L'Iran et les six grandes puissances ont repris les négociations à Vienne le 22 avril.
(Photo : Reuters)
Le futur du nucléaire iranien demeure un sujet de controverse. «
Le programme nucléaire est un fait accompli, aucune force ne peut le désintégrer », avance Mohamad Abbas Nagui, spécialiste du dossier iranien au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’
Al-Ahram.
Pourtant, beaucoup pensent que l’accord auquel sont parvenus, le 2 avril dernier, l’Iran et le groupe du 5+1 (Etats-Unis, Russie, France, Grande-Bretagne, Chine et Allemagne), va mettre un terme au programme nucléaire iranien. Le département d’Etat aux Etats-Unis a récemment publié un document présentant les paramètres-clés, décidés à Lausanne, en Suisse, sur lesquels va se baser le texte final du plan d’action qui sera rédigé d’ici 30 juin.
Selon le document, les restrictions sur le programme d’enrichissement de l’uranium dureront dix ans. Le nombre de centrifugeuses va être réduit de 19 000 à 6 104 (centrifugeuses IR-1 de première génération). Seules 5 060 centrifugeuses pourront enrichir de l’uranium dans les 10 ans à venir, les autres étant réservées à la recherche. L’Iran ne pourra pas enrichir d’uranium à plus de 3,67 % pour au moins 15 ans. Seul de l’uranium enrichi à au moins de 90 % peut être utilisé pour une bombe atomique.
Le pays va aussi réduire son stock de 10 tonnes d’uranium enrichi à 300 kg enrichi, toujours pour les 15 ans à venir. Le pays ne pourra pas non plus construire de nouveaux établissements pour enrichir de l’uranium. L’établissement de Fordow ne sera plus être utilisé pour l’enrichissement, mais seulement pour des buts de recherches. L’établissement de Natanz verra aussi ses capacités réduites. Enfin, l’AIEA (l’Agence Internationale de l’Energie Atomique) aura accès à tous les établissements nucléaires de l’Iran pour des fins de surveillance.
Après les 15 ans
Mais qu’en sera-t-il du nucléaire iranien après cette durée de 15 ans ? Le chercheur du CEPS, Mohamad Abbas Nagui, pense que l’accord préliminaire « ne résout pas le problème, mais se contente de le reporter ». S’il est vrai qu’il restreint les capacités nucléaires de l’Iran, le pays a toutefois déjà acquis un certain savoir-faire. Le chercheur explique que l’Iran a insisté à poursuivre ses recherches sur le nucléaire et à conserver son droit d’enrichir de l’uranium. « Il y a une probabilité que la capacité nucléaire de l’Iran augmente. Mais cela ne veut pas dire que l’Iran aura la capacité de développer une bombe », poursuit le chercheur.
Moustapha Al-Labbad, directeur du centre Orient pour les études régionales et stratégiques, spécialiste des affaires iraniennes, estime que l’accord va détourner l’Iran de la bombe. Selon lui, les paramètres du plan d’action « qui s’étendent sur une durée de 15 ans vont empêcher l’Iran de se transformer en puissance nucléaire militaire pendant cette période », écrit-il dans un article publié par Al-Safir. Et d’ajouter : « L’Iran ne peut se transformer en puissance nucléaire militaire qu’en se dérobant au contrôle international, et en retournant à l’enrichissement à des niveaux supérieurs. Et cela est peu envisageable ».
L’Iran demeure, en effet, membre du Traité de Non-Prolifération (TNP) qui stipule l’interdiction de développer des armes nucléaires. Même après 15 ans, l’Iran sera toujours soumis au Protocole Additionnel du TNP, un protocole permanent qui donne un large accès aux inspecteurs de l’AIEA. « L’Iran ne peut pas quitter le TNP, car cela signifierait qu’il a l’intention de construire une bombe », reprend Mohamad Abbas Nagui.
L’Iran sur une ligne claire
Quant à la position officielle de l’Iran, elle demeure claire : la levée des sanctions doit intervenir en premier et le pays n’a pas l’intention de produire de bombe. Lors d’une récente réunion avec des imams, l’Ayatollah Ali Khameini, le guide suprême iranien, a annoncé qu’il n’était ni pour ni contre l’accord préliminaire. Khameini a expliqué que l’accord ne comporte pas de mesures substantielles ou obligatoires. Il a aussi insisté sur la nécessité de lever les sanctions. « Toutes les sanctions doivent être levées juste après que l’on est parvenu à un accord, si la levée des sanctions dépend d’un autre processus, alors pourquoi avons-nous commencé à négocier ? », dit-il.
Il a aussi insisté sur le fait que la bombe nucléaire est contraire à l’islam. « L’islam et la raison nous interdisent d’acquérir l’arme nucléaire. Mais l’industrie nucléaire est nécessaire pour le futur de notre pays en terme d’énergie, de médecine, d’agriculture … », ajoute-t-il.
Pour l’heure, tout laisse à penser que l’accord tiendra du côté iranien, si les sanctions sont effectivement levées.
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