Al-Ahram hebdo : Pourquoi le Courant populaire s’est-il retiré de la courseaux législatives?
Ahmed Al-Béheiry: Nous avons publié un communiqué dans lequel nous expliquons les deux raisons fondamentales de notre décision. La première est liée aux lois qui se rapportent au processus électoral, à savoir la loi sur le découpage des circonscriptions et la loi électorale. Ces deux lois ouvrent la porte au retour de l’argent et du tribalisme en tant que facteurs d’influence majeurs dans le processus électoral. De même, elles ne garantissent pas une répartition équitable des candidats dans les circonscriptions. Ensuite, nous pensons qu’il y a un retour en arrière sur la question des libertés en Egypte qui a commencé avec la promulgation de la loi sur les manifestations. Cette loi a mené à l’arrestation de certaines grandes figures de la révolution de janvier dans le cadre d’une politique visant à contrôler la rue. Il y a aussi la loi qui interdit les élections dans les universités. Avec toutes ces lois, on ne peut pas espérer que le prochain Parlement sera idéal ou du moins qu’il reflétera la volonté nationale.
— Mais avez-vous envoyé vos remarques au comité de rédaction des lois électorales et du découpage des circonscriptions ?
— Le Courant populaire a, avant la promulgation de la loi sur la répartition des circonscriptions, envoyé avec d’autres partis et forces politiques, des remarques. Nous avons proposé de meilleures versions de ces lois au comité chargé de leur rédactionainsi qu’au premier ministre, Ibrahim Mahlab, et nous avons publié des communiqués annonçant nos remarques, mais nos initiatives n’ont pas été prises en considération. Elles n’ont été ni acceptées ni rejetées, nos demandes ont été carrément ignorées. Ce qui signifie que le régime ne reconnaît pas les partis politiques.
— Quel message voulez-vous transmettre en boycottant les élections ?
— Nous voulons simplement tirer la sonnette d’alarme et dire au régime qu’un large publicde jeunes est en colère et craint le retour au pouvoir des figures de l’ancien régime par la porte du Parlement. Le prochain Parlement sera une copie de celui de 2010, avec la seule différence qu’en 2010 il existait un seul Parti National Démocrate (PND), alors qu’aujourd’hui, une dizaine de PND sont en train d’être formés.
— Mais bien qu’ils soient opposés comme vous aux lois électorales, les autres partis ont décidé de participer aux élections …
— Je ne dis pas que les autres partis politiques ont tort de participer aux élections, mais en ce qui nous concerne, nous avons décidé de prendre cette position politique. C’est une position que nous assumons. Je ne peux pas me plaindre des lois qui régissent les élections législatives et en même temps y participer. Les autres partis ont considéré que leur participation était une position patriotique qui vise à soutenir la feuille de route. Je ne peux pas leur en vouloir.
— Et pourquoi n’avez-vous pas pensé à former une plate-forme pour contrer les « feloul » (anciens du régime Moubarak) au Parlement ?
— C’est à cela que nous avons aspiré au départ, mais aujourd’hui et avec ces deux lois sur les législatives, nos chances d’entrer au Parlement sont très médiocres face au potentiel financier des hommes d’affaires et des figures de l’ancien régime, et leur réseau de relations tribales. Donc, nous deviendrons une simple partie du décor électoral qui donnera simplement une légitimité à ces élections.
— Pensez-vous que votre boycott puisse influencer le processus électoral ?
— Nous avons en Egypte 96 partis politiques. Le boycott d’un seul parti ne peut pas changer ou influencer la scène politique. Et nous ne visons pas à ce que les autres partis en fassent de même, mais c’est une décision que nous avons prise et on ne compte pas la changer.
— Mais certains membres du Courant populaire ne font-ils pas déjà partie des listes électorales dans certaines coalitions ?
— Non, ce sont des rumeurs qui courent et qui visent à décrédibiliser le courant populaire. D’autres part, ces listes dans le fond sont de pure forme et ne contiennent que quelques grands noms. On parle de la liste de Kamal Al-Ganzouri, de celle du Wafd, mais on ne connaît toujours pas les noms des candidats.
— Allez-vous appeler vos partisans à boycotter eux aussi les prochaines élections ?
— Nous avons pris la décision de ne pas nous porter candidats à ces élections et non de les boycotter, et nous n’invitons pas le peuple à les boycotter. Nous allons y participer en tant qu’électeurs. Nous ne cherchons pas à créer une crise en nous retirant des élections, mais il s’agit simplement d’une position politique.
— Et quels partis politiques allez-vous soutenir ?
— Nous soutenons tout parti, mouvement, coalition ou candidat indépendant, qui forme une force face au retour des feloul ou des Frères musulmans.
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