Lancée début janvier, l'initiative présidentielle de lutte contre la migration clandestine « les bateaux de sauvetage » doit être exécutée dans les 11 gouvernorats les plus touchés par ce phénomène. L’initiative est menée par les ministères de l’Immigration et des Affaires des expatriés, de la Solidarité sociale, et du Développement local, ainsi que par le Conseil national de la femme, l’Organisme des petites et moyennes entreprises, des ONG et des représentants du secteur privé. Visant principalement les jeunes, le plan d’action de cette initiative porte sur la sensibilisation aux dangers liés à la migration clandestine, la formation de la main-d’oeuvre et la création d’emplois. Le 16 janvier, les organisations de la société civile ont présenté au gouvernement leur plan de participation à l’initiative. Et ce, en coopération avec le secteur privé.
C’est le 20 janvier que la seconde phase de l’initiative a été lancée au gouvernorat de Béheira, alors que sa première étape a démarré début janvier au Fayoum. Un gouvernorat qui avait enregistré, il y a quelques années, le taux le plus élevé de la migration illégale. Selon Nabila Makram, ministre de l’Immigration et les Affaires des expatriés, la campagne menée au Fayoum a connu un grand succès. Selon une infographie publiée par le ministère, une campagne de « porte-à-porte » y a été menée avec 150 000 visites visant 161 000 personnes dans 60 villages, alors que la ministre a rencontré 10 000 citoyens.
Plus concrètement, un plan développement des villages du gouvernorat du Fayoum, d’un coût de 34 millions L.E., a été décidé, ainsi qu’un autre pour le financement de petits projets destinés aux jeunes. Objectif : lutter contre le chômage et la pauvreté, principales raisons poussant les jeunes à partir.
De plus, une table ronde a été organisée la semaine dernière pour définir un plan intégral pour la mise en place de l’initiative. Cette réunion a regroupé la ministre de l’Immigration et les Affaires des expatriés, celle de la Solidarité sociale, les représentants des institutions concernées par ce dossier ainsi que 40 organisations de la société civile représentant divers gouvernorats. Et il y a été décidé de former un comité de coordination entre les différents partenaires. Névine Al-Qabbah, ministre de la Solidarité sociale, a recommandé « des mesures concrètes pour lutter contre ce phénomène en remédiant à ses causes », faisant savoir que des hommes d’affaires participeront à cette initiative. « Le chômage est l’un des plus importants facteurs qui poussent les jeunes à risquer leur vie aux bateaux de migration illégale. C’est pourquoi une coordination est nécessaire avec les hommes d’affaires et les industriels dans les gouvernorats les plus touchés pour faciliter l’accès à l’emploi », a indiqué Al-Qabbah.
Quatre axes
Le 16 janvier, les ONG ont présenté au ministère de la Solidarité sociale leur plan d’action. Selon Mohamad Abdel-Qawi, président de l’Union des ONG, ce plan porte sur quatre axes : l’octroi de prêts de 15 000 L.E. (remboursables sur 3 ans sans intérêts) aux jeunes pour lancer de petits projets ; la création d’emplois en coordination avec les hommes d’affaires et les industriels, les ONG jouant les intermédiaires entre les demandeurs d’emploi et le patronat ; l’amélioration des conditions de vie dans les gouvernorats visés par cette initiative avec un développement des infrastructures et des services dans le cadre de l’initiative « Une vie décente » ; et enfin, la sensibilisation des jeunes, à travers un travail sur le terrain et des témoignages réels sur le danger que représente la migration illégale.
Par ailleurs, la formation des jeunes au marché du travail est l’un des plus importants axes sur lesquels il est nécessaire de se pencher, estime Ahmad Al-Hayawi, secrétaire général du Fonds de développement de l’enseignement technique. Selon lui, la réforme de l’enseignement technique est l’un des mécanismes indirects de lutte contre le phénomène. « Former une main-d’oeuvre qualifiée accroît les chances d’accéder à un emploi décent et bien payé. Même ceux qui veulent travailler à l’étranger, mieux vaut qu’ils soient qualifiés et qu’ils quittent le pays à travers les canaux légitimes de migration », dit Al-Hayawi. Ce dernier a affirmé que le fonds avait conclu des accords avec l’Italie et l’Allemagne pour réformer les programmes des écoles techniques, afin qu’ils aillent de pair avec le marché du travail.
Selon Nihal Fahmi, spécialiste en cette question, cette initiative s’inscrit dans le cadre des efforts déployés par l’Egypte pour s’attaquer à ce phénomène d’une manière globale. « Si l’Egypte a réussi à contrer la migration illégale, c’est parce qu’elle avait adopté des politiques multidimensionnelles. Il ne s’agit pas seulement d’empêcher le départ des bateaux des frontières égyptiennes, mais aussi de s’attaquer aux véritables causes profondes, avec en tête le chômage, la pauvreté et l’ignorance ». Selon l’experte, il faut s’attaquer tant au volet économique qu’aux volets sécuritaire et législatif. « Il ne suffit pas de diagnostiquer les causes du phénomène, mais il est nécessaire d’oeuvrer à y remédier, et c’est que l’objectif de la stratégie du gouvernement », conclut-t-elle.
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