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Rasha Kenawi : Il faut entamer un processus d’industrialisation qui compte sur la main-d’oeuvre.

Hana Afifi, Lundi, 01 juin 2015

Rasha Kenawi, économiste et membre fondatrice du front populaire de l'axe du Canal de Suez, fait le bilan économique de l’année écoulée. Interview.

Rasha kenawi
Le président en visite sur le chantier d'agrandissement du Canal de Suez. (Photos : Reuters)

Al-Ahram Hebdo : Comment évaluez-vous la situation économique, un an après l’élection du président Abdel-Fattah Al-Sissi ?

Rasha Kenawi : L’environnement économique s’est amélioré, notamment grâce à la stabilité politique. Mais en terme des chiffres, nous avons un déficit budgétaire d’environ 300 milliards de L.E., ce qui est extrêmement dangereux. Nous avons des difficultés dans le secteur industriel et touristique. Environ 60 jours se sont écoulés depuis la conférence de Charm Al-Cheikh et les investissements se font toujours attendre. Par ailleurs, la majorité des projets annoncés concernent l’immobilier ou l’énergie. Certes, ces projets sont importants, mais comme économiste, je cherche des investissements dans l’industrie.

— Comment voyez-vous l’orientation économique de l’Etat ?

— Je ne peux pas parler de vision économique. Je ne sais pas si le gouvernement pense prendre la voie d’une économie qui repose sur les services comme, par exemple, à Dubaï ou sur l’industrie. Ce n’est pas clair. Pendant l’année écoulée, le gouvernement n’a parlé que de méga-projets. On ne sait exactement ni ce qui a été achevé dans ces projets ni où nous en sommes.

— D’après vous, qui profite de cette situation ? Les plus riches ou les plus pauvres ?

— Je pense que le gouvernement actuel emprunte le même chemin que celui des anciens gouvernements de Hosni Moubarak. Il se range du côté des riches, tout en prenant des initiatives limitées destinées aux pauvres. L’Etat a des rôles importants à jouer dans la régulation de l’économie et la réalisation d’une certaine justice sociale. Or, le gouvernement est extrêmement passif en tant que régulateur. Il n’assume pas son rôle dans la lutte contre la corruption et le monopole. Il adopte la même vision erronée de l’économie « libérale » des gouvernements de Moubarak. Laisser la gestion du marché à l’offre et à la demande, ne suffit pas pour que ce soit une économie libérale. Naturellement, ce sont les plus riches qui en profitent.

— La justice sociale figure-t-elle sur l’agenda du gouvernement ?

— Il y a eu des initiatives du ministère de la Solidarité sociale notamment pour augmenter certaines pensions. Mais cela s’inscrit dans le social, pas dans l’économique. Mais pour moi, la justice sociale consiste à créer des opportunités d’emploi. Pour y parvenir, il faut entamer un processus d’industrialisation, dans l’agroalimentaire, le textile, ... et toute autre industrie qui compte sur la main-d’oeuvre.

— Après ce bilan plutôt négatif, peut-on terminer sur une note positive ?

— Le développement de l’axe du Canal de Suez est un point positif. Là on peut parler d’un projet de développement. La conférence de Charm Al-Cheikh a été aussi un bon début, mais il faut accélérer le rythme.

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