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En Europe, la radicalisation islamophobe

Hugo Schmmit, Mardi, 13 janvier 2015

L'affaire Charlie Hebdo risque de faire le jeu de l’extrême droite et des mouvements anti-islam en France, mais aussi dans d’autres pays européens.

En Europe
La sécurité est renforcée devant les lieux de culte musulmans en France par crainte de représailles. (Photo : Reuters)

Seul le Front National (FN, principal parti d’extrême droite français) n’avait pas été convié à la grande marche républicaine qui s’est tenue dimanche dernier à Paris. Cette exclusion a fait l’objet d’une polémique tout au cours de la semaine et avait été justifiée par le profil diamétralement opposé du parti avec Charlie Hebdo, ainsi que par les multiples procès que le bureau du FN a plusieurs fois intentés au journal satirique.

L’idée lancée par le président de la République d’une union nationale, dont serait exclu un parti qui représente 25% des Français, « transforme cette union nationale en une vaste escroquerie politicienne », déclarait, quelques jours avant la manifestation, la patronne du Front National Marine Le Pen. En réponse, les dirigeants socialistes du pays avaient affirmé leur refus d’inviter le Front National à défiler, mais avaient souligné que « tous les citoyens peuvent venir, il n’y a pas de contrôle ».

Il est vrai que l’adhésion croissante des Français aux idées et au programme du Front National est de plus en plus notable en France comme en témoignent les suffrages obtenus par le parti de Marine Le Pen, qui connaît une progression constante dans les urnes jusqu’à systématiquement dépasser la barre des 20% depuis les élections présidentielles et législatives de 2012, qui avaient marqué le retour de députés frontistes à l’Assemblée nationale.

La recrudescence des actes islamophobes commis tout au long de la semaine qui a suivi les attentats en France illustre le risque de radicalisation d’une partie de la société, victime de la peur. Le risque étant que cette peur soit l’objet de tentatives de récupération politique à l’image de Marine Le Pen.

En effet, malgré les messages d’apaisement et de refus de tout type d’amalgame que l’on a pu lire sur de très nombreuses pancartes au cours des différentes manifestations, plus d’une douzaine d’actes islamophobes ont été recensés depuis le soir de la tuerie de Charlie Hebdo, allant de simples tags à des coups de feu ou l’explosion de grenades d’exercice sur des lieux de culte.

Manifestations régulières

Cette situation n’est pas sans rappeler celle de l’Allemagne, qui est le théâtre depuis plusieurs semaines de régulières manifestations organisées par le mouvement « Patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident » (Pegida), réunissant jusqu’à près de 20000 personnes chaque semaine dans la ville de Dresde. Pediga espère en effet profiter des attentats djihadistes en France pour gonfler ses troupes. Pour la réunion de ce lundi, la 12e, les organisateurs ont appelé à rendre hommage aux « victimes du terrorisme de Paris ». Après la tuerie de Charlie Hebdo, Pediga n’a en effet pas tardé à réagir. « Les islamistes, contre lesquels Pegida met en garde depuis plus de 12 semaines, ont montré aujourd’hui en France qu’ils sont tout simplement incompatibles avec la démocratie », écrivait mercredi le mouvement sur sa page Facebook.

Ailleurs en Allemagne, les « patriotes européens » ont fait quelques émules, comme à Bonn (Bogida) ou à Berlin (Bergida). Et lundi dernier, Leipzig a connu sa première manifestation pro-Pegida. Et le mouvement essaime en Europe : à Vienne, un premier défilé Pegida est prévu fin janvier et des pages Facebook ont été créées en Suède et en Norvège (respectivement 6000 et 2 000 abonnés). Mais en face, les anti-Pegida demeurent toujours nettement plus nombreux en Allemagne, où plusieurs contre-manifestations ont globalement drainé plus de monde. C’est dans ce climat tendu que la chancelière Angela Merkel, également très critique envers Pegida, a reçu pour la première fois son homologue turc Ahmet Davutoglu, venu, selon la presse turque, demander à Mme Merkel des actions concrètes contre les sentiments anti-musulmans en Allemagne.

L’Europe semble ainsi se fracturer entre détenteurs d’une parole islamophobe de plus en plus libérée et ceux qui prônent un message d’apaisement.

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