indépendante », a-t-il ajouté. Les négociations autour de ce prêt de 3 mil­liards de dollars s’étaient arrêtées depuis la destitu­tion de l’ancien président Mohamad Morsi, mais récemment, il y a eu des signes de reprise. Quant à l’indépendance de la Banque Centrale, Amer se vante de n’avoir jamais permis à quiconque « d’in­tervenir dans mon tra­vail ».

Dans une atmosphère économique, où les reve­nus de tourisme et les investissements étrangers sont en baisse, Amer devra faire face à plusieurs défis. Son prédécesseur, Hesham Ramez, lui aussi disciple de l’ancien gouverneur Farouq Al-Oqda, avait eu recours à des mesures non populaires pour conserver les réserves en devises. Il a dévalué la livre égyptienne à plusieurs reprises face au dollar pour contrôler le taux de change et a limité les dépôts de dollars dans les banques pour com­battre le marché noir. De quoi se mettre à dos de nombreux hommes d’af­faires, d’autant plus qu’il a réclamé des restrictions sur les importations. Il reste donc à voir comment son successeur va s’y prendre.

Focus

Né en 1969

— Diplômé de l’Université américaine du Caire en 1980, en économie et gestion. Puis, il a occupé divers postes exécutifs dans de nombreux établissements financiers et bancaires, dont Citibank et Banque d’Amérique.

— Adjoint du PDG de la Banque Misr (2002-2003).

— Vice-gouverneur de la Banque Centrale d'Egypte (BCE), membre du conseil d’administration et chef du conseil de la politique monétaire à la BCE (2003-2008).

— Député du directeur général de la Banque Arabe Internationale (janvier 2007-juin 2008).

— Président de la Fédération des banques égyptiennes (avril 2011-janvier 2013).

— PDG de la Banque Nationale d’Egypte (2008-2013).

— Directeur de la Banque Nationale d’Egypte au Royaume-Uni (2014-2015).

— Gouverneur de la BCE en 2015.

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