Juste après l’annonce des résultats des législatives, le coordinateur de la liste électorale
Fi Hob Misr, Sameh Seif Al
-Yazal, avait appelé à former une «
large coalition » au sein du parlement, «
pour soutenir le président Sissi ». Selon Al-Yazal, cette coalition aurait pour objectif de «
renforcer la stabilité politique en Egypte dans une région en proie aux guerres civiles et aux conflits sectaires ». «
Nous défendrons les intérêts du citoyen ordinaire et aiderons à améliorer la performance du gouvernement », avait ajouté Al-Yazal, un ancien officier de renseignements.
Al-Yazal tente à présent de rallier, sous une même ombrelle, les trois partis politiques arrivés en tête des élections, à savoir Al-Masriyines Al-Ahrar (les Egyptiens libres), Mostaqbal Watan (avenir d’une patrie), un parti totalement inconnu avant les élections, et le néo-Wafd. Ces trois partis totalisent 160 sièges alors que l’ensemble des partis politiques totalisent 238 sièges. Al-Yazal cherche aussi à rallier un maximum de députés parmi les 317 qui ne sont pas affiliés à un parti politique, afin de former un front de 400 députés sous la voûte, soit largement la majorité absolue. « Nous sommes bien avancés dans les négociations », a déclaré Seif Al-Yazal, qui propose de donner à ce front parlementaire, s’il se forme, le nom d’Al-Dawla Al-Masriya (l’Etat égyptien).
Les élections législatives dont les résultats ont été annoncés la semaine dernière ont donné lieu à un parlement fragmenté, bien que formé en majorité de partisans du président Sissi.
La formation de ce front parlementaire s’avère cependant problématique. Le parti des Egyptiens libres, premier bloc du parlement avec 65 députés, a déjà fait savoir qu’il ne ferait pas partie de ce front. Chéhab Waguih, porte-parole du parti, affirme : « Ce projet de front parlementaire n’a pas de bases claires. Le seul critère pour y faire partie est de voter en faveur des lois émises par le gouvernement au cours des deux années de vide parlementaire, idem pour celles qui seront présentées à l’avenir par les autorités. C’est une sorte de nouveau parti unique et il n’est pas question pour nous d’y prendre part ». Pour Emad Gad, député du même parti, « le texte fondateur de cette coalition stipule que les députés qui en font partie abandonnent leur appartenance partisane, approuvent les lois présentées par le pouvoir et se soumettent aux décisions du président de la coalition. Celle-ci détruit les programmes électoraux de chaque parti et menace le pluralisme au sein du parlement. Accepter un tel document revient à ne pas respecter les électeurs », affirme Gad à Al-Ahram Hebdo.
Les autres partis n’ont pas pris de décision claire au sujet de l’adhésion à cette éventuelle coalition parlementaire. C’est le cas notamment du néo-Wafd et Mostaqbal Watan. Hossam Al-Khouli, vice-président du néo-Wafd, explique : « Aucune décision n’a été prise pour l’instant, et le haut comité du parti doit se prononcer sur la question dans les prochains jours. Nous avons 45 députés, et je pense personnellement qu’il est préférable pour nous de former un bloc à part sans entrer dans des coalitions, dont on ne connaît pas les tenants et les aboutissants ».
La formation de ce bloc se heurte visiblement à bien des difficultés. Yousri Al-Azabawi, chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, explique : « La formation de ce vaste bloc au sein du parlement ne sera pas facile. A l’époque de Moubarak, le PND était un parti et non pas un front parlementaire. Le régime de Moubarak donnait des avantages et des services aux députés qu’il ralliait sous sa coupe. Alors que les partis du nouveau parlement sont simplement engagés dans des enchères avec le pouvoir et attendent sans doute de voir quels seront les avantages qu’ils obtiendront en échange de leur adhésion à ladite coalition ». Al-Azabawi évoque un autre facteur. « Les nouveaux partis savent que l’atmosphère politique est différente de celle qui existait à l’époque de Moubarak, et que pour pouvoir continuer, ils doivent jouer un rôle et non pas se contenter d’approuver les lois émises par le gouvernement. Tous ces facteurs rendent difficile la formation d’un bloc parlementaire uni, même si le parlement est dominé par les partisans du président », conclut Al-Azabawi.
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