Des forces kurdes appuitées par Washington, combattent Daech au sol.
(Photo : Reuters)
Barack Obama accueille ces jours-ci un sommet international consacré à la lutte contre le terrorisme et «
l’extrémisme violent dans le monde ». Environ 60 pays, dont 14 du monde arabe et Israël, participent à cette rencontre à la Maison Blanche où a lieu une série de rencontres, notamment sur la lutte contre l’Etat Islamique en Iraq et en Syrie.
A Djeddah, samedi dernier, se tenait une réunion de l’Organisation de la Conférence islamique. A Bruxelles, le jeudi de la même semaine, les pays européens, effarés par le nombre de combattants occidentaux dans les rangs du groupe terroriste, EI, et par la reprise des attaques sur leur sol, discutaient du même sujet.
Des conférences similaires ont aussi eu lieu, notamment au Centre arabo-européen des études à Paris, comme s’il s’agissait d’une course pour mener des recherches plus poussées sur le phénomène et essayer de développer des stratégies pour y faire face et stopper son expansion mondiale.
La conférence à la Maison Blanche intervient après un certain nombre de développements importants. Aux Etats-Unis, Obama a demandé au Congrès d’augmenter le budget de l’armée pour lutter contre l’Etat islamique, demandant en plus des unités de commando qui travailleront sur le terrain.
Quelle unité ?
Dans certains pays arabes, une stratégie pour cibler l’organisation est déjà en cours, aux côtés de l’Egypte qui a vengé le meurtre de 21 de ses citoyens en Libye en menant des raids importants contre les sièges de l’EI. La Jordanie est désormais en tête dans plusieurs opérations contre le mouvement en Iraq qui a brûlé vif un de ses pilotes (lire page 3).
Malgré cette unité de façade, il existe des différences substantielles entre les Etats-Unis et les pays arabes à propos des organisations terroristes. La plupart des pays arabes ne font pas de distinction entre les organisations « djihadistes salafistes » et celles de l’islam politique. L’Egypte, les Emirats arabes unis et Bahreïn, par exemple, ont inclus les Frères musulmans sur leurs listes des organisations terroristes, tandis que l’Arabie saoudite les traite en tant que tels, mais sans les insérer sur sa liste. Les Etats-Unis ne reconnaissent pas les factions de l’islam politique, avec en tête les Frères musulmans, comme organisations terroristes.
Les Etats-Unis se concentrent uniquement sur l’EI en Iraq et en Syrie, contrairement à la volonté de nombreux pays arabes, et notamment l’Egypte, qui estime qu’il n’y a pas de différence entre les branches de l’organisation en Iraq, en Syrie, et sa branche en Libye, ou même entre l’EI et d’autres groupes, tels que le Front Al-Nosra en Syrie ou Beit Al-Maqdès dans le Sinaï.
Le général major Kamal Amer, rédacteur en chef de la revue La Défense, affirme qu’il « y a des doutes sur l’orientation de l’Administration américaine dans sa lutte conte le terrorisme. Elle est incompréhensible, en particulier si l’on considère le soutien américain à ces organisations dans leurs débuts, en particulier Al-Qaëda. Washington joue de la même manière en appelant à lutter contre Daech en Iraq et en Syrie, en fermant les yeux sur sa présence en Libye ».
Le 20 janvier dernier, le haut-représentant pour les affaires étrangères de l’Union européenne, Frederica Mogerny, tenait des pourparlers à New York avec Nabil Al-Arabi, secrétaire général de la Ligue arabe, pour discuter de la coopération dans la lutte contre le terrorisme. Suite à ces discussions, Mogerny a annoncé le lancement de projets spécifiques avec certains pays afin d’augmenter le niveau de coopération dans la lutte contre le terrorisme, faisant clairement référence à l’Algérie, à l’Egypte, à la Turquie, au Yémen et aux pays du Golfe.
Les Etats-Unis délèguent aussi une certaine partie de leur implication. Les services jordaniens avaient en effet réussi à infiltrer Daech et plus tard à implanter des appareils de surveillance qui ont ensuite permis aux Américains de cibler deux chefs du mouvement: Abou-Omar Al-Baghdadi et Abou-Hamza Al-Muhajir.
Selon un expert égyptien des services de renseignements parlant sous couvert d’anonymat, « il y a de sérieux défis dans le traitement de ce dossier, notamment en termes de gestion des différends entre les Etats-Unis et les pays arabes. Le plus important de ces défis demeure les financements considérables que reçoit l’EI. Et le plus dangereux, dans ce contexte, est de savoir comment faire face au recrutement d’Occidentaux par les groupes terroristes ».
Pourtant, le double jeu de Washington semble tenir: entre financement des groupes terroristes et lutte contre ces mêmes groupes terroristes, Washington parvient à préserver ses propres intérêts.
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