Islamistes et pro-révolution seront absents des urnes cette année.
(Photos : AFP)
Il y a quelques jours, Sahwet Misr (l’éveil de l’Egypte) une coalition pro-25 Janvier fondée par Abdel-Guélil Moustapha annonçait son retrait de la course électorale, après une décision de la Haute Commission Electorale (HCE), en vertu de laquelle tous les candidats qui avaient effectué les examens médicaux avant le report des législatives (initialement prévues en mars 2015) devaient effectuer de nouveaux tests à leurs frais personnels. Cette décision de la HCE se référait à un verdict de la Haute cour administrative affirmant que l’examen médical d’avant le report des élections est «
invalide ». Or, selon Sahwet Misr, le test médical coûte environ 4 000 L.E., et multiplié par le nombre de candidats, cela fait une somme importante que la coalition ne peut pas assumer. «
Cette décision est injuste et tue les deux principes de la constitutionnalité et de l’égalité des chances », affirme un communiqué de Sahwet Misr. Khaled Daoud du parti d’Al-Dostour, qui possédait 6 candidats sur les listes de Sahwet Misr, affirme que la coalition possédait 120 candidats et en avait 120 autres de réserve. «
Si on fait le calcul, cela fait 800 000 L.E. qu’il fallait fournir en un seul jour, ce qui était impossible pour la coalition, surtout que nous n’avons pas d’hommes d’affaires qui peuvent financer les candidats », assure Daoud.
Sahwet Misr comprend dans ces rangs des partis libéraux et de centre-gauche pro-25 Janvier, notamment les partis d’Al-Dostour (fondé par Mohamad Al-Baradei après la révolution du 25 Janvier), de Misr Al-Horriya (fondé par Amr Hamzawi), le Parti Egyptien démocratique, le Courant populaire et le Courant démocratique. La liste de Sahwet Misr comprenait notamment des figures comme Georges Isaac du mouvement Kéfaya, l’ancien ministre de la Solidarité sociale, Ahmad Al-Boraï, et l’éditorialiste Ammar Ali Hassan. Khaled Daoud affirme qu’outre les enjeux financiers, les divisions internes ont contribué à la décision de son parti (Al-Dostour) de se retirer de la course électorale. « La décision de participer aux élections était déjà très contestée par une bonne partie des membres du parti, surtout les jeunes, qui ont signé une pétition pour que le parti n’y participe pas », explique Daoud. Et d’ajouter : « Lorsque la décision de la HCE a été prise, tout le monde était d’accord qu’il fallait se retirer ». Daoud reconnaît que les partis nés après le 25 Janvier, qui sont pro-démocratie, et qui peuvent être considérés comme des partis d’opposition, sont minoritaires et ne peuvent présenter un grand nombre de candidats. Hicham Khalil, responsable de la campagne électorale de Sahwet Misr, critique la HCE qui aurait dû, selon lui, prolonger le délai de dépôt des candidatures (pour donner l’occasion aux partis de trouver l’argent nécessaire aux tests médicaux). « Comment peut-on parler d’intégrité et d’égalité des chances alors que certains candidats possèdent l’argent et d’autres n’ont pas le moyen de payer les tests médicaux ?», affirme Khalil. Misr Al-Horriya (l’Egypte de la liberté), autre parti libéral fondé en 2012 par Amr Hamzawi, et membre de Sahwet Misr, explique lui aussi son absence du scrutin cette année par « les ressources limitées » et « le climat non favorable » évoquant notamment les lois restreignant les libertés et un climat « non démocratique ».
Climat « pas favorable »
L’autre force absente des élections sera le courant islamiste (hormis le parti salafiste d’Al-Nour) et qui est représenté par plusieurs partis dont le plus important est Misr Al-Qawiya (l’Egypte forte) fondé en 2012 par Abdel-Moneim Aboul-Fotouh, un ancien cadre des Frères qui a quitté la confrérie. « Nous ne participerons pas aux élections législatives. Les lois qui ont mauvaise réputation et le chaos législatif qui règne en ce moment en Egypte affaiblissent toute opportunité d’établir une vie politique correcte », affirme un communiqué du parti de Misr Al-Qawiya daté du 16 septembre. Misr Al-Qawiya n’a donné aucune consigne de vote à ses sympathisants. Il estime que le climat actuel « n’est pas favorable » et ne « garantit pas à l’opposition des chances équitables d’être représentée au sein de l’hémicycle », car selon le parti, « les institutions de l’Etat soutiennent certains candidats ». Misr Al-Qawiya, avait pris position contre l’éviction, le 3 Juillet 2013, de Mohamad Morsi. Il avait notamment appelé à un référendum sur l’ancien président islamiste. Le parti salafiste Al-Nour, qui a soutenu la destitution de Morsi, suite à des manifestations massives contre son régime, est le seul du courant islamiste en lice cette année aux élections.
Yousri Al-Azabawi du Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram pense que l’absence de ces partis de la course électorale est due à leur faiblesse. « La plupart des partis laïques fondés après la révolution de 2011 sont fragilisés par les conflits internes et n’ont pas de structures solides ni de présence véritable dans la rue, ce qui explique leur absence de la scène », affirme Al-Azabawi. Quant au courant islamiste, il est lui aussi en nette régression depuis la chute des Frères musulmans en juillet 2013. Et même s’il se présentait, il n’obtiendrait aucun résultat.
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