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El Baradei sur la sellette

May Al-Maghrabi, Mardi, 20 août 2013

Après sa démission, le vice-président Mohamed ElBaradei a fait l'objet de vives critiques dans le camp libéral, qui l'accuse de « trahison à la révolution ».

ElBaradeii

Réagissant à l’évacuation par la force des deux sit-in des Frères musulmans, le vice-président pour les relations internationales et prix Nobel de la paix, Mohamed ElBaradei, a présenté cette semaine sa démission au président par intérim, Adly Mansour. « Il m’est devenu difficile de continuer à assumer la responsabilité de décisions avec lesquelles je ne suis pas d’accord », a écrit ElBaradei dans sa lettre de démission. Il déplore les morts qui, selon lui, « auraient pu être évités».

« Malheureusement, ceux qui vont tirer profit de ce qui s’est passé aujourd’hui sont ceux qui appellent à la violence et à la terreur, les groupes extrémistes », poursuit-il. L’ancien chef de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) et figure de proue de l’opposition laïque avait été nommé début juillet au poste de vice-président en charge des relations internationales. Et il a été désigné par l’opposition pour la représenter au cours de la période transitoire.

La démission d’ElBaradei a déclenché une vague de critiques dans le camp libéral. Dans une première réaction, le mouvement Tamarrod, qui a déclenché la révolution du 30 juin, a fustigé la démission d’ElBaradei, l’accusant de « manquer à ses responsabilités de clarifier que l’Egypte mène une guerre contre le terrorisme et que sa sécurité nationale est en danger ». Mohamad Al-Orabi, président du parti de la Conférence, ne trouve, lui, aucune justification logique à cette démission au moment où l’Etat et le peuple mènent une guerre fratricide contre le terrorisme islamiste qui frappe le pays. Le parti a réclamé aussi le renvoi d’ElBaradei du Front National du Salut (FSN).

« Avec cette démission, ElBaradei donne de la légitimité aux actes terroristes orchestrés par les pro-Morsi et ceci contre la volonté de millions de citoyens égyptiens qui se sont révoltés contre le régime des Frères musulmans et qui ont mandaté l’armée pour faire face à la violence. C’est pourquoi cette démission nous a choqués. Elle ne peut être interprétée que dans le contexte d’une complicité d’ElBaradei avec l’Occident », indique-t-il. Le ministre de l’Enseignement supérieur, Hossam Eissa, a affirmé dans des déclarations à la chaîne privée

Dream qu’ElBaradei était au courant de l’intervention policière pour déloger les pro-Morsi et il l’a approuvée. « Pourquoi ElBaradei n’a-t-il pas condamné les tortures commises par les islamistes lors de leur sit-in contre leurs opposants ainsi que les horribles massacres commis à l’égard des policiers et des forces armées ? Pourquoi n’a-t-il pas condamné l’incendie des églises et les meurtres des coptes ? C’est hélas, qu’il ne voit et n’écoute que la voix des Occidentaux et pas celle de son peuple », a-t-il dit.

D’autres activistes se disent déçus par cette démission. Sur son compte Twitter, Khaled Youssef, réalisateur et figure de proue de la révolution du 25 janvier, a qualifié la démission

d’ElBaradei d’une « trahison au peuple et sa révolution ». « Le peuple mène une bataille contre les factions hostiles aux libertés et à la démocratie. En démissionnant, ElBaradei leur a permis de marquer un point contre la volonté

du peuple », a-t-il dit. Regret partagé par Chadi Al-Ghazali Harb, ex-député libéral, qui trouve qu’il s’agit d’une faute impardonnable de la part d’une personnalité comme ElBaradei qui a beaucoup donné à la révolution. Tarek Fahmi, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire, estime que cette démission

compliquera le processus politique déjà en panne à cause de la violence. « ElBaradei jouit d’une grande crédibilité sur le plan international. C’est une figure libérale, démocratique et indépendante. Sa présence au sein du gouvernement contesté sur le plan international renforçait

la légitimité de ce régime et c’est pourquoi que sa démission embarrasse le gouvernement. La démission d’ElBaradei est un message à l’étranger signifiant que le régime a opté pour la violence et la solution sécuritaire au détriment d’une issue politique, et ceci à l’encontre de la réalité et au moment où la campagne occidentale contre l’Egypte bat son plein », explique Fahmi.

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